Amazon censure certains livres érotiques

Arnaud de la Grandière |

Selena Kitt est une figure de la littérature érotique. Une cinquantaine de ses livres sont en vente sur le Kindle Store d'Amazon, mais celle-ci s'est aperçue que trois d'entre eux avaient été retirés des rayons : Back to the Garden, Naughty Bits, et Under Mr. Nolan's Bed. Ces trois livres ont en commun d'explorer le tabou de l'inceste, un thème relativement courant dans la littérature du genre, sans doute précisément à cause de sa nature fondamentalement transgressive.

D'autres auteurs, Jess C. Scott, Esmeralda Green, et Frances Gaines Bennett, ont vu leurs livres qui traitaient d'inceste également disparaître des rayonnages d'Amazon. Pire encore, les livres ont été supprimés des Kindles de leurs acheteurs, à l'image de ce qui s'était déjà passé avec 1984 (lire Kindle : Amazon efface des livres à distance).

Une des lectrices a contacté le service clientèle d'Amazon pour se faire rembourser le livre désormais disparu, pour se voir reprocher par son interlocuteur la "gravité" de ses lectures, qu'elle avait osé acheter auprès d'Amazon…

Selena Kitt déplore qu'Amazon ne donne pas de directives plus claire quant à sa charte (Amazon se contente d'indiquer qu'elle se réserve le droit de retirer toute publication à sa seule discrétion), et souligne également qu'aucun de ses protagonistes ne sont mineurs. Ajoutons que les œuvres littéraires mettant en scène des mineurs dans des situations explicites ne sont pas illégales, pas plus aux États-Unis qu'en France, et que les œuvres du Divin Marquis (qui ne s'encombrait pas de tels scrupules) figurent en bonne place sur le Kindle Store.

Notons également que le roman de Jess C. Scott fait bel et bien figurer un protagoniste mineur (ce à quoi il répond que la Lolita de Nabokov, d'illustre mémoire, n'en fait pas moins). Selena Kitt ajoute qu'elle ne cautionne pas l'inceste dans la réalité, pas plus qu'un auteur de fiction policière ne prend fait et cause pour les meurtriers.

L'auteur Will Belegon signale narquoisement qu'en suivant de tels principes, il faudrait retirer la Bible des rayonnages d'Amazon, celle-ci ne manquant pas d'exemples d'inceste. Selena Kitt rappelle également que la publicité du Kindle faisait figurer des pages du roman Sleepwalking, qui raconte la relation taboue entre un jeune homme de 19 ans et sa belle-mère…

L'affaire fait suite à une première controverse lancée le mois dernier, alors qu'Amazon a retiré de son magasin le "guide du pédophile pour l'amour et le plaisir", qui donnait toute les recettes pour abuser d'un enfant. Le site marchand, sans doute échaudé par l'affaire, aura quelque peu poussé le curseur trop loin. A l'inverse, Apple, pourtant décriée pour sa pudibonderie, propose bel et bien les trois livres incriminés de Selena Kitt, tout comme Wicked Lovely, le roman de Jess C. Scott qui a été supprimé par Amazon.

photo
avatar zvalley | 
" à l'image de ce qui s'était déjà passé avec 1984" En lisant vite, j'ai cru que le kindle existait deja il y plus de 25 ans =)
avatar les3gujanais | 
Quand on voit son design, on pourrait le croire ;-)
avatar tpromis | 
C'est honteux ! Ils te proposent d'acheter un livre, ils te le reprennent puis il te disent que c'est toi le fautif !
avatar SRC | 
Comment s'appelle de PDG d'Amazon, des fois? Euh... Sarah Palin?
avatar agerber | 
C'est beau le dématérialisé... ! Va ton vers une librairie unique ? ..Ouf le gouvernement a fait passer le livre numérique a 5,5% pour éliminer les mauvais petits libraires qui pullulent dans nos rues.. A quand la mort de la Fnac ?
avatar Satoral | 
Oui bien sûr, passer à 5.5% pour éliminer les libraires indépendants qui disposent de lois d'exceptions culturelles uniques au monde pour survivre… Effectivement, ils veulent vraiment faire mourir les petits libraires de quartier oui, avec de telles lois qui permet leur survie depuis des années et que s'ils faisaient péter le système, ils tomberaient les uns après les autres… (prix fixe avec 5% de marge, système où les invendus retournent chez les éditeurs aux frais de celui ci et j'en passe…) Qu'est ce qu'il faut pas lire… c'est vrai qu'accorder le taux de TVA du numérique sur le papier (parce que les produits culturels sont à 5.5%) est une attaque ignoble envers les libraires… et un manque total de respect envers le consommateur d'ailleurs. Le pauvre petit libraire a beau rôle d'ailleurs, mais une librairie est un commerce donc bon, c'est pas quelque chose de romantique. Un commerce, ça se prépare, ça s'entretient, etc. Si les mecs se lancent là dedans juste parce qu'ils aiment lire, faut pas non plus venir se plaindre de crever à petit feu… Personne vient se plaindre qu'un magasin de bijoux ou de fringues ferme parce que y'a des méchants qui vendent sur le net…
avatar agerber | 
Lorsqu'il n'y aura plus de libraires, ni de marchands de journaux, tu auras le choix, pour ton savoir et ta diversité entre deux ou trois monopoles.. Et puis tu trouveras au détour d'une rue là ou trônaient des libraires , de belles machines automatiques à distribuer l'argent.. Le pied quoi ! Il me souvient qu'à une époque certains régimes brulaient des livres, pour éviter aux citoyens de mal penser..
avatar fel-x | 
Faudra penser à bruler Sade. Enfin, le virer des disques dur. C'est moins dangereux cela dit.
avatar winstonsmith | 
Roh... Les copieurs... Ils ont copié Apple...
avatar tipablo | 
"Le guide du pédophile pour l'amour et le plaisir". Non… Non ? C'est une blague, c'est pour rire, c'est un fake ? Hein !!? Dites ?
avatar agerber | 
Difficile de le dire.. T'as plus le droit de le lire !
avatar MiB42 | 
En tout cas joli coup de pub pour elle !
avatar Nihao | 
"Une des lectrices a contacté le service clientèle d'Amazon pour se faire rembourser le livre désormais disparu, pour se voir reprocher par son interlocuteur la "gravité" de ses lectures, qu'elle avait osé acheter auprès d'Amazon…" --> Les entreprises se permettent de nos jours de plu sen plus de saloperies contre lesquelles ont a lutté pendant des siècles. Gerbant !
avatar hellonearth | 
Jiminy Panoz, je t'aime! Presque envie de te remercier d'avoir un cerveau, c'est tellement rafraîchissant!
avatar Satoral | 
"Lorsqu'il n'y aura plus de libraires, ni de marchands de journaux, tu auras le choix, pour ton savoir et ta diversité entre deux ou trois monopoles.. Et puis tu trouveras au détour d'une rue là ou trônaient des libraires , de belles machines automatiques à distribuer l'argent.. Le pied quoi ! Il me souvient qu'à une époque certains régimes brulaient des livres, pour éviter aux citoyens de mal penser.." Bah bien sûr, on mélange tout et n'importe quoi… Les librairies qui seront remplacés par des distributeurs de billet… Après les gouvernements qui "brûlent les bouquins" en comparaison d'une baisse à 5.5%. T'as dû fumer un de mes livres pour passer du coq à l'âne ^^ Heu en tant qu'auteur indé, la distribution du savoir, ça fait bien longtemps que je sais qu'elle passe plus par les librairies. Entre les grosses qui calibrent leur stock sur ce qui se vendra en fonction des CSP qui sont clients, et les petites qui ont tellement pas de place qu'ils peuvent même pas en faire pour ton bouquin si tu viens leur proposer en tant qu'indé (au point où elles vendent les mêmes bouquins que les grosses et que les nouveaux auteurs pourtant signés par des grosses maisons ont deux exemplaires en boutique, deux exemplaires que les petits libraires s'acharnent à vendre au plus vite pour faire de la place, ne pas travailler la "nouveauté auteur" et ne surtout pas redemander du stock), on peut se dire qu'au final, le système a envie de transmettre le savoir qu'il a envie de transmettre… au hasard des romans romantiques où on parle d'amour pour la femme citadine qui représente le coeur de marché. Effectivement, le dématérialisé est totalement néfaste puisqu'il explose les frontières, que des romans pépites dont personne ne veut en maison car ils ne sauraient pas quoi en faire tapent les 40 000 ventes sur Kindle aux USA rien que sur le bouche à oreille (d'ailleurs des auteurs profitent de ce système pour publier des livres que leur maison ne voulait pas éditer…) et que potentiellement, on pourrait bientôt avoir accès à presque tous les bouquins du monde pour peux que l'on sache chercher. Le dématérialisé permettant en théorie une duplication infinie, il est clair que la distribution du savoir est mise en danger… En attendant, ça aide bien la contre-culture, à savoir tout ce dont l'intelligentsia pudibonde de la culture marketée ne veut pas… et non, les petits libraires s'en foutent complètement. Seuls les USA permettent un marché alternatif en dur…

CONNEXION UTILISATEUR