Quelle place pour le jeu vidéo sur l'App Store ?

Stéphane Moussie |

L'étape de validation de l'App Store fait régulièrement l'objet de critiques, que ce soit pour les embouteillages occasionnels, les arnaques qui passent entre les mailles du filet, ou des questions morales plus polémiques. En 2009, Apple rejetait une application représentant des élus américains sous la forme de caricatures pour contenu « obscène, pornographique ou diffamatoire ». Dernièrement, ce sont deux jeux vidéos qui ont été au coeur de l'actualité.

D'un côté, un jeu de la National Rifle Association (NRA), puissant lobby américain qui défend le libre commerce des armes à feu, a été publié sur l'App Store. Il était de plus catégorisé comme tout public à sa sortie — depuis, le classement de l'application a été revu, elle est dorénavant dans la catégorie 12+. Le but du jeu est de tirer sur des cibles et des messages éducatifs sont affichés entre chaque partie.

De l'autre côté, un jeu de stratégie qui se joue avec des cartes s'est vu refuser l'entrée de l'App Store. La raison ? Endgame Syria (le jeu est jouable sur le web) tire son scénario des affrontements qui se déroulent actuellement en Syrie. Le joueur est chargé de faire gagner la rébellion syrienne face à l'armée du régime dans cette application.

Que disent à propos les guidelines de l'App Store, les règles strictes auxquelles doivent se plier les développeurs s'ils veulent voir figurer leurs apps dans la boutique ?

Le regard que nous [NDLR : Apple] portons sur les Apps est différent de celui que nous portons sur les livres ou les chansons, que nous ne contrôlons pas. Si vous voulez critiquer une religion, écrivez un livre. Si vous voulez vous épancher sur le sexe, écrivez un livre ou une chanson, ou créez une application médicale. Cela peut devenir complexe, mais nous avons décidé d’interdire certains types de contenu sur l’App Store.

Apple le reconnait, justifier les choix d'un refus ou d'une validation peut devenir « complexe ». Mais surtout, Apple considère différemment les apps, et donc a fortiori les jeux, des autres contenus (livres, musique, films) sur sa boutique. VentureBeat a interrogé plusieurs créateurs de jeux vidéo à propos de cette distinction — discrimination ? — pour les jeux.

« Je pense qu'Apple adopte la mauvaise attitude concernant les jeux, mais au final la faute incombe aux développeurs, et pas à Apple. Apple traite les jeux comme des expériences superficielles de divertissement commercial, parce que ce sont ce que les développeurs en ont fait », estime Jonathan Blow, le créateur de Braid, un jeu indépendant encensé par la critique. Selon Blow, le choix de Cupertino de refuser des jeux contenant des éléments politiques ou religieux signifie que l'entreprise ne voit pas le jeu vidéo comme un moyen de contribuer au débat public.

« Je pense que la forme du média devrait être sans importance, c'est le contenu qui compte », estime le chef de projet d'Endgame Syria, Tomas Rawlings. « Les jeux, les films, les applications, les bandes dessinées, la musique et les livres devraient tous être considérés de la même manière », invoque le développeur. Si rien n'empêche l'utilisateur d'acheter des films ou des chansons ailleurs que sur iTunes pour les écouter sur son iPhone (Spotify, CD rippés, Amazon MP3...), l'App Store est le seul moyen de se fournir en jeu. Et c'est sur cette catégorie de médias, les applications, qu'Apple exerce son contrôle le plus strict.

Geometric Porn, un projet réalisé par l'artiste Luciano Foglia. L'application a été validée dans un premier temps puis retirée.

Pour Edmund McMillen, l'homme derrière The Binding of Isaac, « Apple a juste choisi une façon très inopportune de dire qu'ils ne veulent pas publier des applications qui peuvent mettre les gens en colère. » Il ajoute que les termes employés par Apple dans les guidelines signifient seulement que l'entreprise ne veut pas publier de jeux sujets à controverse. Or, ce sont les décisions mêmes d'Apple qui deviennent l'objet de débats.

Rappelons qu'Apple n'est pas la seule à faire un contrôle a priori des jeux disponibles sur sa boutique. Tous les fabricants de consoles valident les jeux qui sortent sur leurs plateformes. Et ils n'échappent pas eux non plus à quelques polémiques. En 2009 par exemple, l'éditeur français Microïds dénonçait une politique de validation opaque et arbitraire de Sony.

Reste un aspect sur laquelle l'entreprise de Cupertino emporte l'adhésion des acteurs du monde du jeu vidéo : la dimension économique. Coûts de développement relativement faibles, écosystème qui facilite l'acte d'achat (téléchargement, free to play), base d'utilisateurs énorme... Apple a définitivement toutes les cartes du jeu en main.

avatar landry | 
Toutes les cartes en main en effet, mais toujours pas de manette en main... On veut des boutons! On veut des boutons! Des joystick pour les sans joystick!!
avatar lechneric | 
@guigus31 Nintendo commercialise la DS. Sony commercialise la Vita et la PSP. La Neo Geo X Gold vient de sortir. Il y a des boutons dessus.
avatar lol51 | 
Sauf que les voitures ne sont pas faite dans le but de tuer, les armes si. Le fait que la NRA fasse une app destinée aux enfant avec des achat in-app pour avoir de nouvelles arme est en soit suffisant pour être critiqué. Ça s'appel du lobbying directe.
avatar solea | 
Je trouve personnellement que jouer à la guerre civile syrienne, c'est au-delà de mes capacités de compréhension. Au fait, demain, j'organise une partie de génocide arménien chez moi, qui vient ? :D
avatar ecegler | 
Essaie JetPack Joyride, Temple Run, Subway Surfers... ceux là sont parfaitement adaptés au tactile. C'est clair que les jeux qui ont des croix directionnelles tactiles rendent le gameplay pourri (à mon avis).
avatar lol51 | 
Il y aura toujours des ayatollahs du joypad au 56 boutons. Ridicule...

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