Les 310 brevets que Microsoft utilise contre Android

Florian Innocente |

C'est au Ministère du Commerce chinois que l'on doit un sursaut de transparence sur les brevets qui permettent à Microsoft de toucher des royalties de la part de nombreux fabricants Android. Depuis trois ans, Microsoft a réussi à signer des accords de licences sur sa propriété intellectuelle avec Samsung, HTC, Foxconn, Amazon, LG ou encore Acer pour ne citer que les plus connus (avec Motorola, un différend perdure sur le sujet). L'an dernier, l'éditeur se targuait de récolter des royalties sur 50% des terminaux Android vendus dans le monde, une part qui a certainement augmenté encore depuis.

Lors de chaque signature et annonce publique d'un contrat, ces montants négociés et les détails sur les brevets couverts restent confidentiels. À l'occasion d'un procès avec le libraire Barnes & Nobles pour sa tablette Nook en 2011, une douzaine de ces documents furent rendus publics. Il y avait par exemple un brevet relatif à la compatibilité avec le format exFAT dont Android a besoin s'il veut lire les cartes d'extension microSDXC. Ou encore, la représentation d'un lieu en surimposition sur une carte. Cependant, ce volume de propriété intellectuelle est aujourd'hui bien plus important et dépasse les 300 brevets (310) dans des domaines très variés.

Ce printemps, c'est dans le cadre de l'analyse de l'acquisition de Nokia par Microsoft que le Ministère du Commerce chinois (MOFCOM) a obtenu, puis publié, le détail des brevets qu'utilise Microsoft face à ses concurrents. Lorsque la Chine a validé l'opération, Microsoft a révélé qu'il fallait utiliser environ 200 familles de ses brevets pour réaliser un smartphone Android.

Le ministère a publié deux listes, dont la plus complète (.doc et version réduite : .doc) est divisée en trois catégories totalisant 310 brevets. Lorsqu'on parle de familles, il s'agit parfois de groupes ne comprenant en fait qu'un seul brevet.

Ars Technica a comptabilisé 73 brevets qui tombent dans le cadre des standards essentiels. Des brevets que Microsoft a pour obligation de licencier selon des conditions justes et équitables. La Chine s'inquiétait par exemple qu'après l'achat de l'activité mobile de Nokia, Microsoft ne durcisse les conditions d'obtention de ces licences.

Pas moins de 127 autres brevets sont décrits par Microsoft comment entrant dans la conception des smartphones Android. Restent 68 brevets déposés, mais encore non accordés et un dernier lot de 42.

Les intitulés couvrent des domaines souvent très génériques du fonctionnement d'un smartphone : requêtes personnalisées lors d'une recherche dans une zone géographique environnante ; présentation d'événements récurrents ; affichage de publicités pertinentes selon l'emplacement ; barre de contrôle d'un lecteur audio et vidéo, interface utilisateur multilingue, création d'un raccourci Internet sur le bureau, etc.

Cette collection de brevets s'est accrue en 2011 après la cession de la propriété intellectuelle du Canadien Nortel. Le groupe Rockstar Bidco avait empoché ces brevets pour 4,5 milliards de dollars. Un groupe composé d'Apple, de Microsoft, EMC, RIM, Ericsson et Sony, et en compétition face à Intel et Google (lire Rockstar : la ferme aux brevets de Nortel).

La sortie publique de cette liste a un mérite, celui de montrer clairement quels brevets sont utilisés par Microsoft pour faire plier les fabricants Android. Un exercice de transparence bienvenu, mais il aura fallu que Microsoft soit lui-même mis sous pression pour enfin ouvrir ses dossiers.

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