Google prêt à tous les sacrifices pour revenir en Chine

Mickaël Bazoge |

Les constructeurs de smartphones chinois font dans la grande majorité appel à Android pour motoriser leurs appareils, mais pas aux services en ligne de Google, pour au moins deux bonnes raisons : la première, c’est qu’en utilisant AOSP, la déclinaison open-source d’Android, ils ont les mains libres pour concevoir des surcouches complètement adaptées à leurs besoins.

La seconde raison tient à la nature de l’activité de Google en Chine, qui est pratiquement inexistante étant donnée les relations exécrables entre le moteur de recherche et les autorités chinoises. Cela fait en réalité cinq ans que les services de Google sont absents de l’empire du Milieu pour cause de censure (en 2010 toute l’activité chinoise de l’entreprise a été relocalisée à Hong Kong et largement bloquée depuis dans le reste de la Chine).

Cela pourrait changer. D’après The Information, Google serait prêt à mettre de l’eau dans son vin afin de retrouver les bonnes grâces du gouvernement. L’enjeu est de taille, puisque les millions d’utilisateurs chinois qui possèdent un smartphone Android ne se connectent pas aux serveurs de Google et ne représentent aucun intérêt commercial pour l’entreprise.

C’est pourquoi le moteur de recherche espère obtenir, d’ici l’automne, l’aval des autorités chinoises pour lancer une version spéciale du Play Store pour les terminaux Android du pays. La première incursion prévue est la mise en place d’une déclinaison d’Android Wear, une plateforme que Google gère de manière plus serrée que sa boutique d’apps classique. Plusieurs applications vestimentaires conçues par des éditeurs chinois sont d’ores et déjà disponibles, tandis que Google prépare un assistant virtuel sachant interpréter le mandarin.

Pour le Play Store, les choses sont plus compliquées étant donné la variété et l’abondance des applications disponibles. Il faudra non seulement opérer une sélection drastique d’apps en phase avec la censure du gouvernement chinois, mais aussi convaincre les utilisateurs d’abandonner les boutiques alternatives qui pallient l’absence de l’échoppe officielle.

Pour ce faire, Google va s’appuyer sur les développeurs à qui la société va faire miroiter les 70% de revenus perçus sur les ventes de leurs apps et des micro-paiements — un taux standard partout dans le monde, mais pas en Chine où les boutiques alternatives proposent beaucoup moins. Le moteur de recherche compte aussi sur les éditeurs occidentaux dont les logiciels ne sont pas encore distribués en Chine.

Toujours histoire d’apaiser le courroux des autorités, le Play Store se limitera pour le moment à la distribution d’applications : il ne sera pas question de commercialisation de films ou de livres. Enfin, cette boutique « adaptée » à la Chine ne se destinera qu’aux appareils sous Android Marshmallow, ce qui en réduira forcément l’impact sur le court et moyen terme.

Si on ajoute à cela le fait qu’un des futurs Nexus est construit par Huawei, un des constructeurs chinois les plus en pointe dans le pays et qui gagne des parts de marché partout dans le monde, Google prépare en effet son retour en Chine… quitte à sacrifier ses valeurs.

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