Google voudrait vraiment gérer les puces RISC-V avec Android

Pierre Dandumont |

Depuis quelques années, un nouveau jeu d'instructions fait parler de lui, en parallèle du x86 d'Intel et de celui d'ARM : RISC-V (le V signifie ici 5). Apparu en 2010, il est libre, basé sur une logique de type RISC et ne nécessite pas de royalties, ce qui le rend intéressant pour beaucoup de sociétés.

Google voudrait que RISC-V soit une architecture majeure

Depuis quelques mois, du code RISC-V avait été vu dans la partie open source d'Android (AOSP), mais — comme le note Ars Technica — Google a finalement communiqué un peu sur ce point au RISC-V Summit, un ensemble de conférences liées au jeu d'instructions. Lars Bergstrom (un des responsables de la partie technique d'Android) a en effet indiqué qu'il aimerait que RISC-V soit une plateforme majeure pour Android, même si le travail nécessaire risque encore de prendre quelques années.

Google au RISC-V Summit.

Android gère essentiellement ARM

Actuellement, le monde Android fonctionne essentiellement sur des puces ARM, avec la possibilité de fonctionner en 32 bits ou en 64 bits, même si certains appareils comme le récent Pixel 7 abandonnent le 32 bits. Android a un temps été pris en charge sur les puces MIPS, mais le support a été abandonné en 2018, et si la compatibilité x86 existe encore, elle est rarement déployée dans des smartphones. Le x86, en 2023, sert essentiellement pour la compatibilité Android de Windows 11 et de Chrome OS, deux plateformes où les puces d'Intel sont majoritaires.

Mais pour Google, dépendre d'ARM reste une épée de Damoclès, comme pour Apple d'ailleurs. En effet, les évolutions du jeu d'instructions dépendent de la société ARM, qui passe de mains en mains, et tous les fabricants de CPU compatibles ARM doivent payer une licence (plus ou moins élevée) à ARM. Ce point pose parfois des soucis, comme récemment avec Qualcomm et Nuvia.

La bisbille entre ARM et Qualcomm aura-t-elle un effet sur Apple ?

RISC-V n'est pas encore tout à fait adapté

Si le passage à RISC-V semble inévitable pour certains, le jeu d'instructions n'est malheureusement pas encore tout à fait mûr pour remplacer ARM dans le cœur des smartphones. La première raison est liée au fait que le jeu d'instructions est récent : la partie logicielle manque d'optimisation pour le moment et les développeurs préfèrent se pencher sur le x86 ou l'ARM à ce niveau. Dans le cas d'Android, c'est parfois très visible : les optimisations touchent essentiellement le code ARM et la partie x86 est par exemple assez « brute » comparativement.

De même, certains composants open source — comme ceux liés au décodage vidéo — sont optimisés très finement pour les puces ARM et Intel (avec parfois de l'assembleur) mais pas pour RISC-V. Ces points ne gênent pas directement le fonctionnement, mais rendent les choses plus compliquées pour les performances.

Le Veyron V1, un CPU RISC-V performant pour les serveurs.

Et le point des performances est la seconde raison. Actuellement, les processeurs RISC-V ne peuvent pas vraiment concurrencer les meilleures puces ARM ou x86 à ce niveau. Les quelques sociétés qui conçoivent les puces visent en effet plutôt le marché de l'embarqué, des serveurs ou celui de la (très) basse consommation, mais pas celui des smartphones. Les meilleurs CPU RISC-V annoncent généralement des performances du même ordre que des architectures ARM qui ont un an ou deux, avec comme avantage avancé une consommation plus faible. Et même dans les serveurs, les puces montrées au RISC-V Summit visent les architectures actuelles avec une sortie fin 2023.

Comme expliqué plus haut, il ne faut donc pas s'attendre à des smartphones Android RISC-V rapidement, mais la transition est tout de même bien en route.

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