Censure : coup de poignard contre le livre La Femme

Mickaël Bazoge |

Apple a droit de vie ou de mort sur les contenus distribués par l’App Store, mais les choses sont plus complexes dans le cas de l’iBooks Store L’affaire qui semble vouloir se dessiner autour de l’œuvre de Bénédicte Martin, La Femme, en est un parfait exemple : si Apple refuse de le mettre en vente, c’est à cause de sa couverture, pas de son contenu.

Aux Éditions des Équateurs, on tombe des nues : « La société américaine estime que la couverture du livre de Bénédicte Martin représentant une femme aux seins nus prolongeant une lame de poignard est "inappropriée" », explique l’éditeur Olivier Frébourg au Figaro. Son entreprise s’insurge contre ce qui est qualifié d’« acte de censure manifeste à rebours de la liberté de création ». L’éditeur a décidé d’interpeller non seulement la ministre de la Culture et de la communication Aurélie Filippetti, mais également le Syndicat national de l’édition et la Commission européenne.

Si certaines bandes dessinées d’Izneo avaient par exemple été censurées, c’est qu’elles sont distribuées par le biais d’une application disponible dans l’App Store. Les règles gouvernant l’iBooks Store sont légèrement différentes de celles régissant la boutique d’applications d’Apple : la firme de Cupertino invite d’ailleurs ceux qui veulent parler de religion ou de sexe à « écrire un livre » plutôt qu’à développer une app. La domination des classements de l’iBooks Store par les romans à l’eau de rose et le mommy porn finit de prouver qu’Apple n’a pas de problème avec le sexe dans les livres.

Mais elle a très clairement un problème avec le sexe sur les livres : si l’achat est contrôlé (libre à l’utilisateur de mentir sur son âge), l’affichage des pages de l’iBooks Store ne l’est pas. Une application comme celle des Musée des Beaux-Arts de Lyon avait été recalée pour des raisons similaires : Apple n’avait pas de problème avec les œuvres d’art qu’elle reproduisait, mais elle ne voulait pas voir les formes des Tahitiennes de Gauguin sur les captures d’écran visibles par tous dans la fiche de l'App Store. En l’espèce donc, les Éditions des Équateurs devront revoir la couverture de l’ouvrage de Bénédicte Martin.

Bien sûr, on peut déplorer qu’Apple soit si prude : avant de finir dans l’iBooks Store, les clients les plus jeunes en auront vu d’autres dans les publicités et les films… De quoi relancer, une nouvelle fois, le débat sur la pertinence d’une section « adulte » sur l’App Store et l’iBooks Store, à l’accès strictement contrôlé et aux règles claires et nettes.

Michaël Bazoge / Anthony Nelzin

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