Apple ferme toujours la porte à l'Open Barres de l'ANFR

Stéphane Moussie |

L'Agence nationale des fréquences (ANFR) s'impatiente. Sans la coopération d'Apple, il lui est toujours impossible de proposer son application Open Barres sur iPhone.

Disponible depuis 2018 sur Android, cette app permet de mesurer la puissance du réseau mobile reçue par son smartphone. Cette information exprimée en dBm est donnée en temps réel. À -121 dBm la réception est médiocre, à -51 elle est excellente. On peut également enregistrer un historique des mesures au gré de ses déplacements.

Open Barres sur Android. À gauche, la mesure en temps réel de la puissance. À droite, les différentes mesures enregistrées lors d'un parcours.

Open Barres permet donc aux utilisateurs de s'informer sur l'état de leur connexion réseau de manière plus précise qu'avec le petit indicateur d'Android. Le problème qui se pose depuis toujours sur iOS, c'est qu'Apple ne donne pas les moyens aux développeurs d'exploiter ces données. « L’accès aux interfaces permettant de remonter les données nécessaires au fonctionnement de l’application nous est fermé sur le système d’exploitation iOS, à la différence d’Android », explique l'ANFR dans un billet d'actualité publié fin décembre.

Ces données existent pourtant : ouvrez l'application Téléphone, saisissez *3001#12345#* et appuyez sur le bouton d'appel. Vous tombez alors nez à nez avec un menu caché contenant une myriade d'informations techniques, dont les dBm ici : Cell Info > RSRP. Mais en l'absence d'API, impossible pour l'ANFR de mettre en lumière cette information dans une application.

« Un échange avec Apple France en octobre laissait enfin envisager le début d’un dialogue constructif pour le portage de l’application sur iOS. Malheureusement, malgré la transmission, par l’ANFR, des types détaillés des données techniques utilisées dans Open Barres, aucune nouvelle n’a été reçue, malgré les relances de l’Agence », se lamente l'ANFR. Quand bien même Apple aurait retenu l'idée sans en avertir l'agence, il ne faudrait sûrement rien attendre avant la prochaine mise à jour majeure d'iOS, le moment où le fabricant fait le plus évoluer ses API.

Le menu caché Field Test de l'iPhone qui comprend de nombreuses infos techniques sur le réseau. La ligne RSRP correspond aux dBm.

« Quelles sont ces mystérieuses raisons qui conduisent Apple à priver durablement les détenteurs d’iPhone des informations d’intérêt public prodiguées par Open Barres ? », se désole l'agence française, dont le directeur général a lancé un appel à Apple sur Twitter qui n'a pas trouvé beaucoup d'écho. Ce n'est pas la première fois que l'ANFR met publiquement la pression sur Apple, en 2019 déjà l'agence avait fait part de ce blocage, mais c'est la première fois qu'elle fait de manière si directe.

Open Barres s'inscrit dans une démarche d'information du grand public sur l'exposition aux ondes. Outre la puissance du signal, l'application présente le DAS maximal (la mesure indicative de la quantité d’énergie véhiculée par les ondes électromagnétiques émises vers l’utilisateur par un appareil) du téléphone sur lequel elle est installée. En outre, l'ANFR collecte avec Open Barres des données qui servent entre autres à identifier les points de brouillage et détecter les mises en service des antennes déclarées par les opérateurs.

Pour aller plus loin :
avatar byte_order | 

@MGA
> De là à considérer que l’information est capitale pour le grand public….

Avec la même logique, la mesure de la qualité de l'air n'a pas d'intérêt pour le grand public.
Le niveau de radiation, également.
La qualité de l'eau, non plus.

Faudra nous expliquez en quoi la pollution des ondes est moins ou carrément sans intérêt pour le public...

Etrange comment de la collecte faite en toute transparence et sur base clairement du volontariat est systématiquement mal vue par certains dès lors qu'elle est piloté par un organisme public, mais quand c'est une entreprise multinationale étrangère qui collecte sans accord préalable des données pour faire marcher son réseau d'AirTags ou de placement de publicité, dont certains usages ne sont pas exactement aussi nobles que prévus, alors là tout va bien, c'est normal, c'est légitime parce que "c'est normal de vouloir faire de l'argent".

J'opte donc pour une réaction pavlovienne au mot "public".

avatar MGA | 

@byte_order

Vos exemples concernent des dispositifs mis en place par les agences concernées avec le matériel des agences respectives, sans collecte des données personnelles de la population et sans pleurnicher parce que le méchant Apple ne veut pas donner l’accès à des informations.
Cela n’a rien à voir.
Pour le reste je critiquais simplement le discours, la forme et la méthode.
Si l’objectif unique est la mesure en temps réelle du réseau, alors la communication doit être adaptée et la collecte (et c’est peut-être le cas) ne doit pas intégrer de possibilité de localisation de l’individu, ni de l’appareil individuellement, juste une mesure et un point gps exclusivement…. et pas en continu (en rase campagne il doit être assez facile de recréer des trajets sans mélanger les individus).
Et ce n’est pas parce que vous installez librement une app qu’elle doit pouvoir faire n’importe quoi.

avatar MarcMame | 

@MGA

"la collecte (et c’est peut-être le cas) ne doit pas intégrer de possibilité de localisation de l’individu, ni de l’appareil individuellement, juste une mesure et un point gps exclusivement…."

————-
On tient un champion là. 😅

avatar MGA | 

@MarcMame

😘

avatar byte_order | 

@MarcMame
> On tient un champion là.

Et vous avez, *évidement*, fait la démarche d'aller voir de vous même ce qui était collecté par Open Barres.
Bien sûr.

avatar byte_order | 

@MGA
> Cela n’a rien à voir.

Que voila une joli contre argumentation...

> Pour le reste je critiquais simplement le discours, la forme et la méthode.

Mais oui, surtout n'allez pas sur le fond.
Pour rappel, votre première réaction a été qualifier Open Barres comme étant un justificatif utile uniquement à justifier le budget de fonctionnement de l'ANFR.
Comme si avec son budget cet organisme avait les moyens de financer le même type de collecte avec du personnel sur le terrain...

Je crois, moi, que c'est justement des raisons de *contraintes* budgétaires qui justifient le recours à de la collecte collaborative (mais anonymisée).

> Si l’objectif unique est la mesure en temps réelle du réseau, alors la communication
> doit être adaptée et la collecte (et c’est peut-être le cas)

Alors pourquoi faites vous comme si c'était probablement pas le cas ?
Lisez plutôt ce que dit l'ANFR sur les données collectées :

"Seules les informations techniques nécessaires à l'exploitation des mesures sont transmises à l'ANFR, notamment les coordonnées GPS des points de mesure, la vitesse instantanée, les dates et heures des mesures, les niveaux de réception des champs mesurés, et les données du réseau utilisé. Du bruit est ajouté de manière aléatoire aux heures de mesures afin d'en dégrader la précision. Les identifiants utilisateur et parcours NE sont PAS transmis".

Vous me direz "et il faudrait les croire sur parole !?". Et je répondrais que beaucoup le font bien quand il s'agit d'entreprises étrangères privées...
Et je rappele qu'il suffit de désinstaller l'app pour ne plus avoir de collecte, tandis qu'il est moins simple de ne pas participer à la collecte pour AirTags à un quidam...

> et pas en continu (en rase campagne il doit être assez facile de recréer des trajets
> sans mélanger les individus).

C'est vrai aussi des infos qu'ont les opérateurs. Pourtant privés.
Et pourtant vous ne râlez pas qu'ils collectent ces infos, n'est-ce pas ?

avatar MGA | 

@byte_order

PS : que la collecte soit publique ou privée ne change rien, j’ai exactement le même avis sur la collecte privée.
Un détail tout de même, pour le moment dans le monde seuls les États oppressent leur population, les entreprises privées ne pensent encore qu’à faire du fric et c’est très bien, dès qu’elles s’occupent des aspects sociaux il y a danger….

Toute collecte qui dépasse l’objectif précis du service me pose problème dans les produits et services payants, ces données devraient être considérées comme privées et confidentielles. Pour les services dits « gratuits » l’étendue de la collecte et des informations sur la marchandisation des données devraient être accessibles à l’utilisateur.
De même, se désabonner, se desinscrire d’un service (et donc cesser la collecte) devrait être aussi facile s’inscrire. Voilà pour les précisions sur mon point de vue.

avatar byte_order | 

@MGA
> Un détail tout de même, pour le moment dans le monde seuls les États
> oppressent leur population

Mais oui, Fox News n'a nullement eu de rôle dans la division de la population américaine, ni aucun groupe privé ne fait de lobbying pour maintenir un besoin en prisons privés, en consommation d'armes à feu, ni à toujours plus réduire la couverture sociale de la population pour contraindre à souscrire une couverture privée. La presse britannique n'a eu aucun rôle dans la diffusion et le relais de mensonges des brexiters, non plus...

Non, tout est uniquement de la faute des états, le corps économique privé est totalement neutre, c'est bien connu...

> les entreprises privées ne pensent encore qu’à faire du fric et c’est très bien,
> dès qu’elles s’occupent des aspects sociaux il y a danger….

Et des multinationales dont les produits et services sont présent dans le quotidien de milliard de gens, c'est pas s'occuper d'aspect sociaux, en particulier en orientant la façon dont ces gens interagissent, sur quoi ils doivent s'informer (ou croient l'être...), sans oublier la mise sous tutelle des usages "acceptés" et la disparition dissimulée du droit de propriété (mais pas de l'acte d'achat, évidemment...) ?

> Pour les services dits « gratuits » l’étendue de la collecte et des informations sur
> la marchandisation des données devraient être accessibles à l’utilisateur.

C'est le cas. Cf ma réponse précédente. La RGPD de toute façon l'impose. Même quand c'est gratuit, juste dès qu'il y a une exploitation des données.

> De même, se désabonner, se desinscrire d’un service (et donc cesser la collecte)
> devrait être aussi facile s’inscrire.

Ici, y'a pas d'inscription. Vous installez et lancez l'app, vous désinstallez l'app.
Rien de plus simple.

C'est déjà moins simple de trouver comment se "désinscrire" de collaborer au réseau des AirTags, par exemple.

avatar wanarmand83 | 

@byte_order

Brillant et clair. Argumenté en plus. Merci, j’ai appris des choses et me suis régalé. 👍👌

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