Spotify veut des exclusivités, Universal n’en veut plus

Mickaël Bazoge |

Les accords qui lient Spotify aux trois majors de l’industrie du disque sont terminés. C’est le cas depuis un an avec Universal, et depuis quelques mois pour Sony et Warner. Pas de panique, pendant les négociations, les catalogues de ces maisons de disques restent disponibles sur le service de streaming ; les accords de diffusion sont simplement prolongés de mois en mois, explique MBW.

Mais c’est l’occasion pour les majors — agacées par la récente offre « famille » de Spotify alors que les contrats sont échus — de renégocier les termes de leurs partenariats avec le numéro 1 du streaming. Ça coince en effet dans les coulisses. Spotify avait obtenu, pour son lancement, des conditions plus avantageuses que ses concurrents qui se sont lancés plus tard. Le défunt Rdio reversait ainsi 60% aux maisons de disques (sans compter les éditeurs), alors que Spotify jouissait d’un taux de 55%.

Pour donner un ordre d’idée, Apple verse à ces mêmes labels 58% des abonnements Apple Music, et entre 13,5% et 15% aux éditeurs, ce qui est là aussi plus élevé que Spotify qui verse à l’industrie de la musique 70% de ses revenus. Les majors aimeraient bien que Spotify aille au même niveau qu’Apple Music, soit 58%… Problème : le service anglo-suédois voudrait payer moins. Un taux de 50% serait sur la table, même si on dément du côté de Spotify.

L’entreprise traîne une mauvaise réputation chez les artistes : malgré des milliards d’écoutes, elle ne leur verserait pas grand chose. Et cela n’ira pas en s’arrangeant si le taux devait baisser encore. Mais Spotify a plusieurs atouts dans sa manche : d’une part, les 58% d’Apple Music s’entendent après les trois mois d’écoute gratuite. D’autre part, Spotify aimerait à son tour obtenir quelques exclusivités.

Le service se tient pour le moment à l’écart de la guéguerre des exclusivités que se livrent Apple Music et Tidal ; mais les dirigeants de Spotify vivraient mal de ne proposer les dernières galettes de Kanye West ou Frank Ocean qu’après plusieurs semaines. Le deal qu’ils proposeraient serait le suivant : un taux moins élevé, mais plus d’argent pour des exclusivités. Les majors gagneraient donc d’un côté ce qu’elles perdraient de l’autre…

De plus, l’industrie du disque n’a pas intérêt à voir Spotify péricliter. Le service compte en effet plus de 30 millions d’abonnés payants, et il représente toujours la meilleure solution contre le piratage.

Universal fâché contre les exclusivités

Si les exclusivités accordées par les majors aux services de streaming sont un moyen comme un autre de mettre du beurre dans les épinards, elles ne font pas non plus le bonheur de tout le monde. Frank Ocean a ainsi boudé sa maison de disques, Universal, pour le lancement de Blonde, son nouvel album très attendu. Celui-ci est en écoute sur Apple Music pour les deux prochaines semaines en exclusivité.

C’est le propre label de l’artiste, Boys Don’t Cry, qui a lancé cet album. Et il ne serait affilié ni à Def Jam (Island), la précédente maison du chanteur, ni à Universal Music Group. Le lancement en fanfare de Blonde a provoqué la colère de Lucian Grainge, le CEO d’Universal. Dans un e-mail furibard, il écrit que les exclusivités sont désormais du passé, raconte Forbes ! Drake, en exclusivité chez Apple Music, et Kanye West (chez Tidal) signent chez la major…

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