ebooks : Apple, Penguin et Macmillan retoquent l'enquête du Département de la Justice

Florian Innocente |

Macmillan, Penguin et Apple ont chacun contesté les allégations du Département de la Justice américaine (DoJ), qui enquête sur une supposée collusion entre Apple et des maisons d'édition pour fixer les prix des livres électroniques. Contrairement à quatre de leurs pairs, ces deux éditeurs ont jusqu'à présent refusé de signer un accord à l'amiable avec le DoJ.

Penguin, dans sa réponse [PDF], explique que le principe du modèle d'agence (où le prix de vente aux lecteurs est fixé par l'éditeur et non par le distributeur) a été proposé par Apple, et c'était à prendre ou à laisser.

En somme, il n'y a pas eu de conspiration entre les grands éditeurs pour imposer ce modèle. Penguin rejette aussi l'interprétation faite par le DoJ des conversations et rencontres conduites entre ces éditeurs (les appels téléphoniques entre eux ont par exemple été répertoriés par les enquêteurs). Ces discussions auraient eu en fait pour objet la création de plateformes communes de vente de livres électroniques : Anobii et Bookish.

Une autre rencontre remarquée par le DoJ avait pour ordre du jour, poursuit Penguin, de fêter la désignation du nouveau PDG de l'éditeur Random House. Macmilan donne la même explication et souligne dans sa propre déclaration que Random House est présenté comme n'ayant pas participé à cette supposée conspiration. En clair, sa présence à cette réunion n'avait donc pas de sens si des discussions pour organiser une entente illégale étaient au menu (lire iBookstore : retour sur la plainte contre Apple et des éditeurs sur les relations entre les éditeurs et les pressions exercées sur Random House).

Penguin estime ensuite que l'adoption du modèle d'agence n'a pas stoppé la concurrence sur les prix, mais qu'elle s'est simplement déplacée du détaillant vers l'éditeur. Parmi les autres changements amenés, Penguin parle d'une dynamique plus importante sur ces tarifs, avec pour certains livres des prix plus bas ; d'un plus grand choix de supports électroniques de lecture et d'une richesse accrue dans les contenus. Est cité à ce titre l'apport technique de l'iPad pour réaliser des livres plus sophistiqués. Penguin cite par exemple son ouvrage Winnie l'ourson, livré avec iBooks sur l'iPad, et dont le traitement couleur et animé était impossible à faire sur le Kindle d'Amazon.

Macmillan

Le second éditeur, Macmillan, rejette aussi les accusations et pose un oeil sévère sur les observations du DoJ [PDF]. L'éditeur déclare que le « manque de preuves directes de cette conspiration dans la plainte du gouvernement est révélateur ». Une enquête qui manquerait de charpente et qui enchaîne « insinuation sur insinuation, qui déforme les faits et suggère des actions qui n'ont pas eu lieu. »

À propos de la réunion des éditeurs déjà citée et où fut évoquée apparemment la future plateforme Bookish, Macmillan observe que ce joint venture n'est jamais mentionné par le DoJ. Et d'y voir la preuve que son principe n'est pas contesté, et que la réunion en question était donc légitime. Enfin, Macmillan aussi revient sur la proposition d'Apple - à prendre ou à laisser - concernant l'adoption du modèle d'agence. Pour affirmer que le patron de l'éditeur, John Sargent, a donné son accord de manière strictement unilatérale.

Apple

Un peu plus tôt dans la semaine, c'est Apple qui avait donné sa réponse au DoJ [pdf]. Le fabricant jugeait sans ménagements les conclusions du gouvernement, les qualifiant : « d'absurdes », de « fondamentalement erronées », estimant que les enquêteurs ont ignoré certains éléments allant à l'encontre de leurs certitudes et de les accuser de se ranger aux côtés d'un monopole plutôt que de défendre la concurrence.

« Le gouvernement part d'un principe erroné selon lequel le "marché" des eBooks se caractérisait avant l'arrivée d'Apple par une "concurrence robuste sur les prix". C'est ignorer un fait simple et incontestable : avant 2010, il n'y avait pas de véritable concurrence, il n'y avait qu'Amazon.

À cette époque, lorsqu'Apple est entrée sur le marché, Amazon vendait environ 9 livres électroniques sur 10 et son influence sur les prix et la sélection des produits était quasi absolue. L'arrivée d'Apple a entrainé une considérable croissance dans le choix et la variété de l'offre en livres numériques, dans les ventes et elle a amélioré la qualité de lecture des ebooks.

C'est la preuve d'un marché dynamique et concurrentiel. Ces faits gênants sont ignorés dans la plainte. Au lieu de cela, le gouvernement met l'accent sur l'augmentation des prix pour une poignée de titres. La plainte ne dit aucunement que tous les livres numériques, ou même la plupart, ont augmenté après l'entrée d'Apple sur le marché. »

Amazon est à nouveau cité dans un autre passage « Sans l'entrée d'Apple, la distribution d'ebook serait essentiellement sous le contrôle d'un seul distributeur (Amazon), qui possèderait alors un pouvoir quasi illimité sur ce domaine. Apple a offert à tous les éditeurs, grands ou petits, les mêmes possibilités de l'utiliser comme agent pour vendre des livres électroniques directement aux consommateurs, par le biais de l'iBookstore et selon des conditions non discriminatoires. »

[via PaidContent]

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