iTunes Match : une privatisation de la licence globale ?

Christophe Laporte |

Apple avec iTunes Match, puis plus récemment RIM avec BBM Music (lire : RIM : Android pour les smartphones QNX et BBM Music), sont-ils en train de changer la donne en ce qui concerne la musique en ligne ? C’est la question posée par l’Adami (l’administration des Droits des Artistes et Musiciens Interprètes) aux majors dans une lettre ouverte [format PDF]. La société de gestion collective voit dans iTunes Match un outil de “blanchiment” de titres illégaux et dans BBM Music, un service de peer-to-peer légalisé.

Rappelons que le premier permet d’avoir dans le nuage toutes les musiques stockées sur votre ordinateur, alors que le second offre la possibilité de partager des morceaux avec ses contacts.

Loin de s’opposer à ces nouveaux services, elle affirme dans son communiqué craindre “en revanche à travers ces accords une nouvelle étape vers une licence globale privée aux seules mains des producteurs phonographiques”. L’Adami milite pour de nouveaux mécanismes de répartition adaptés à l’Internet avec notamment une gestion collective des droits musicaux sur le net. Elle rappelle que cette proposition a été soutenue par le Président de la République, mais refusée dernièrement par les producteurs phonographiques.

Dans sa lettre ouverte, l’Adami demande entre autres aux majors si elles vont y souscrire en France et si de leur part, cela représente un changement significatif de stratégie.

Voici la lettre :
Monsieur le Président directeur général,

Les géants nord-américains Apple et BlackBerry ont ces dernières semaines lancé leur nouveau service de musique en ligne. ITunes Match pour l’un et BBM-Music pour l’autre.

Ces applications viennent une fois de plus bousculer notre approche de la musique à l’ère du numérique et obligent toute la filière à s’adapter.

iTunes Match permet à quiconque de bénéficier sur son espace iCloud d’un fichier musical iTunes à partir d’un fichier mp3 présent sur son disque dur. Un fichier « rippé » téléchargé de manière illicite peut ainsi devenir licite. BBM-Music quant à lui légalise les échanges peer to peer entre abonnés au service.

Au passage, c’est la confirmation, comme nous l’avons exprimé à plusieurs reprises, que l’achat à l’acte tend incontestablement à disparaitre.

Ces services, payants, ont fait l’objet d’un accord avec la Major que vous représentez en France. Une part conséquente de chaque abonnement sera ainsi reversée à votre société.

Ces innovations, qui concernent en premier lieu les artistes que nous servons tous, entraînent un certain nombre de questions :

- Sur quelle base s’appuie cet accord ? Comptez-vous, pour la France, y souscrire ?
- Ces abonnements annuels correspondent-ils à un changement de stratégie de votre part : marchandisation des échanges illégaux contre répression des utilisateurs des services de peer to peer telle que vous l’avez toujours défendue jusqu’ici à travers Hadopi ?
- Sur cet abonnement quelle sera la part nette moyenne reversée aux artistes ?:
- Le droit exclusif, sous sa forme contractuelle, et selon la répartition actuelle entre artiste et producteur, est-il encore adapté à la disparition progressive de l’achat à l’acte et à la généralisation des forfaits ?

Dans l’attente de votre réponse, je vous prie de bien vouloir agréer Monsieur le Président Directeur Général l’expression de mes salutations les plus amicales.

[Via : Pcinpact]

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