La fin du roaming : un danger pour les opérateurs ?

Christophe Laporte |

Bruxelles souhaite en finir au plus vite avec les frais d'itinérance facturés lorsque l’on est à l’étranger (lire : Roaming : les prix ont baissé de 90 % en 6 ans). Cette envie n’est pas partagée par tout le monde. Outre les opérateurs, l’Arcep n’est pas très chaud sur ce dossier. Explications.

À plusieurs reprises, Stéphane Richard a fait part de sa réserve concernant cette mesure. Pour lui, cela reviendrait “à faire subventionner les touristes allemands, néerlandais ou anglais, nombreux à migrer vers le sud pour leurs vacances, par les Grecs, les Italiens ou les Espagnols” et aboutirait à “un transfert de plusieurs milliards d'euros”. Il a affirmé à La Tribune que cette disposition serait “consumériste” et “dangereuse”.

Alors si l’on pourra toujours accuser Stéphane Richard “de défendre son bout de gras”, la réaction de l’Arcep, qui justement comme le souligne La Tribune, a souvent été accusée d’être consumériste, pousse à réfléchir.

Le président de l'Arcep, Jean-Ludovic Silicani, se garde de toute attaque, mais a déclaré dans le cadre des Assises du très haut débit la semaine dernière que “certains outils pourraient avoir l'effet inverse de celui recherché “ à savoir créer un marché unique européen des télécoms.

Son directeur général, Benoît Loutrel, est beaucoup plus clair : “si on décrétait l'abolition du roaming, on aurait immédiatement 300 opérateurs en concurrence frontale. Il y aurait beaucoup de morts. […] Lorsque vous achetez un abonnement mobile, vous achetez une couverture. En France, elle est très vaste et de bonne qualité, car on a imposé des contraintes politiques fortes dans les licences. Si vous mélangez des opérateurs de pays aux contraintes différentes, ça ne va pas fonctionner”. Il évoque un scénario dans lequel le consommateur aurait alors tout intérêt à souscrire un forfait dans un petit pays qui n’aurait pas les mêmes obligations de déploiement d’un opérateur français. Et de pronostiquer une baisse des prix qui tendront vers zéro.

Ce point de vue est également partagé par un opérateur parlant sous le couvert de l’anonymat. Le roaming gratuit reviendrait au système d’itinérance qui a été mis en place pour Free, à la différence que le nouvel entrant met bel et bien la main à la poche pour utiliser le réseau de son partenaire.

Si Bruxelles souhaite abolir le roaming au plus vite, ce n’est pas le cas de tout le monde. Outre les opérateurs, le gouvernement a fait savoir qu’il n’était pas favorable à cette proposition et le ferait savoir lors du Conseil des ministres européens des télécoms qui aura lieu fin octobre.

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image : poorlight

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