Tony Fadell dresse un parallèle entre Apple et Google

Florian Innocente |

« Nest n’est pas à vendre » a assuré Marwan Fawaz, son nouveau patron venu remplacer Tony Fadell. Dans un mail envoyé aujourd’hui à ses équipes et obtenu par The Verge, le patron explique qu’il s’agit de se concentrer sur la roadmap en cours et de préparer le lancement déjà programmé d’un nouveau produit (son nom est intentionnellement masqué dans la missive, on sait que Nest avait notamment une caméra de surveillance extérieure sous le coude).

Marwan Fawaz

J’ai mentionné vendredi que mes compétences et passions sont de faire grandir de belles entreprises — et produits — pour toucher davantage de clients. C’est à cela que j’aime me consacrer et que j’entends réussir. Ma seule ambition pour Nest est de la développer et la faire grandir avec des produits innovants. Nest n’est pas à vendre, et l’innovation et la croissance ne s’excluent pas mutuellement.

La question de l’avenir de Nest au sein d’Alphabet pouvait légitimement se poser après l’annonce par Fadell de sa volonté de prendre le large (il dit avoir soupesé cette décision à l’automne dernier et s’en être ouvert à Larry Page en décembre). On peut citer aussi l’exemple de Home, le futur petit assistant pour la maison, qui a été conçu par Google alors même que les gadgets pour la maison sont une spécialité de Nest.

Google Home, supervisé par le responsable du développement du Chromecast

Depuis son acquisition en janvier 2014 pour 3,2 milliards de dollars, Nest n’a pas su véritablement transformer l’essai malgré le soutien financier plein et entier de Google.

Ses deux principaux produits — le thermostat et le détecteur de monoxyde de carbone — existaient avant cette opération. Ils n’ont pas connu de refonte majeure sinon une mise à jour matérielle, accompagnée par quelques révisions logicielles. Quant à la Nest Cam il ne s’agissait que d’une version légèrement modifiée de la Dropcam achetée environ 550 millions de dollars.

Google n’a pas été souvent heureuse en mariage lorsqu’il s’agissait de produits autres que le logiciel et les services. Il y a eu les téléphones de Motorola Mobility achetés en aout 2011 et revendus en janvier 2014 à Lenovo sans qu’ils aient ébranlé la domination des fabricants asiatiques pendant l’intervalle. Ou encore la vente en cours — peut-être à Toyota - de ses deux sociétés spécialisées en robotique (Boston Dynamics et le japonais Shaft).

Dans les interviews qui ont suivi son départ, Fadell a défendu son bilan, sans contester que sa manière de diriger pouvait être parfois rugueuse, expliquant qu’il est « difficile de faire une omelette sans casser d’œuf ». D’anciens cadres de Nest s’en sont ouvert ces dernières semaines avec des propos parfois remplis d’acrimonie (lire Nest : la température monte autour de Tony Fadell).

Plusieurs témoins ont parlé aussi d’une pression comptable qui s’est abattue sur les épaules de Fadell sitôt que Nest a été intégrée au sein d’Alphabet — aux côtés de Google — avec l’obligation de produire des résultats financiers plus consistants pour une société passée de 300 employés à 1 200 aujourd’hui. Surtout en regard du coût de son acquisition.

Dans ces entretiens, Fadell répond à une question sur ses relations avec les fondateurs de Google. Il parle d’un profond respect et c’est l’occasion pour lui de dresser un parallèle entre son expérience chez Apple et chez Google :

J’ai beaucoup appris de Larry (Page, ndlr), et beaucoup de gens qu’ils ont embauchés (avec Brin) sont tout simplement parmi les meilleurs. Pour moi, cela contraste vraiment avec Steve (Jobs), parce que j’ai beaucoup appris de Steve sur l’expérience utilisateur, le marketing et la conception de produits. Avec Larry en particulier, il s’agissait de regarder bien au-delà de l’horizon. Ils peuvent se projeter très loin et voir ce que les autres ne voient pas encore et essayer de faire venir ces choses à eux. C’est quelque chose qui n’existe pas à Cupertino, au vu de mon expérience là-bas. Pour moi, ce fut une révélation.

Fadell explique qu’il va maintenant vaquer à d’autres aventures technologiques et investissements. Depuis quelques années il a dépensé une partie de son argent, le plus souvent très discrètement et sans faire de publicité, dans quelques 100 petites entreprises. Comme Phononic, inventeur d’un nouveau type de compresseurs ultra plat et économique pour les frigos.

Cette autre casquette lui a valu un clin d’œil de son compère Xavier Niel sur Twitter, après l’annonce de son départ de Nest. Les deux hommes se connaissent bien et partagent ce même intérêt pour l’investissement tous azimuts et à marche forcée dans les jeunes pousses. Fadell a apporté un soutien public au lancement de l’école 42 de Niel aux États-Unis et le patron de Free avait, dit-on, placé quelques billes à titre personnel dans Nest avant son achat par Google.

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