L’accord Apple-IBM n’augmentera pas les ventes… mais est-ce seulement son objectif ?

Anthony Nelzin-Santos |

Gene Munster ne s’attend pas « à ce que le partenariat avec IBM ait un impact sur les finances d’Apple », notant que « les grandes entreprises utilisent déjà des iPhone. » « Nous pensons qu’IBM proposera de nouvelles fonctions à ses clients en entreprise », poursuit l’analyste de Pipper Jaffray, « mais cela ne suffira pas à convaincre une grande entreprise d’utiliser iOS. » Il faudrait savoir (mais on en demande peut-être beaucoup) : les grandes entreprises utilisent-elles ou n’utilisent-elles pas iOS ? Voilà qui n’aide certainement pas à comprendre les conséquences éventuelles de l’annonce surprise de ce partenariat entre Apple et IBM.

Ginni Rometty (CEO d'IBM) et Tim Cook. Image Apple.

Les grandes entreprises n’ont pas besoin d’être convaincues d’utiliser iOS — 490 des 500 plus grandes entreprises américaines et 460 des 500 plus grandes entreprises du monde le font déjà. Ou plutôt, leurs salariés le font déjà : Apple est entrée dans les entreprises par le bas, un mouvement auquel les DSI ont dû s’adapter dès lors que les dirigeants eux-mêmes ont abandonné leurs BlackBerry de fonction pour leur iPhone personnels. Ou plutôt (bis), les salariés de certains de leurs services le font déjà : le DG ou le marketing n’ont aucun mal à mettre leur boîte Exchange sur leur iPhone, mais l’ingénierie, la comptabilité et les autres ont besoin d’applications spécifiques qui n’existent pas forcément sur iOS.

Dans ce sens, l’accord avec IBM peut consolider la place d’Apple dans ces entreprises. Big Blue va ainsi développer une centaine d’applications iOS liées à ses services d’analyse de données ou de gestion de flotte, et fournir ses propres solutions de stockage en ligne et de sécurisation. Apple va quant à elle décliner sa garantie AppleCare dans une édition spécifique avec intervention garantie sur site. Est-ce que cela suffit à changer la donne ? Sans doute pas, mais cela fait des raisons de moins de repousser le BYOD et des raisons de plus d’adopter l’iPhone et l’iPad ou de renforcer le parc existant.

Par ailleurs, les multinationales ne sont pas les seules cibles de cet accord : les 100 000 consultants IBM qui vont participer à l’initiative MobileFirst interviennent aussi dans des PME. Des entreprises plus modestes qui n’ont pas forcément les moyens de maintenir une DSI permanente, et se reposent souvent sur des solutions externes. Dont celles d’IBM, qui peut désormais proposer un « pack » complet intégrant des iPhone, des iPad, des services et des applications. Sont ainsi visés les secteurs de la distribution, de la santé, de la finance, du tourisme et du transport — qui sont des places fortes d’IBM qu’Apple n’a que très modestement investi pour le moment.

Cette politique n’aura sans doute pas un impact phénoménal sur les finances d’Apple, certes. Mais qui dit renforcement de la présence d’iOS en entreprise peut vouloir dire renforcement de la présence d’iOS en dehors de l’entreprise. Apple avait dû s’investir dans le monde de l’éducation pour y imposer le Mac et « former » certains utilisateurs dès le biberon, elle laisse cette fois un spécialiste faire. Elle a tout à y gagner et peut continuer à concentrer toute son attention sur ses produits — qui, eux, auront un impact phénoménal sur ses finances.

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