iPad et Hachette : les libraires en colère

Anthony Nelzin-Santos |

Le Syndicat de la librairie française n'apprécie pas l'iBookstore, et encore moins que Hachette puisse être un partenaire privilégié d'Apple, partenariat « vécu comme le signe d’un profond mépris » par les 470 signataires d'un appel resté relativement discret. Et seul partenariat d'Hachette avec une société américaine (lire : iBookstore : Hachette Livre a signé avec Apple ).

ActuaLitté cite ainsi un signataire qui estime que Hachette favorise une concurrence jugée déloyale : le modèle du contrat d'agent utilisé par Apple fait grincer des dents parce qu'il s'opposerait à « la nécessaire maîtrise de la fixation du prix de vente au public par l’éditeur » et présenterait des « risque[s] de domination du marché, voire de quasi-monopole ».

Hachette jouerait donc le jeu de la « marginalisation de la librairie française » en se pliant aux conditions d'Apple. Plus qu'un combat des représentants de la culture française face aux intérêts financiers américains, antienne trop souvent entendue, c'est Hachette qui est pris pour cible : « depuis plusieurs années, ce groupe pratique une obstruction récurrente sur les sujets d’intérêt commun entre l’édition et la librairie, ne participe pas à des actions collectives en faveur du développement des librairies et maintient une très large part des librairies dans des conditions de rémunération inadaptées au regard des obligations qui lui sont conférées par la loi de 1981 ».

On n'entend ainsi aucune critique à l'encontre d'Albin Michel, pourtant éditeur du livre de Catherine Pancol, Les écureuils de Central Park sont tristes le lundi, qui s'affichait en pleine page sur les publicités pour l'iPad. Cet ouvrage est d'ailleurs un bon exemple pour l'argument développé par certains membres du SLF opposés à cet appel : « Les éditeurs ont besoin de créer de nouveaux points de vente, mais ne veulent pas pour autant éliminer la librairie, c'est ridicule. Où et comment se fera la valorisation de leurs livres ? Uniquement sur l'iBookstore ? C'est n'importe quoi. Sans se bercer d'illusions, c'est en librairie que la vie des livres se fait ». Le livre de Catherine Pancol a d'abord été un succès de librairie avant d'être disponible sur l'iPad.

Le futur portail 1001libraires.com, permettant d'allier shopping en ligne et contact avec le commerçant local, ferait d'une pierre deux coups, en quelque sorte. Il faut pourtant savoir raison garder : la librairie est un endroit incontournable pour la promotion d'un livre, et l'iBookstore n'est en aucun cas un concurrent, mais plutôt un complément qui s'adresse aussi à une clientèle nouvelle. Les chiffres de ventes restent pour le moment modestes en France : il y a quelques mois, Eyrolles indiquait avoir vendu « quelques centaines » de copies lors de la quinzaine de lancement de l'iPad en France (lire : Interview : Eyrolles, l'iPad et l'avenir des eBook).

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