En Chine, une fraude à l’iPhone qui coûte des milliards de dollars à Apple

Mickaël Bazoge |

Le site The Information rapporte une fraude de grande envergure qui touche Apple en Chine depuis au moins 2013, et pour laquelle le constructeur a dilapidé des milliards de dollars. Des gangs de malandrins chinois achetaient ou volaient des iPhone, ils en retiraient des composants (écrans, cartes-mères, processeurs…), les remplaçaient par des copies, puis allaient frapper à la porte des Apple Store pour les faire réparer.

Résultat : les forbans récupéraient des smartphones neufs pour une fraction de leur prix, qu’ils pouvaient ensuite revendre à profit. Et en bonus, la revente des composants ! En mai 2013, la boutique de Shenzhen enregistrait plus de 2 000 demandes de réparation par semaine. Du jamais vu.

Le premier Apple Store de Hangzhou ouvert en janvier 2015.

En 2013, la Pomme a commencé à relever le nombre d’iPhone dont l’identifiant Apple changeait après une réparation. Un moyen plutôt efficace de mesurer la fraude, car après tout un utilisateur d’iPhone qui va faire réparer son smartphone va conserver son identifiant dans la majorité des cas. Selon ce décompte, plus de 60% (!) des réparations effectuées en Chine étaient frauduleuses… On était loin de l’estimation de 10% et moins des dirigeants du constructeur à l’époque.

Au début de l’année fiscale 2013, Apple avait prévu une enveloppe de 1,6 milliard de dollars pour couvrir les coûts liés aux réparations de ses appareils. Ces frais se sont finalement portés à 3,7 milliards de dollars, avec le gros du budget parti en Chine.

Après la découverte de cette fraude massive, Apple a commencé à prendre les devants. Le constructeur a mis en place un système de réservation qui nécessitait une preuve d’achat de l’iPhone. En squattant littéralement toutes les places disponibles, les hackers ont noyé le système.

Des outils diagnostic ont également été développés pour aider les employés des Apple Store à détecter les composants bidons sans avoir à démonter l’appareil. Les pendards ont trouvé une solution simple : trafiquer l’iPhone de telle manière qu’il ne puisse plus s’allumer.

Plus élaboré encore, certains fraudeurs récupéraient des numéros de série d’iPhone vendus en Chine et appartenant à des utilisateurs légitimes, puis avec l’aide de cette information ils demandaient une réparation auprès d’Apple. Ils allaient jusqu’à modifier la gravure du numéro de série au dos du smartphone.

Finalement, Apple a arrêté de réaliser des remplacements d’iPhone dans ses boutiques. Les appareils doivent être envoyés dans un centre de réparation pour y être inspectés, en partenariat avec Pegatron afin de tester les terminaux douteux. Il a fallu construire quatre centres supplémentaires pour faire face à l’afflux d’iPhone.

Apple a aussi mis en place des mesures de sécurité à l’intérieur même de l’iPhone, par exemple en recouvrant le processeur d’un enduit étanche visible uniquement dans certaines conditions. Au bout de cinq années de ce jeu du chat et de la souris, la fraude ne représenterait plus que 20% des demandes de réparation en Chine (de 5 à 10% aux États-Unis).

En 2017, les dépenses en matière de réparation ont baissé pour la première fois en dix ans, passant de 4,66 milliards de dollars à 4,32 milliards. Mais la chasse à la fraude à grande échelle ne se limite plus à la Chine : selon l’article, les bandits sont maintenant à l’œuvre en Turquie et aux Émirats Arabes unis…

Mise à jour — Une source nous confirme qu’un appareil qui présente un numéro de série chinois est systématiquement envoyé au dépôt lors d’une demande de réparation, partout dans le monde.

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