La Commission européenne va maintenant étudier le nouveau plan DMA d'Apple

Florian Innocente |

Maintenant qu'Apple a dévoilé son plan pour se conformer au DMA, ses conditions vont pouvoir être appréciées par la Commission européenne grâce aux commentaires des éditeurs. D'ores et déjà de vives critiques ont été émises.

Interrogé par Reuters, Thierry Breton prévient que si « Les solutions proposées ne sont pas suffisamment bonnes » alors « [nous] n'hésiterons pas à réagir avec force ». D'ici au 7 mars, ajoute le Commissaire européen au marché intérieur, la Commission va évaluer les propositions des entreprises soumises à la nouvelle législation sur les marchés numériques et écouter les doléances des éditeurs concernés par les changements, notamment ceux proposés par Apple.

Ouverture de l’iPhone en Europe : Apple dévoile sous la contrainte un plan historique

Apple a annoncé hier de profonds changements pour autoriser les développeurs à proposer leurs apps en dehors de l'App Store. La plume ayant servi à rédiger le communiqué semble avoir été trempée dans le vinaigre tant le propos et les explications transpirent l'agacement de la firme de Cupertino. En face, certains éditeurs ont trempé la leur dans l'acide au vu de ce qui a été mis sur la table.

Un thème revient, celui qu'Apple tente de reprendre d'un côté ce qu'elle est contrainte de lâcher de l'autre. Un exemple mis en exergue est la nouvelle taxe dite « Core Technology Fee » (ou Commission technologique de base). Un éditeur qui espérait ne plus avoir à payer de commission à Apple en est pour ses frais. Du moins si son app est très populaire.

Cette taxe s'applique aux apps qui sont distribuées soit uniquement en dehors de l'App Store soit en combinaison avec celui-ci. Apple observe l'activité d'une app sur une période de 12 mois. En dessous d'un seuil d'un million d'installations, Apple ne perçoit rien. Si l'app franchit cette marque, chaque installation supplémentaire (hors mises à jour et réinstallations, après un effacement ou un changement de téléphone) est facturée 0,5 € à l'éditeur. Et ce compteur des installations est remis à zéro à l'échéance des 12 mois.

Durant cette période de 12 mois, si vous réinstallez l'app ou la mettez à jour, ça n'est pas compté. Mais lorsqu'un nouveau cycle de 12 mois commence, une mise à jour de l'app ou une réinstallation après une suppression comptera comme une installation annuelle. Et puis il y a la catégorie des "apps marketplace", c'est à dire des apps qui sont des boutiques d'apps. Dans leur cas, ces concurrents de l'App Store seront soumis au Core Technology Fee dès la première installation, il n'y pas de seuil de 1 million. Pour Apple, ces prélèvements sont justifiés par ses investissements dans le développement d'iOS, de ses outils de développement, etc. Au passage, Apple se garde ainsi le droit de surveiller les téléchargements d'apps qui ne passent plus par son store.

Le mécanisme du Core Technology Fee. Source : Apple.

Une app à la diffusion relativement confidentielle ne sera pas gênée par ce mode de calcul, mais il y a d'autres cas de figure. Un grand éditeur — citons au hasard Spotify — pour qui atteindre un million d'installations est une broutille — devra toujours reverser un écot à Apple, même si son app est gratuite et proposée uniquement en dehors de l'Apple Store.

La calculatrice d'Apple montre que sur une période de 12 mois pendant laquelle 1,5 million d'installations uniques auront été faites (seuls les derniers 500 000 derniers seront donc pris en compte), Spotify devra payer annuellement à Apple pas moins de 250 000 €. Il n'y a pas de plafond — plus ça installe, plus la note grimpe — et cette opération comptable recommence tous les 12 mois.

Même désillusion pour un éditeur indépendant dont l'app rencontrerait un succès faramineux mais qui aurait décidé de la proposer gratuitement. La distribuer en dehors de l'App Store ne l'empêchera aucunement d'être redevable financièrement à Apple. Cette nouvelle condition sera sans nul doute au cœur des échanges entre des éditeurs et la Commission européenne…

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