Free Mobile : réseau allumé et contre-attaque d'Orange

Florian Innocente |

Le réseau de Free Mobile est quasi intégralement allumé depuis le 2 mars, à hauteur de 97%, écrit Challenges d'après ses sources. Les deux grosses pannes qu'ont connues les abonnés ces trois derniers jours seraient peut-être liées (ou pour partie) à cette montée en charge du réseau propre de l'opérateur.

Une source chez Orange ne confirme pas l'information, mais livre cette hypothèse : «Free peut avoir allumé son réseau, mais rien ne garantit qu’il ne baisse pas la puissance de ses antennes pour que ce soient les nôtres qui continuent d’être sollicitées».

Orange fait assaut de déclarations aujourd'hui, répondant tous azimuts, tantôt à l'ARCEP, tantôt à ses concurrents. Mais il se justifie également auprès de ses employés et de ses représentants syndicaux, alors qu'il lui a été reproché d'avoir fait en quelque sorte un cadeau à la société de Xavier Niel (lire Free Mobile : deux syndicats contestent les résultats de l'ARCEP).

Dans un courrier interne daté du 1er mars, Pierre Louette, le Directeur Général Adjoint d'Orange, met sur le compte du pragmatisme la signature de cet accord. D'abord parce qu'obligation était faite aux opérateurs de trouver un accord avec Free, et ensuite «si [Orange] ne l'avait pas fait, l'un de nos concurrents l'aurait fait sans attendre». Consolation ensuite, cet accord se traduira d'ici 2015 par un versement de Free à Orange d'un montant supérieur au milliard d'euros : «cela va nous permettre de compenser l'impact de Free sur notre chiffre d'affaires.»

Enfin, Pierre Louette rappelle l'obligation qu'a Free de constituer progressivement son propre réseau et de moins dépendre d’Orange au fil du temps.

Ce matin, c'est Stéphane Richard, le PDG d'Orange qui a répondu dans une interview aux Échos sur les déclarations de l'ARCEP et de ses concurrents (lire Free Mobile: compte-rendu de l'audition de l'ARCEP & Free Mobile / Bouygues Telecom : le match continue).

Il répète que l'ajout de l'itinérance en 3G dans le contrat avec Free (seule la 2G était obligatoire) était inévitable, car elle va être à terme imposée par le gouvernement. France Telecom n'a fait qu'anticiper une échéance annoncée. Stéphane Richard s'étonne ensuite des critiques de ses concurrents sur l'opacité du contrat signé avec Free : «Sur le marché de gros, les contrats entre opérateurs, sociétés privées et cotées, ne sont pas publics. Seul le régulateur peut en obtenir communication. Pourquoi faudrait-il faire une exception du contrat entre Orange et le quatrième opérateur? Devrais-je dénoncer aussi l'opacité des contrats entre SFR et ses MVNO, comme pour celui avec La Poste, sur lequel nous étions aussi en lice ? Ce n'est pas sérieux.»

Les problèmes de réseau rencontrés ces 3 jours par Free lui ont donné du grain à moudre. Le PDG se dit surpris que le président de l'ARCEP ait fait la distinction entre couverture du réseau et qualité de service rendu. Ceci pour justifier que Free ait obtenu son feu vert, quand bien même la qualité offerte n’est pas toujours au rendez-vous. Stephane Richard ressort une ancienne déclaration de l'ARCEP, de 2009, pour les réseaux de 3G, et dans laquelle ces deux notions étaient liées.

Il se dit également «scandalisé» par les propos du président de l'ARCEP qui invitait les opérateurs à tirer les conséquences de l'entrée en lice de Free, par l'allègement de leurs coûts «Est-ce une invitation à procéder à des licenciements, au moment même où l'on cherche à sauver des emplois industriels partout sur le territoire ? Est-ce une incitation au partage d'infrastructures ? Ce serait quand même paradoxal, au moment où tout a été fait pour l'émergence d'un nouveau réseau…»

Le PDG réfute les critiques sur le prix du mobile en France, rappelant encore une fois une enquête du régulateur britannique qui plaçait la France en seconde place des pays européens les plus compétitifs sur les tarifs des forfaits mobiles. L'ancien directeur de cabinet de deux ministres de l'Economie entre 2007 et 2009 fustige dès lors «une idéologie qui fait de la concurrence le seul objectif des politiques publiques et qui a déjà considérablement affaibli les opérateurs européens, comme en témoigne l'effondrement de leurs valeurs boursières depuis plusieurs années. Maintenant, chacun réalise que cela va faire des dégâts.»

Enfin, il confirme que l'accord d'itinérance avec Free est rediscuté avec un montant supérieur au milliard d'euros estimé auparavant et qu'il est encore trop tôt pour parler de l'itinérance en 4G.

Derniers détails, les quatre principaux opérateurs vont se retrouver demain à Bercy pour signer un accord de gestion commune du réseau 2G/3G dans le Tunnel sous la Manche (les JO démarrent en juin à Londres). Et ce jeudi, il y a ce rendez-vous très attendu : la présentation des résultats financiers d'Iliad où l'on devrait enfin savoir combien de clients - actifs ou en attente d'activation - compte Free Mobile.

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