Free Mobile: compte-rendu de l'audition de l'ARCEP

Florian Innocente |

L'ARCEP a été auditionnée par des députés devant la Commission des affaires économiques de l'Assemblée Nationale. L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes avait été précédée peu avant par le PDG de Bouygues Télécom et ces dernières semaines par ceux de SFR et Orange (lire Free Mobile / Bouygues Telecom : le match continue).

Jean-Ludovic Silicani, le président de l'ARCEP, a d'emblée souhaité «pacifier le débat» mais il a tout de même envoyé quelques piques aux uns et aux autres et déploré le ballet des rumeurs entretenues par les opérateurs, les lettres du ministre Éric Besson envoyées par médias interposés ou les critiques adressées à ses services après le lancement de Free Mobile.

Il a rappelé le contexte de la naissance de Free Mobile, où le régulateur souhaitait davantage de concurrence dans un marché qui était occupé par un «oligopole, et ce n'est pas un gros mot». Jean-Ludovic Silicani a ensuite rappelé comment avait été évalué le réseau de Free, avec les fameux 27% à respecter. Le test est conduit avec un terminal sur le réseau propre du nouvel opérateur. Dans 95% des cas, une communication doit fonctionner pendant 1 minute, sans interruption, à tout moment pendant la journée (jusqu'à 21h), devant un bâtiment, de manière statique pour l'utilisateur (il peut se déplacer un peu en marchant). Tous les opérateurs mobiles ont été testés de la même manière depuis 10 ans a souligné le patron de l'Arcep.

Jean-Ludovic Silicani a fait un petit retour en arrière en rappelant que les conditions d'attribution de cette licence à Free avaient été attaquées il y a deux ans devant le Conseil d'État. Les opérateurs avaient ensuite retiré leurs plaintes et aucun n'avait demandé à revoir la manière dont cette couverture était calculée.

Il a aussi rappelé qu'Orange et SFR avaient en leur temps bénéficié de la mansuétude des autorités aux lancements de leurs réseaux, car à l'échéance prévue au départ : «Ils n'avaient construit aucune station, zéro, il n'y avait rien.» Deux ans supplémentaires ont été accordés. Pour Bouygues cela a pris 5 ans, avec dans l'intervalle des mises en demeure du régulateur : «Il est bon de rappeler cet historique alors que des balles sifflent autour des têtes». En résumé, les opérateurs qui ont précédé Free ont aussi connu des difficultés, alors que Free Mobile en l'espace de deux ans a su mettre en place un début de réseau répondant aux exigences qui lui ont été imposées.

Sitôt Free Mobile lancé, plusieurs rumeurs ont circulé, parfois alimentées par les opérateurs, sur la réalité de ce réseau «La polémique… le débat… ou, disons la discussion a commencé après le lancement de Free. Cette période a été un peu pénible pour tout le monde… ce ne sont pas des méthodes très correctes en République et en démocratie… mais en tant que président je suis armé pour cela

Une nouvelle vérification a été engagée et confiée à un prestataire, l'ARCEP n'ayant pas les moyens de la mener seule : «Sauf si l'on m'accorde 1 million d'euros de crédits…». Ce contrôle s'est fait avec une carte géolocalisée, utilisant les données de la Poste «les plus précises disponibles» pour connaître la densité de la population sur les lieux de mesures.

Jean-Ludovic Silicani a livré en primeur aux députés les conclusions de ce nouveau contrôle : «Free couvre toujours 28% de la population […] le nombre de stations allumées était de 735 au moment des tests, il est de 800 aujourd'hui, c'est un réseau en constante progression.» L'opérateur a éteint des antennes, notamment dans quelques grandes villes, mais en a ouvert ailleurs, établissant un solde positif. Free avait demandé avant son lancement 1700 autorisations de déploiement de stations, 950 ont été installées et sont en état de servir (elles comprennent ces 800 en opération).

«Par ailleurs, il a été constaté que le déploiement du réseau se poursuit, ce que confirment le nombre de demandes d'implantations d'antennes déposées à l'Agence nationale des fréquences (ANFR) et le nombre d'antennes déclarées en service auprès de cette agence» a plus tard précisé l'ARCEP dans un communiqué de presse.

Jean-Ludovic Silicani a tenu devant les députés à faire la distinction entre la couverture et la qualité de service rendu. C'est le taux de couverture qui est retenu pour l'attribution d'une licence. Il peut être ensuite de bonne ou de mauvaise qualité : «Le soir devant l'immeuble où j'habite, avec mon opérateur - que je ne citerai pas - je n'ai pas de 3G alors que c'est en plein centre de Paris. Est-ce qu'à partir de ce constat je vais engager une procédure contre lui ?» s'est interrogé le président en citant sa propre expérience d'utilisateur «La zone est couverte au sens réglementaire, mais pas dans le cadre de mon utilisation, demain dans ce cas on pourrait assigner tous les opérateurs…»

Quant au fonctionnement effectif des stations allumées, ce point a été vérifié par l'ANFR qui rendra les résultats de son enquête au Ministre de l'Industrie et de l'Économie numérique, Éric Besson, ce 29 février.

Jean-Ludovic Silicani a également insisté sur le fait que le contrat liant Orange à Free pour l'itinérance était d'ordre privé. Une référence au fait qu'Orange se plaignait de voir son réseau être obligé d'encaisser une charge imprévue d'abonnés de Free. «C'est à Orange et Free, au vu des conditions de leur contrat de voir si les termes convenus sont respectés et s'ils doivent être ou non rediscutés. L'ARCEP à ce jour n'a été saisie ni par les uns ni par les autres.». Des négociations sont en cours apparemment entre Orange et Free à propos de ce volume de consommation plus important, mais autant sur le plan économique il peut y avoir un problème pour Orange, autant sur le plan technique, Jean-Ludovic Silicani estime que le réseau d'Orange qui compte 30 millions d'abonnés, peut tenir devant les nouveaux abonnés Free (estimés entre 1,5 et 2 millions) pour assurer la partie itinérance.

Interrogé sur la menace sur l'emploi avec l'arrivée d'opérateurs low-cost, Jean-Ludovic Silicani a récusé cette interprétation, rappelant que 5 ans après la fin du monopole public, le secteur des télécoms avait gagné 400 000 emplois nets. «Ce n'est pas parce que l'industrie et les services coûtent moins cher qu'on est dans le low-cost. Le vrai low-cost c'est d'aller chercher dans les pays en voie de développement des forces de travail mal payées, mal protégées et qui produisent dans des conditions environnementales déplorables.»

Selon lui, l'arrivée de Free avec des prix plus bas et des marges abaissées devrait être perçue au contraire comme une «bonne nouvelle», surtout dans le contexte économique et la baisse du pouvoir d'achat actuels. «Les gains de production génèrent du pouvoir d'achat et de la demande, on ne peut pas mélanger le vrai low-cost qui est de l'abus de forces de travail et le fait d'améliorer l'outil de production en France. C'est aux politiques ensuite de savoir s'il faut un système pour protéger les services à l'intérieur de l'Europe» a poursuivi Jean-Ludovic Silicani sur le fait que Free Mobile disposait d'équipes de support client hors de France.

Une satisfaction néanmoins prudente «L'avenir dira si ce modèle économique est durable. On regardera si les engagements et obligations du dossier de candidature ont été remplis.» Une vérification sera conduite en juin. Dans son communiqué paru après cette audition, l'ARCEP écrit : «Comme le prévoit son autorisation, Free Mobile est désormais tenu d'atteindre par son réseau 3G une couverture de 75% de la population en janvier 2015 et de 90% en janvier 2018.» Actuellement Orange et SFR couvrent 98% de la population en 3G et un peu plus de 93% pour Bouygues.

L'audition peut être revue sur le site de l'Assemblée.

avatar Nkz | 
Bien ;-) on apprend pas mal de chose avec ce compte rendu, plutôt rassurantes pour Free.
avatar drkiriko | 
Je veux bien croire l'arcep, mais moi, du free je n'en capte pas un brin avec mon iPhone. Du Orange, SFR, Bouygues, c'est toujours le cas...
avatar hozuki | 
Tu es sûr que tu as lu le compte-rendu ? Orange : 98% SFR : 98 % Free : 27% C'est si dur à croire que l'on puisse se trouver à l'intérieur des 73% de la zone non-couverte ?
avatar privatejohns | 
Il faut être avec une SIM FREE pour voir l'itinérance lorsqu'on est pas sous une antenne FREE.
avatar tom92 | 
Free à été reglo à son lancement, son plan de développement est soutenu, espérons que ce soit une réussite. En tant qu'abonné à Free Mobile, forfait illimité, j'en suis très satisfait mis à part la batterie qui s'épuise plus rapidement que lorsque j'étais chez orange.
avatar farfff | 
Voila une declaration qui va fermer le clapet de certaines personnes de mauvaise foi. Maintenant, a free de se developper dans la qualite et le temps.
avatar degorsa8 | 
Oui c'est ce que je me disais : "Comment ça ? Il n'y a pas 367 commentaires pour dire que Free couvre mal etc que ci et cela ne vas pas et que les autres ceci-cela ?" Sont déjà tous partis cliquer comme des malades sur le site Free pour s'abonner ? :)))
avatar farfff | 
Bin vi! Les anti free ont tout a coup tous disparus... ;-) comme par enchantemant...
avatar Thymotep | 
Bravo Free... Ils s'en sortent mieux que les 3 à leur lancement
avatar hellonearth | 
Il y a en effet pas mal de leçons à prendre de M. Silicani: manifestement cet homme connaît son métier, a compris des éléments essentiels d'économie, et rappelle des points cruciaux dans la bataille qu'ont lancée nos chers 3 Gros, avec l'aide ici de certains zélotes. Deux ans de retard pour Orange et SFR? Je me demande bien ce que LaDindePlantureuse va bien pouvoir avoir à dire? Mais il est vrai que ça ose tout, c'est d'ailleurs à ça qu'on les reconnaît…
avatar cadou | 
Free a dit qu'ils avaient coupés des antennes en région parisienne mais cela relève de l'accord privée avec Orange. D'ailleurs ils ont du bien le faire comprendre au PDG d'Orange car en 2 semaines, il avait complètement retourné sa veste, laissant SFR seul aux aboits devant l'ARCEP. Moi j'ai le super réseau d'Orange débridé pour 15,99 par mois et le reste ba j'en ai rien à foutre :)
avatar privatejohns | 
Faire comme avec l'ADSL, essayer de s'aligner. J'ai bien dis essayer.
avatar dvd | 
Enfin une voix objective dans ce dossier, merci au président de l'Arcep.
avatar PierreBondurant | 
Je reviens d'un semestre en Suède et je peux vous dire que comparativement, c'est la douche froide pour les services français ! Orange, SFR et Bouygues nous la joue "vous vous rendez pas compte, on a un réseau de boutique à entretenir, on fait pas dans le low cost nous", mais très sincèrement, à Stockholm, j'en avais pour 200 SEK, soit 22€ par mois pour un forfait à la carte, tout illimité ou presque (quelque chose comme 5h d'appel, + illimités vers tous les numéros du même opérateur, sachant que la puce nous était donné directement par la fac, nous étions donc tous chez le même opérateur...), internet illimité, VOIP autorisée, HSPA+ (première fois que je voyais ce logo s'afficher son mon Nexus S à l'époque), qualité de réseau incroyable, débits dingues, à tel point que je pouvais utiliser Viber pour appeler vers la France dans le métro alors même que celui-ci est bien plus profond que le métro parisien, pas de restriction pour l'utilisation en hotspot (des amis qui n'avaient pas internet dans leur appartement l'utilisaient quotidiennement des heures par jour !)... Comparativement, à Paris, débits à peine "corrects", mais loin d'être mirobolant, inexistant dans le métro (comment se fait-il qu'entre Charles de Gaulle Etoile et Argentine il n'y ait jamais de réseau ?), et surtout un ping qui fait peur... Sans parler des innombrables coupures d'appels qui me semblent de plus en plus récurrentes depuis mon retour. Mais peut-être le contraste les fait apparaitre bien plus à mes yeux. Alors certes, Stockholm et Paris sont deux villes à la démographie bien différente, impliquant des montées en charge dans les infras qui sont difficilement comparables, mais quand même ! HSPA+ dans le métro quoi ! Ce long commentaire pour dire : Scandinavie, Japon, ces deux pays ne rencontrent pas ces problèmes absolument inadmissibles aujourd'hui. Sans rejoindre la position de Niel ("vous êtes des pigeons"), on est pas les pires, mais ces opérateurs devraient se la jouer un peu plus humble quand on voit avec quel brio ces régions du monde s'en sortent.
avatar AuGie | 
@Blockaworu : merci pour ce témoignage très intéressant. La qualité réel des reseaux est un sujet rarement évoqué que cela soit dans le mobile ou l'internet fixe.
avatar Bryan | 
merci pour ton avis très intéressant;) Je sais pas pour vous mais personnellement je trouve le réseau de plus en plus déplorable en France. Je sais pas vous mais au moment de la sortie du 3GS, j'avais un bien meilleur débit 3G à de nombreux endroits que maintenant.
avatar Khobs | 
Le problème du métro à Paris est la RATP. Ils ont il y a des années aprés bcp de discussions accepté la pose par les 3 gros d'antennes Edge à un prix raisonnable, mais rien depuis. Maintenant il ont le projet de mettre des antennes 3G, mais que pour 1 opérateur, et pour un prix hallucinant, les autres devraient payer celui ci un droit de passage.
avatar stabilo11 | 
- le métro de stockolm n'a que 3 lignes, c'est quand même plus facile à équiper. - la profondeur du métro n'a aucun lien avec la réception, puisque de toute façon les ondes HF ne traversent pas le sol. - les hotspot n'ont jamais eu de limitation à ce que je sache, puisqu'il s'agit de hotspots wifi (à moins que tu ne parle de capacité des smartphones à devenir eux même des hotspot wifi). - ca fait un bail que les appels vers un seul opérateur sont has-been en France. C'est probablement plus intéressant en Suède, s'ils n'ont qu'un seul grand opérateur dominant, ce qui n'est pas le cas chez nous. - si ta carte SIM t'a été donnée par la FAC, il est plus que probable que le tarif ait été sponsorisé et donc uniquement accessible aux étudiants, et réduit en conséquence. - je n'ai connu aucune restriction pour ma part en VOIP, ni chez Virgin mobile, ni chez B&you, ni chez Free. - idem pour la transformation de son tel en point d'accès wifi sur ces mêmes opérateurs (par contre c'est une option payante 10€/mois chez SFR je crois) Je suis cependant d'accord avec toi, les 3 opérateurs en place sont des pièges à pigeons, surtout lorsqu'on achète un mobile chez eux avec un engagement 24 mois. Il est bien plus rentable d'acheter un tel d'occasion récent, ou de faire débloquer (gratuitement) son ancien téléphone. Ceci dit, la Suède est effectivement réputée pour prendre de l'avance en matière de technologies, tout comme les petits pays du nord de l'Europe. C'est un grand pays, mais sa population est concentrée dans les villes, soit 1,3% du territoire. Ça aide beaucoup à développer un réseau de qualité, ça aussi !
avatar iguan | 
Bah si justement c'est typiquement pour éviter la saturation que cela aiderait grandement.
avatar Adragorne | 
Enfin un qui ose répondre à Orange qu'avec 30 millions de clients ils devraient être capable d'absorber 1,5 millions de plus... Enfin fallait bien trouver un argument pour demander une renégociation.
avatar kuban | 
Ca me fait penser aux Renault 20% plus chères et moins bien équipées en France qu'au Luxembourg... (est-ce encore le cas ?) Bien entendu, c'est à cause des coûts de main d’œuvre pour des voitures fabriquées au même endroit et au même moment... Ou alors c'est que les gens sont plus pauvres au Luxembourg... Ou alors Renault prenait les français pour des pigeons... Au choix.
avatar Apical-informatique | 
Ça devrai rassurer les clients potentiels que le cartel des 3 gangsters a essayé de
avatar Bastienzz | 
@ totophe : "En tant qu'abonné à Free Mobile, forfait illimité, j'en suis très satisfait mis à part la batterie qui s'épuise plus rapidement que lorsque j'étais chez orange." J'avais noté ça aussi au début. En fait, lors du "Restore" pour désimlocker l'iPhone, tous les réglages sont remis à 0. Il m'a suffit de désactiver certains paramètres pour retrouver une batterie qui tient aussi longtemps qu'avant.
avatar hdub | 
Le plus virulent et de mauvaise foi, c'est quand même le patron de Bouygues.
avatar Dadathinkappleisthebest | 
Dire que les 3 opérateurs précédents se sont entendus sur les tarifs Ont dit que le minimum de pouvait être en dessous de 10€ (ils ont même osé essayés de piquer du fric aux plus démunis) Free 2€ .... Lamentable et ils essayent de se justifier (ils s’enfoncent), de carrément mentir, mauvaise foi et j'en passe. L'Acerp a prouvé la bonne foi de Free et a mis en exergue la déchéance des autres. Dire que réduire ses tarifs du jour au lendemain pour s'aligner avec Free n'est pas prendre les gens pour des cons, c'est qu'ils n'ont rien compris eux ....... ^-^

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