RCS Chat : Google veut enfin faire passer son iMessage

Stéphane Moussie |

Face à l’inertie des opérateurs, Google prend les choses en main. Le géant du net va déployer directement RCS, le « SMS 2.0 », auprès des utilisateurs Android. Il va commencer dès ce mois-ci en France et au Royaume-Uni.

Application Messages de Google

RCS est un nouveau protocole qui vise à remplacer les vieillissants SMS et MMS. Pensez donc, grâce à RCS, vous avez des conversations de groupe, des pièces jointes de tout type, des accusés de réception, une indication quand votre correspondant est en train d’écrire… Comme iMessage, WhatsApp ou Facebook Messenger ? Oui, à la différence près que RCS est un standard, qui n’appartient pas à une entreprise et qui peut être implémenté dans diverses applications.

L’implication de nombreux opérateurs, à travers la GSMA, qui devait être la force de RCS a finalement été un frein. Il y a eu quelques expérimentations ici et là, comme Joyn lancé dès 2015 par Orange et SFR et abandonné deux ans plus tard, mais jamais de déploiement à grande échelle.

Devant cet immobilisme, Google, qui a lui-même tergiversé pendant un moment sur l’approche à adopter en matière de messagerie instantanée, prend finalement son bâton de pèlerin pour populariser RCS, rapporte The Verge.

Une partie des utilisateurs de smartphones Android en France et au Royaume-Uni vont être invités à bénéficier de RCS d’ici la fin du mois. Une partie seulement, car Google va commencer à déployer le standard dans son application Messages, or tous les smartphones n'en sont pas équipés par défaut (Samsung et Xiaomi ont leur propre application de SMS, par exemple).

À l’ouverture de cette app, les utilisateurs verront un message leur proposant de mettre à niveau leur messagerie vers « Chat », le nom moins cryptique donné par Google à RCS. Sur les nouveaux appareils intégrant l’app Messages, RCS Chat ne sera pas activé par défaut, Google demandera aussi l’autorisation aux utilisateurs.

Quand la mention « Chat » sera présente dans une conversation, cela signifiera que le correspondant est lui aussi passé au nouveau protocole et qu’on profitera donc de ses avantages. Ce sera un peu l’équivalent des bulles bleues dans l’app Messages d’iOS qui informent qu’on a affaire à une conversation iMessage (qui transite par Apple) plutôt que par SMS.

Contrairement à iMessage, qui utilise une base de données centrale pour déterminer si la personne contactée a aussi iMessage, RCS repose sur un modèle fédéré dans lequel les différents opérateurs sont en charge des serveurs qui délivrent les messages — pas de mainmise de la part d’une entreprise, donc.

Pour savoir si le correspondant utilise lui aussi RCS Chat, l’application Messages d’Android l’interroge de manière transparente quand la conversation est ouverte en envoyant une sorte de notification push invisible. Si l’application du correspondant répond « Oui », alors RCS est enclenché.

Comme ce n’est pas le téléphone lui-même qui est responsable de la réponse, le système est toujours lié à un numéro de téléphone. Et comme il n’y a pas notion de connexion à un service avec un identifiant et un mot de passe, RCS est limité à un téléphone à la fois. On ne peut pas envoyer et recevoir de messages depuis plusieurs terminaux, contrairement à iMessage, Facebook Messenger et les autres.

Dans le cas où l’utilisateur de RCS Chat change de téléphone pour un modèle incompatible avec le standard (un iPhone, par exemple, même si Apple pourrait s’y mettre un jour), il rebascule automatiquement sur les SMS/MMS traditionnels.

Le coup d’accélérateur donné par Google ne signifie pas que la firme va continuer sa route complètement seule. Elle espère au contraire que cela va encourager les opérateurs à enfin s’investir sérieusement dans RCS.

Google devra aussi convaincre ses autres partenaires, les fabricants, de prendre en charge ce standard dans leur application de messagerie — ou à défaut convaincre les utilisateurs de passer à son app Messages.

Et c’est sans compter un autre défi de taille : chiffrer les messages de bout en bout. Contrairement à iMessage, WhatsApp et bientôt Messenger, RCS Chat ne chiffrera pas les messages de bout en bout à son lancement, une lacune importante à l’heure où la confidentialité est au centre des préoccupations. Google assure que cette protection, qui empêche les intermédiaires de consulter le contenu des messages, est envisagée pour plus tard. En attendant, il faudra faire confiance à Google, qui assure que les messages seront supprimés de ses serveurs dès qu'ils seront remis au destinataire.

Google va déployer RCS Chat dans des pays supplémentaires au cours de cette année, sans plus de précision sur les régions ou la date. L’objectif final, c’est une « expérience utilisateur simple et géniale qui fonctionne pour tous les utilisateurs Android. » La tâche s’annonce titanesque.

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