Porter un masque va vous faire détester Face ID

Mickaël Bazoge |

Dans un monde où une des conditions du déconfinement sera de porter un masque en toutes circonstances, Face ID a du mouron à se faire.

Le système de reconnaissance biométrique d'Apple reconnait les visages1, et même les visages qui changent (barbe, coupe de cheveux, avec ou sans lunettes…), mais pour les visages masqués, c'est tintin. C'est pourtant ce qui attend des millions d'utilisateurs d'iPhone dans les prochaines semaines, qui vont redécouvrir la joie de saisir leurs codes de déverrouillage « à l'ancienne », à tout bout de champ.

Apple le reconnait : « Face ID a été conçu pour fonctionner avec les yeux, le nez et la bouche », explique un porte-parole du constructeur au Wall Street Journal. « Les utilisateurs qui portent un masque peuvent toujours déverrouiller leurs appareils en entrant leur code », comme au Moyen-Âge serait-on tenté d'ajouter. Hélas, il n'y a pas grand chose à faire pour améliorer la situation.

Bien tenté, mais non.

iOS donne la possibilité d'enregistrer une seconde apparence pour déverrouiller Face ID (c'est parfois celle du conjoint), dans RéglagesFace ID et code. Malheureusement, on se heurte à un refus clair et net du système : le visage étant « obstrué », Face ID demande de « retirer tout élément susceptible de couvrir le visage ». Retour à la case départ.

Une fausse bonne idée.

Il est toujours possible d'enregistrer une apparence Face ID avec un masque qui ne cache que la bouche : dans ce cas, le processus d'enregistrement de l'apparence se déroule normalement et il est alors possible de déverrouiller son iPhone de la sorte.

Mais le problème, c'est qu'il faudra abaisser son masque sous le nez à chaque fois qu'on a besoin d'utiliser le smartphone : non seulement c'est mal porter un masque, mais en plus on est susceptible de se toucher le visage. Dans les deux cas, c'est dangereux.

Une des solutions avancées par le labo Xuanwu de Tencent est d'enregistrer une apparence en se masquant la moitié du visage avec le masque. Pour maximiser les chances de réussite, on peut enregistrer deux apparences avec pour chaque une moitié du visage recouvert. Face ID accepte l'enregistrement du visage masqué de la sorte, mais malgré plusieurs tentatives, mon iPhone n'est jamais parvenu à se déverrouiller. L'astuce fonctionne pourtant chez certains chanceux :

Les masques sur lesquels une partie du visage est imprimée ne fonctionnent pas — c'était bien tenté (lire : Bas les masques, Face ID !). En revanche, un masque moulé qui reproduit la volumétrie du visage peut déverrouiller un iPhone, d'après Danielle Baskin qui était déjà à l'origine du masque imprimé.

Danielle Baskin a imaginé un masque imprimé puis un masque moulé : c'est celui-ci qui fonctionne avec Face ID. Image : WSJ.

Après tout, et vu le monde dans lequel on vit, ce genre de masque en volume pourrait trouver un débouché commercial. Mais la balle est surtout dans le camp d'Apple : le constructeur va devoir trouver une parade. Il est déjà possible de désactiver l'option qui s'assure que l'on regarde bien l'iPhone pour déverrouiller l'appareil (Exiger l'attention pour Face ID)2. La Pomme pourrait réduire encore le niveau de sécurité, par exemple en ne prenant en compte que les yeux.

Mais on imagine mal la Pomme baisser sa garde en matière de sécurité alors que c'est un de ses principaux arguments de vente. On verrait plutôt le meilleur des deux mondes : Face ID et Touch ID, avec un capteur d'empreintes digitales intégré sous l'écran par exemple. Une rumeur annonce d'ailleurs un tel iPhone, pour cette année ou l'année prochaine. Apple a tout intérêt à faire au plus vite…

Une des solutions pourrait être de mettre à profit l'intelligence artificielle. L'entreprise Hanwang y travaille : après avoir entraîné une IA à reconnaitre les visages de ses employés portant un masque, cette dernière atteint un taux de reconnaissance de 95% !

Merci à Stéphane pour le coup de main !


  1. Lors de la configuration de Face ID, les 30 000 points invisibles projetés par le capteur TrueDepth génèrent une carte en volume du visage de l'utilisateur, complétée par une photo infrarouge en deux dimensions. Ces informations topographiques volumétriques et plates sont stockées dans l'enclave sécurisée de l'iPhone ou de l'iPad sous la forme d'une représentation mathématique. C'est cette représentation qui sert de référent lors de chaque tentative d'identification (lire : iPhone X : Apple donne les détails du fonctionnement de Face ID).  ↩

  2. Ironie de l'histoire, Google vient de livrer une mise à jour qui met la reconnaissance faciale du Pixel 4 au niveau de celle de l'iPhone. Jusqu'à présent, la fonction de déverrouillage du Pixel ne requérait pas l'ouverture des yeux pour fonctionner : l'appareil pouvait donc se déverrouiller avec un visage endormi ↩

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