Les AirTags et leur rôle dans des affaires de harcèlement ou de meurtres sont au cœur d'une action de groupe en justice, en Californie. Lancée l'année dernière, l'initiative a reçu le renfort de nouvelles victimes.
Les plaignants — ils sont 38 à ce jour — reprochent à Apple de s'être précipitée pour commercialiser un produit inachevé sur le plan de la sécurité et de s'être injustement enrichie tout en permettant que des personnes soient victimes d'intrusions dans leur vie privée.
Le procès fait aux AirTags n'est pas nouveau. Très rapidement après leur sortie (en avril 2021), la petite balise s'est révélée un outil simple, économique et redoutablement efficace pour suivre une personne à son insu. Les maris jaloux n'avaient cure du message d'Apple enjoignant de réserver sa balise au pistage d'objets.
Alors que des faits divers alimentaient régulièrement la chronique, Apple a ajouté des fonctions de sécurité. La première et principale fut qu'un AirTag sonne lorsqu'il suivait depuis un certain moment une personne qui n'était pas son propriétaire.
Le dispositif avait ses limites : la sonnerie n'était pas d'un grand secours pour une balise cachée sous un châssis d'auto ; les utilisateurs Android n'avaient aucun moyen de contre-vérifier cette présence importune depuis leur téléphone ; d'aucuns ont trouvé le moyen de rendre l'AirTag muet en le bricolant assez simplement.
AirTags : Apple aurait posé une colle aux bidouilleurs de hautparleurs
La plainte déposée en Californie cite plusieurs témoignages de victimes — parfois très secouées émotionnellement — d'un usage détourné de la balise. Cela va de personnes qui ont été suivies par un proche ou un inconnu à des affaires plus dramatiques encore, comme une jeune femme qui a traqué et écrasé son petit ami ; une autre qui s'est fait tuer en cherchant à récupérer son bien qu'elle avait géolocalisé, ou encore, un homme qui a abattu le voleur de son véhicule.
Ces affaires ont continué de se multiplier depuis le dépôt de cette plainte explique le document. 150 cas ont été recensés aux États-Unis, affirment les plaignants et, plus récemment, dans la seule agglomération de Tulsa en Oklahoma (722 810 habitants), 19 affaires ont été comptabilisées. Sans compter celles qui se sont produites à l'étranger.
Ce qui distingue l'AirTag de tout produit concurrent, c'est sa précision inégalée, sa facilité d'utilisation (il s'intègre parfaitement dans la suite de produits existante d'Apple) et son prix abordable", indique la plainte. Avec un tarif de seulement 29 dollars, il est devenu l'arme de prédilection des harceleurs et des agresseurs.
La plainte reproche à Apple de s'être précipitée pour lancer ce produit et d'avoir dû ajouter des fonctions de sécurité après coup, dans l'urgence (peu après la vente des AirTags des éléments tendaient à montrer qu'Apple avait prévu de sortir ce produit plus tôt, mais les périodes de confinement et l'immobilisation des populations ont pu décaler sa mise sur le marché).
Parmi ces modifications il y a eu l'app Android pour détecter manuellement la présence d'un AirTag. Mais ce n'était qu'une demi-mesure trop confidentielle pour être efficace. Depuis le mois d'août, Google, avec la participation d'Apple, a intégré cette fonction directement dans son système mobile pour qu'elle opère tout le temps, automatiquement.
Les AirTags ne sont plus invisibles pour Android
Eva Galperin, la directrice de la cybersécurité à l'Electronic Frontier Foundation, note les efforts d'Apple depuis deux ans pour limiter les risques et les abus, tout en estimant qu'il était « honteux » de les avoir sortis sans plus de garde-fous. Interrogée par Ars Technica elle s'inquiète de la nouvelle fonction de partage d'un AirTag entre plusieurs personnes, introduite avec iOS 17.
Le propriétaire d'un AirTag peut inviter jusqu'à 5 personnes à utiliser une même balise. Le reproche que fait Eva Galperin, est que lorsqu'une personne reçoit une alerte, elle pourra avoir un fragment d'information sur l'identité du propriétaire de la balise (le numéro de téléphone apparaît tronqué), mais elle sera dans l'ignorance des autres individus (ou autres appareils en sa possession s'il a plusieurs comptes iCloud) qui se partagent le mouchard et qui peuvent en suivre aussi le moindre déplacement.
iOS 17 : comment partager un AirTag entre plusieurs personnes
Apple, pour sa part, doit intervenir dans cette affaire à la fin octobre et elle entend demander le rejet de la plainte.