Facebook attaque Apple devant la Commission européenne, Epic défend ses principes

Mickaël Bazoge |

Facebook a décidé d'aller au feu contre Apple. Le réseau social a fourni à la Commission européenne sa liste de griefs sur la manière dont Apple gère sa boutique d'applications. Les services à la concurrence de l'UE sont en pleine phase de consultation dans le cadre du Digital Services Act, un « paquet » visant à rééquilibrer la balance du pouvoir avec les grandes plateformes du numérique.

Dans ce document, Facebook explique avoir subi des difficultés avec la mise en œuvre des règles d'Apple, sur les achats intégrés par exemple, sur les applications de jeux, sur la connexion aux services, sur la publicité en ligne. « Dans chacune de ces catégories, Apple a pris des décisions qui privilégient ses propres services et flux de revenus, au détriment des autres », tacle l'entreprise.

Le réseau social revient notamment sur cette histoire de Facebook Gaming, qu'il a fallu amputer d'une partie de ses fonctions (les jeux, en l'occurrence) pour obtenir le feu vert d'Apple. « En interdisant largement aux autres développeurs de proposer des apps permettant aux consommateurs d'accéder à des jeux qui ne sont pas distribués directement sur l'App Store, Apple s'arrange pour que ces consommateurs ne puissent acheter des jeux qu'auprès d'Apple et non chez d'autres développeurs ». La Commission européenne a déjà eu l'occasion de s'exprimer sur ce dossier.

L'autre dada de Facebook concerne les restrictions apportées à la collecte d'informations personnelles. Sans citer iOS, l'entreprise indique que les grandes plateformes encadrent de plus en plus strictement le pistage des utilisateurs, et limitent le croisement des données collectées par les apps et les sites web. iOS 14 devait resserrer encore la vis dans ce domaine, mais Apple a repoussé la mise en œuvre des nouvelles mesures d'encadrement publicitaire au début de l'année prochaine.

Facebook craint que les plateformes décident d'échapper aux contraintes qu'elles imposent aux autres, si d'aventure elles venaient contrarier leurs propres efforts en matière de publicité (lire aussi : iOS 14 : les revenus publicitaires des partenaires de Facebook pourraient se réduire de moitié).

Cette nouvelle salve contre Apple intervient après une interview de Mark Zuckerberg dans laquelle le fondateur de Facebook dit pis que pendre de la mainmise d'Apple sur l'App Store (lire : Mark Zuckerberg se plaint du contrôle unilatéral exercé par Apple sur l'App Store). Les couteaux sont manifestement de sortie, mais gare au retour de flammes : Facebook n'est pas un agneau innocent et sa batterie de casseroles ne cesse de grossir.

Epic sur le terrain des principes

Tout cela intervient dans un contexte où Apple fait face à plusieurs fronts : en Europe comme on vient de le voir, aux États-Unis face au régulateur, et en justice contre Epic. Tim Sweeney, le patron de l'éditeur de Fortnite, a réagi sur Twitter contre l'accusation d'Apple selon laquelle toute cette histoire pourrait se résumer à un « désaccord sur l'argent » (lire : Apple veut récupérer les sous générés par Fortnite avec son système de paiement alternatif).

D'après Sweeney, si Apple reste sur cette ligne de défense, cela voudrait dire que le constructeur a « perdu de vue les principes fondateurs de l'industrie de la tech ». En premier lieu, le fait qu'un appareil que vous avez acheté vous appartient, « vous êtes libre de l'utiliser comme vous le souhaitez » : configuration, installation des logiciels, création d'apps, partage avec des proches.

« C'est exactement ce que symbolisait la publicité "1984" d'Apple », et ce que symbolise la parodie faite par Epic : « Une nouvelle société toute puissante qui dicte les conditions d'accès des utilisateurs à leurs appareils, qui s'impose comme intermédiaire entre les créateurs et les utilisateurs, et qui utilise cette position pour exercer son contrôle et engranger de l'argent ».

Tim Sweeney se place sur le terrain des beaux principes tandis qu'Apple campe sur des positions très business. Rappelons que Fortnite pourrait revenir sur l'App Store pour peu qu'Epic se plie aux règles de l'App Store, c'est à dire supprime son système de paiement alternatif, tout en poursuivant Apple en justice (lire : Fortnite a perdu 60% de ses joueurs iOS).

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