En 2005 soyez ringards et vieux jeu !

La rédaction |

À l’heure du retour en force du Rock’n Roll et de tout ce qui va avec, un look presque aussi formaté que l’uniforme Reggae, mélange savant de coupe de cheveux genre les Kinks-passés-au sèche-linge (The Strokes), de lunettes à la Lou Reed sans la classe, de blouson cuirs élimés à la Ramones, des pochettes d’album reprenant les typographies des affiches des concerts du MC5 ou des concerts de l’île de White (l’affiche du film Dig), à l’heure du retour du fuck you et du I’m a total mess (Pete Doherty se prenant pour un croisement d’Iggy Pop et de Sid Vicious) bref à l’heure où finalement c’est mieux que rien parce qu’on se sent plus à l’aise, entouré de cette imagerie plutôt que de la bouillie innommable MTV, mais qu’au fond de nous on sait pertinemment que l’époque n’invente rien de véritablement de nouveau, à l’heure de la grande machine à délaver les jeans pour avoir un joli popotin javellisé, que faire ? Quelle attitude adopter quand on voit Franz Ferdinand ou Block Party comme les groupes préférés des jeunes cadres dynamiques, ingénieurs, conduisant des Clios 16 s avec une blonde insipide à leur côté ? Une solution consisterait à répondre à Franz Ferdinand par Television ou Talking Head, une autre consisterait à suivre Meg et Jack White sur les traces du blues crasseux, genre qu’ils revisitent avec un savoir-faire rare à notre époque.

Le problème étant qu’Elephant, on le connaît archi par cœur et qu’on attend le prochain avec impatience. En attendant que les White Stripes nous montrent la voie qui semble la plus salvatrice, à savoir que quitte à ne rien inventer autant que ça envoie sec, on retrouvera sans doute avec un grand plaisir nos vieux disques de blues notamment ceux de John Fogerty et de son groupe fabuleux : Creedence Clearwater Revival. Ce groupe de blues issu des bayous du Mississippi a produit l’une des meilleures bandes-son pour une traversée des USA en pick-up (ou du Larzac en 4L). Ceux qui ardemment veulent entendre une grande cohésion entre quatre musiciens, ceux qui veulent un son, un vrai, qui sent bon la liberté, crade, classe, bouillante, habitée par le diable, le rythme and blues du grand Sud, une voix déchirée, pleine de gravas, de poussière, de moiteur, de sexe, doivent impérativement se jeter sur ces disques poignants, tous aussi cruciaux les uns que les autres.

Creedence Clearwater Revival avait tout compris. Ils étaient ringards dès le début (1969) avec leurs chemises à carreaux de bouseux et faisaient une musique déjà vieille et à destination des vieux. De plus, ils s’attaquaient à un genre dans lequel les noirs américains excellaient. Heureusement pour eux Fogerty gueulait aussi bien que Screamin’ Jay Hawkins (leur reprise d’I Put A Spell On You est d’ailleurs un vrai déchirement), de plus il est né dans le fleuve d’où coulait la musique qui avait mis la planète à l’envers, le blues. C’était un looser perdu dans son garage (et oui un vrai de vrai routier !!!), avec de grandes idées, (de celles qui semblent animer les Whites Stripes), réapprendre l’essentiel du blues à l’heure du grand n’importe quoi hippie.

Certains, tel Hendrix ou les Doors (très bons au demeurant) avaient la même démarche, mais eux étaient cosmiques voyez-vous, tout passait par la cuisson des neurones à coup d’acide. Creedence non, le blues, rien que le blues, des chansons qui font mal, qui parlent de trucs de tous les jours. Les autres étaient chez Lucie dans le ciel, eux étaient ancrés sur terre et c’est ce qui fait que finalement c’est l’un des meilleurs groupes qu’on puisse entendre venant de cette époque. Ils l’ont fait à l’ancienne, guitares, basse, batterie, mais alors ça pour une guitare c’en est une, nom de nom !!! un grain mes amis !!! et puis la rythmique est impériale pas moins, ça vous mène directement en enfer. Alors, la réponse aux questions posées ci-dessus est : Pour bien vivre en 2005 soyez ringards et vieux jeu. Montez un groupe de blues et achetez-vous du Creedence Clearwater Revival !!! Cosmos Factory, s’il ne devait y en avoir qu’un. L’intemporalité de la musique passe par la ringardise, vous verrez, plus besoins de courir après The Next Big Thing.

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