La contamination galopante de l'App Store par le freemium est une source de frustration pour Apple comme pour certains développeurs, racontent les fondateurs du studio Stoic, auteur de The Banner Saga. Un jeu de rôle au tour par tour sur PC et dont le portage sur iPad est très avancé (les tablettes Android et Windows seront aussi servies).
Arnie Jorgensen et John Watson ont discuté de l'arrivée prochaine de cette version iPad avec Polygon. À un moment de l'interview, Watson dit qu'Apple et les développeurs - surtout les indépendants probablement - sont au diapason sur la question du freemium.
Apple éprouve une frustration, comme tout le monde, vis-à-vis de cette mentalité qui se développe dans le marché des apps pour mobiles, où les gens ne veulent plus rien payer. Ils veulent dépenser aussi peu que possible. Ils pensent que 4 dollars (2,9 euros) est un montant exorbitant pour un jeu, ce qui est complètement illogique au vu de leur mode de vie. Ils dépenseront 600$ pour un iPad, et 4$ pour un café, et laisseront 20$ sur la table pour un déjeuner, mais lorsqu'il s'agit de dépenser 4 ou 5 dollars pour un jeu c'est comme si cette décision allait bouleverser leur vie. Ca me désespère moi aussi
Apple est tout à fait consciente de cette problématique, ajoute-t-il, elle pousse les développeurs à tirer parti au maximum d'un appareil comme l'iPad Air et de viser le haut du panier technique lors de la réalisation de jeux. La relation exacte d'Apple avec le freemium semble être à géométrie variable puisque l'app de la semaine en ce moment est celle des Tortues Ninja avec des In-Apps grimpant jusqu'à 45€… Le tarif de Banner Saga n'est pas encore arrêté et ses auteurs n'envisagent pas l'option du freemium. Ce dernier, explique encore Watson, a le plus souvent des effets indésirables :
Ca me va parfaitement de dépenser de l'argent sur un jeu, mais je n'aime pas obtenir en échange un titre fade où je suis pris pour un pion et où mon plaisir passe au second plan. Tout le monde essaie de faire ça.
Il cite Hearthstone de Blizzard et Fates Forever de Hammer & Chisel comme des exceptions dans le registre du freemium. On peut aussi mentionner le tout dernier Gameloft dépourvu d'In-Apps alors que l'éditeur a énormément misé dessus dans son catalogue.
Arnie Jorgensen et John Watson, deux anciens de Bioware où ils ont travaillé sur Star Wars: The Old Republic, ont aussi expliqué l'origine de leur décision de créer leur propre petite structure et de développer Banner Saga. Tout est parti de l'iPad et de quelques parties de Superbrothers: Sword & Sworcery, paru en mars 2011. Ce titre aux graphismes rétro avait été conçu par une équipe indépendante, validant ainsi l'hypothèse qu'il y avait matière à se lancer dans la confection d'un jeu pour iPad de bon niveau avec relativement peu de moyens.
Pour autant, l'iPad n'avait pas encore fait ses preuves commercialement. Les jeux sophistiqués pour la tablette étaient encore rares et leur économie difficile à évaluer. Banner Saga a donc été développé en priorité pour le PC et vendu sur Steam où le public était plus facile à trouver. Le jeune studio ne voulait risquer de mettre son avenir en péril sur une plateforme iOS aux contours encore flous.
Toutefois, cette idée initiale de travailler pour des tablettes a été payante, explique les deux fondateurs. La mécanique du jeu est complètement transposable vers des appareils fonctionnant avec des interactions tactiles. Le portage sur iPad de la version PC n'a pris que deux jours, le reste relève de l'optimisation et du choix d'un tarif adéquat…