Xiaomi représente-t-il vraiment une menace pour Google ?

Stéphane Moussie |

La croissance fulgurante de Xiaomi inquiéterait Google. The Information rapporte que des personnes travaillant sur Android estiment que le fabricant chinois pourrait représenter « un défi », en cela qu'il est en train de mettre en place un écosystème parallèle.

Lei Jun, le patron de Xiaomi lors de la présentation des Mi Note.

Une entreprise de l'internet, pas un fabricant de smartphones

Xiaomi, récemment devenu le troisième constructeur mondial de smartphones avec 61 millions d'unités vendues en 2014 — et ce, en distribuant exclusivement en Asie —, fait peu de marge sur le matériel, mais mise sur la quantité pour imposer ses propres services.

Ainsi, au démarrage, les smartphones Xiaomi ne proposent pas de se connecter à son compte Google, mais au Mi Cloud, un équivalent d'iCloud. Les applications de Google que l'on trouve traditionnellement sur le premier écran d'accueil des appareils Android (il s'agit d'une obligation contractuelle) ne figurent pas non plus sur ces smartphones. Selon The Information, la boutique Google Play est présente sur l'écran d'accueil d'un seul terminal Xiaomi vendu hors de Chine.

MIUI, le système maison de Xiaomi basé sur Android, est utilisé par plus de 100 millions utilisateurs. Cela en fait la version alternative d'Android la plus populaire, et de très loin. En juin 2014, CyanogenMod revendiquait 12 millions d'utilisateurs.

MIUI 6, la dernière version majeure du système de Xiaomi.

Publiquement, Xiaomi assure qu'il ne compte pas faire de l'ombre à Google ou à Android. « Nous sommes un fervent supporter de Google », a déclaré Hugo Barra, le transfuge de Mountain View devenu responsable de l'internationalisation de la marque chinoise, lors du premier pas posé aux États-Unis.

Il a certifié que, contrairement à ce qui se disait, il n'était pas question de forker Android. La principale différence avec les autres constructeurs, c'est que Xiaomi ajoute les fonctions que les clients réclament et que les mises à jour sont rapides, a-t-il souligné.

Mais Xiaomi tient un double langage. Il ne veut pas qu'on le considère comme un fabricant de mobiles mais comme une entreprise de l'internet, ce qu'est précisément Google. Dès lors, il marche inévitablement sur ses platebandes.

Le précédent Samsung

La crainte que Google aurait à l'égard de Xiaomi rappelle un autre épisode. Début 2013, le Wall Street Journal titrait « Samsung suscite l'inquiétude chez Google ». Le journal écrivait que la position dominante de Samsung sur l'univers Android (40 % de part de marché à l'époque) pourrait lui permettre de renégocier ses arrangements avec Google, et notamment de réclamer une plus grosse part des revenus tirés de la publicité en ligne.

Il y avait aussi le spectre Tizen, un système d'exploitation maison alors en développement qui pouvait marquer une prise de distance vis-à-vis d'Android.

Deux ans plus tard, force est de constater que Google n'a pas souffert de cette domination et a même été en position de force face à l'entreprise coréenne. La firme de Mountain View a pu reprendre le contrôle d'Android comme elle l'entendait grâce à Google Play Services, un bouquet de services et d'API propriétaire, et au contrat très strict qu'elle impose aux fabricants.

Un Galaxy S4 cassé. Crédit Timo Kuusela CC BY

La position de Samsung s'est également infléchie. Même s'il reste toujours le premier constructeur Android, son âge d'or semble révolu, débordé qu'il est par la montée en puissance des marques chinoises... Xiaomi en tête. Quant à Tizen, il a eu du mal à émerger et ne fait absolument pas le poids face à Android.

Le fait que Samsung ne soit pas parvenu à imposer ses services — il se dit même que le Galaxy S6 pourrait intégrer des apps Microsoft à la place des siennes — montre que la partie n'est pas gagnée pour Xiaomi. À l'international, le constructeur chinois devra en plus faire face aux préoccupations sur la confidentialité des données qui ne manqueront pas d'être alimentées par ses concurrents. Le « défi », c'est avant tout Xiaomi qui va devoir le relever.

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