Samsung a écoulé l'année dernière 216 millions de smartphones, dont une quasi-totalité de terminaux sous Android, contre 130 millions d'iPhone. A priori, Google devrait accueillir à bras ouvert cette réussite remarquable qui fait d'Android le premier OS mobile au monde, loin devant iOS avec 69,7 % de part de marché contre 20,9 % au dernier trimestre 2012 (lire : Le marché du smartphone se cherche un numéro 3).
Or, la situation est beaucoup plus contrastée comme le révèle le Wall Street Journal qui titre « Samsung suscite l'inquiétude de Google ». C'est paradoxalement le succès de la firme de Sud-Coréenne qui inquiète Moutain View. En vendant à elle seule 40 % des smartphones Android et plus d'une tablette sur quatre au dernier trimestre 2012, l'entreprise a pris un poids considérable. Sa position privilégiée pourrait lui donner l'idée de renégocier ses arrangements avec Google, d'après des sources proches du dossier restées anonymes. Le géant asiatique pourrait notamment réclamer une plus grosse part des revenus tirés de la publicité en ligne.
Andy Rubin et JK Shin, respectivement responsables d'Android et Samsung, lors de la présentation du Galaxy Nexus - photo SamsungTomorrowSamsung aurait touché par le passé plus de 10 % des recettes de Google liées à la publicité en ligne. Un pourcentage qu'elle voudrait revoir à la hausse, car Mountain View commence à tirer davantage de revenus d'applications comme Google Maps et YouTube. Et dans le même temps de plus en plus d'utilisateurs accèdent aux services de Google via un appareil Samsung — bientôt un sur deux pour les smartphones si la tendance ne faiblit pas. Un analyste, Rajeev Chand, estime pour sa part que le constructeur pourrait réclamer des versions du système en avance par rapport aux autres fabricants. Bien qu'elle ne soit pas évoquée par le Wall Street Journal, une autre option pourrait s'offrir à Samsung pour faire plier Google en cas de désaccord dans les négociations : la migration vers son propre OS, Tizen. Des terminaux sous Tizen sont déjà prévus pour cette année, mais on ne sait pas jusqu'à quel point Samsung entend s'impliquer dans ce système alternatif.
Photo pour les 100 millions de Galaxy S vendusLors d'une réunion rassemblant les dirigeants de Google, Andy Rubin, à la tête de la division Android, a salué le succès de Samsung. Difficile de faire la fine bouche en effet quand un constructeur vend plus de 200 millions de smartphones avec ses services à l'intérieur. Toutefois Andy Rubin a également ajouté que la marque sud-coréenne pouvait devenir une menace si elle continuait de gagner du terrain, rapporte une source du Wall Street Journal. Et Rubin d'expliquer que l'acquisition de Motorola est une couverture au cas où un constructeur deviendrait trop envahissant, comme Samsung donc. Google a pourtant répété dans un premier temps à de nombreuses reprises qu'il ne favoriserait pas Motorola et que le constructeur américain resterait indépendant. La firme de Mountain View joue un véritable numéro d'équilibriste. Elle doit veiller à ce que la domination de Samsung ne se retourne pas contre elle, prévoir une solution de secours au cas où le coréen lui ferait faux bond, et ne pas froisser ses autres partenaires (HTC, LG, Asus, Sony...). D'après les sources du Wall Street Journal, Google espère d'ailleurs que ces autres constructeurs puissent tailler des croupières à Samsung. L'entreprise placerait notamment ses espoirs dans les nouveaux arrivants sur le marché Android, comme HP. Au vu de la tablette affreusement générique que HP vient de dévoiler, ce n'est pas gagné.