« [Les développeurs et les utilisateurs] sont très nombreux à nous dire qu’ils ont l’impression que les choses ont plus bougé depuis une vingtaine de jours qu’au cours des dix dernières années », déclarait Thierry Breton le 25 mars au moment de l’ouverture des premières procédures contre Apple, Google et Meta dans le cadre du Digital Markets Act (DMA).
Le règlement européen sur les marchés numériques ouvre dans l’écosystème iOS de nouveaux chemins qui ne sont plus sous le contrôle exclusif d’Apple. Mais ces chemins sont-ils praticables dès à présent ? Nous avons posé la question à une demi-douzaine de petits studios de développement d’applications iPhone, qui soulignent tous qu’il reste d’importants travaux à faire pour que les nouvelles voies ne se transforment pas en impasse.
Une épée de Damoclès au-dessus de la tête des développeurs
Depuis début mars, les développeurs ont le choix entre deux contrats différents avec Apple concernant la distribution de leurs applications iPhone dans l’Union européenne. Le premier, c’est le contrat historique qui prévoit que les applications soient uniquement disponibles dans l’App Store et qu’Apple prélève une commission de 30 ou 15 % (le montant varie en fonction des revenus du développeur, de la nature de l’achat…) sur les ventes de ces apps ainsi que les achats intégrés.
Le deuxième contrat offre plus de libertés puisqu’il permet aux développeurs de distribuer leurs logiciels en dehors de l’App Store (mais aussi dans l’App Store s’ils le souhaitent), ainsi que d’intégrer un autre système de paiement que celui d’Apple et des liens vers leur site web pour vendre du contenu ou un abonnement. Les développeurs se sont-ils empressés d’adopter ces nouvelles conditions commerciales censées les libérer d’Apple ? Pas du tout.
« On ne sait pas encore s’il y aura d’autres boutiques d’applications iOS qui généreront suffisamment de téléchargements pour rivaliser avec l’App Store, d’autant plus quand on considère que l’on parle uniquement du marché européen », soupèse Paulo Andrade, le créateur du gestionnaire de mots de passe Secrets, qui ne voit donc pas l’intérêt de signer dès maintenant le nouveau contrat.
« Avec cela à l’esprit, passer aux nouvelles conditions ne représenterait qu’un avantage de 2 % sur les ventes. Aux conditions actuelles, la commission d’Apple sur Secrets s’élève à 15 %. Avec les nouvelles, elle serait de 10 %, plus 3 % pour les frais de paiement. Le jeu n’en vaut pas la chandelle, surtout avec la Core Technology Fee en toile de fond », calcule le développeur.
Cette commission d’un nouveau genre qui est incluse dans le deuxième type de contrat est vue par les développeurs comme une épée de Damoclès au-dessus de leur tête : pour chaque nouvelle installation annuelle de leurs applications au-delà du premier million, ils devraient verser 0,50 € à Apple.