Le Japon a suivi l’Union européenne et son DMA en imposant à Apple une série de mesures qui vont l’obliger à ouvrir l’iPhone à la concurrence. On pourrait croire que l’entreprise californienne déteste les deux régulateurs avec la même passion. Dans un entretien accordé à plusieurs médias, dont Numerama et La Tribune (nous n’avons pas été invités…), elle révèle pourtant un favori. Alors qu’Apple n’a jamais caché qu’elle détestait le DMA, le MSCA japonais lui paraît nettement préférable.
Les deux textes sont pourtant proches et ce sont des points de détail qui font peser la balance en faveur du Japon dans le cœur de Cupertino. Ainsi, le Japon exige la possibilité de passer par des boutiques d’apps tierces au lieu de l’App Store. AltStore n’a pas attendu bien longtemps pour ouvrir ses portes dans le pays et d’autres boutiques devraient suivre.
Après l’Europe, le Japon contraint Apple à ouvrir véritablement l’iPhone à la concurrence
Quelques différences à la marge
Apple pointe toutefois quelques différences avec le DMA, à commencer par le passage obligatoire par une boutique. On ne peut pas télécharger une app directement depuis un site web sur les iPhone japonais comme on peut le faire en Europe, tout doit passer par les boutiques et donc par le processus de notarisation géré par ses soins. Ce qui lui permet de garder la main sur les apps autorisées et même si c’est en théorie des problèmes de sécurité qui peuvent justifier un refus, on l’a déjà vu s’en servir pour d’autres raisons.
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L’Union européenne empêche normalement Apple de refuser une app par le biais de la notarisation et l’entretien semble indiquer que cette option restera ouverte au Japon. Pourtant, les règles destinées au pays n’évoquent pas de contrôle sur le contenu. L’argument de la pornographie a été brandi en guise de preuve, selon Apple, des méfaits du DMA. Pourtant, tout semble indiquer que la catégorie n’est pas interdite dans l’archipel et AltStore ne paraît pas proposer une liste d’apps spécifique au pays. La Pomme n’a manifestement toujours pas digéré la sortie de Hot Tub sur la boutique alternative, malicieusement présentée à l’époque comme approuvée par ses soins.
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Elle a aussi une préférence sur la gestion des paiements externes, requise par le législateur japonais comme par le DMA. Pour commencer, les apps devront systématiquement proposer les deux options et permettre aux utilisateurs de choisir, alors que les développeurs doivent choisir une seule option sur ce continent. L’Union européenne ne tolère par ailleurs aucune restriction sur l’accès à des moyens de paiement qui ne sont pas gérés par ses soins, là où le Japon a accepté de les restreindre pour les mineurs. Les apps destinées aux moins de 13 ans ne pourront pas afficher un lien vers un système de paiement externe et tous les utilisateurs de moins de 18 ans devront obtenir une autorisation parentale pour réaliser un achat hors de l’App Store. Ces différences sont jugées essentielles par Apple pour protéger les enfants, ce qui serait impossible selon elle en Europe.
Le régulateur japonais n’exige pas d’interopérabilité systématique
Le dernier argument est sans doute le plus important : le DMA exige des fonctionnalités interopérables dès leur conception, alors qu’il n’y a rien de tel dans la loi japonaise. Apple juge que l’Europe veut bloquer l’innovation, motivée par des concurrents qui auraient fait preuve d’un « lobbying intense » auprès des institutions européennes. Spotify et Meta ont même été cités pendant l’entretien, ce qui n’est pas une surprise, tant les deux entreprises reviennent régulièrement dans les discussions. Le service de streaming n’a jamais manqué une occasion d’accuser la Pomme de nuire à son propre service en favorisant Apple Music.
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Apple juge l’approche japonaise bien meilleure, si bien qu’elle ne pense pas devoir bloquer des fonctionnalités nouvelles, comme elle le fait régulièrement en Europe. Outre la recopie de l’iPhone qui n’est toujours pas active sur le continent, on peut aussi évoquer le retrait à venir d’une fonctionnalité liée à l’Apple Watch.
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Apple ne rate jamais une occasion de faire pression sur l’Europe
Cette démonstration est avant tout une manière de plus pour Apple de mettre la pression sur l’Union européenne, par le biais de ses propres clients. L’entreprise de Tim Cook veut démontrer qu’il y avait une meilleure manière de faire en utilisant le Japon comme preuve, quand bien même les textes ne sont pas si éloignés qu’elle veut bien le dire.
C’est loin d’être la première fois qu’Apple cherche à mobiliser ses clients européens contre le DMA, à tel point que l’on pourrait aussi parler d’un « lobbying intense » à son sujet. Reste à savoir si le Japon érigé en contre-exemple va finalement faire mouche auprès des citoyens et in fine des institutions.
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