Le Pencil n’est pas le premier stylet d’Apple — ce serait oublier celui de la Graphics Tablet de l’Apple II, ceux des différentes incarnations du MessagePad, et celui de l’eMate. Mais le Pencil est le premier stylet conçu par Apple depuis les fameuses sorties de Steve Jobs sur le sujet : il n’a rien de nécessaire, puisqu’iOS est pensé pour être utilisé avec les doigts, mais n’est pas tout à fait inutile, puisque les doigts ne sont pas toujours assez précis. De quoi justifier son prix astronomique ? Première réponse après quelques heures d’utilisation.
Le Pencil étonne par sa forme : là où la plupart des stylets sont courts et épais, il est long et fin. Il reprend en fait les dimensions des crayons de bois, d’où son nom sans doute. Sa prise en main est donc naturelle, d’autant qu’il est bien équilibré, même s’il est plutôt lourd. C’est qu’il intègre une batterie lui offrant une douzaine d’heures d’autonomie, que l’on peut recharger à l’aide du connecteur Lightning caché sous son capuchon.
Ledit connecteur est plus long que d’habitude, afin qu’il puisse s’enficher sur un appareil protégé par un étui. Or le Pencil étant plus épais que l’iPad Pro, on ne peut pas l’y brancher confortablement sans étui, un comble pour deux produits conçus de concert. Cela dit on s’en contentera bien, puisque 15 secondes de charge suffisent à récupérer une demi-heure d’autonomie. Et Apple fournit un adaptateur Lightning femelle-Lightning femelle permettant de recharger le Pencil avec un câble Lightning ou n’importe quel dock iPhone.
Le capuchon protégeant le connecteur est un bon exemple du soin apporté à la construction du Pencil. La bague en métal interrompant la monotonie du corps en plastique blanc n’est pas qu’une fioriture, même si le stylet est lesté de manière que le nom du produit pointe toujours vers le haut, détail incroyable de vanité. Elle facilite aussi la mise en place du capuchon, maintenu fermement en place par un aimant, et percé de trous pour laisser passer l’air si on avait la maladresse de l’avaler. Et comme il m’est déjà arrivé de mâchouiller machinalement le Pencil…
Mais le capuchon est aussi symbolique des défauts de ce stylet : un crayon porte souvent une gomme, mais le Pencil en est dépourvu. L’élégance du Pencil confine à la stérilité quand elle empêche d’inclure un petit bouton sous l’index, qui simplifierait énormément la manipulation des applications de dessin en permettant d’annuler une action ou de convoquer un outil. Les stylets de Wacom sont assurément moins jolis, mais indubitablement plus pratiques. À trop vouloir simplifier, Apple finit par complexifier en se mettant en travers du chemin de ses utilisateurs.
Et c’est bien malheureux, car le Pencil est sans doute l’un des tout meilleurs stylets pour iPad — si ce n’est le meilleur — que j’ai eu en main. Cela tient surtout à son temps de latence, réduit par une combinaison d’optimisations matérielles autant que logicielles. Il n’est pas nul, quoi qu’en dise Apple, mais il est considérablement moindre que celui de n’importe quel autre stylet sur n’importe quel autre iPad. Malheureusement, il varie d’app en app : presque imperceptible dans Notes, il se fait parfois sentir dans Procreate, et gêne souvent dans Paper.
Il est encore trop tôt pour juger du confort et de la précision apportés par les capteurs de pression et d’inclinaison, mais les premières impressions sont très positives, surtout dans Procreate qui en fait un excellent usage. Après quelques heures toutefois, je n’ai pas réussi à oublier que je dessinais sur une plaque de verre, alors que la texture douce de l’écran des Cintiq me rappelait parfois celle du papier Canson.
La pointe du Pencil n’aide pas : plus épaisse que les photos ne le laissent penser, elle a tendance à très légèrement bouger lorsque le tracé est vigoureux, sans doute parce qu’elle est seulement vissée au corps du stylet. Ni parfaitement dure ni particulièrement molle, elle devrait progressivement s’user dans le temps, même si personne chez Apple n’a su (ou voulu) nous donner un délai. Une pointe de remplacement est fournie dans la boîte, mais la firme de Cupertino n’en vend pas encore en boutique, peut-être parce que le marketing n’a pas encore décidé si le prix devait être outrancier ou simplement excessif.
Les petits défauts de la pointe n’empêchent toutefois pas de se « perdre » dans le dessin, au point… de souffler après avoir utilisé un outil gomme, avant de se rendre compte qu’il n’y avait pas de pelures. L’excellentissime « détection de paume » participe grandement à cette ambiance très naturelle : il est difficile de la mettre en défaut, ce qui permet d’oublier un peu que l’on utilise un ordinateur doté d’un processeur bicœur à 2,2 GHz et de 4 Go de RAM.
Et puis il faut poser le Pencil pour écrire cette prise en main… et il n’y a pas vraiment d’endroit où le ranger, ni boucles ni aimants suffisamment puissants, Apple comptant sur les accessoiristes pour remédier à ce problème. Ces petits détails mis à part, la première impression est largement positive. Reste à continuer à dessiner et écrire avant de livrer un test plus formel de cet Apple Pencil. Rendez-vous dans quelques jours.