C'est le remake de David contre Goliath. Sonos a porté plainte contre Google devant la cour fédérale de Los Angeles, ainsi qu'à l'ITC, la Commission qui gère les questions de commerce aux États-Unis. Le fabricant de produits audio veut obtenir des dommages et intérêts ainsi que l'interdiction de vente aux États-Unis des enceintes, smartphones et ordinateurs de Google.
Sonos estime que le moteur de recherche a enfreint cinq brevets touchant à la connexion d'enceintes sans fil et à leur synchronisation entre elles. Dans les faits, c'est une centaine de brevets que Sonos aurait pu intégrer dans ses plaintes, mais les ressources de l'entreprise sont limitées ; de même, Amazon aurait aussi pu être ciblé par ces poursuites mais là encore, Sonos n'a pas les moyens d'une longue bataille judiciaire contre deux géants, qui sont aussi des partenaires.
Et c'est justement là que le bât blesse. En 2013, Sonos veut travailler avec Google pour intégrer son service musical. Pour réaliser ce projet, le fabricant d'enceintes connectées fournit toutes sortes d'informations, dont les plans de ses produits qui détaillent la manière dont ils communiquent et interagissent entre eux. À l'époque, Google n'est pas un concurrent, c'est pourquoi Sonos donne ces documents sans barguigner.
Sauf qu'en 2015, Google lance le Chromecast qui permet de connecter un système audio classique… une version low cost du ZonePlayer de Sonos. Puis vint le Google Home, une enceinte compagnon pour l'Assistant du moteur de recherche. Sonos a acheté le petit appareil pour le décortiquer, et s'est rendu compte que l'approche empruntée par Google pour résoudre les différents problèmes technologiques liés à ce type de produit était fichtrement proche de la sienne.
Les relations se sont compliquées par la suite, Sonos réclamant de Google une licence pour ses brevets, Google exigeant la même chose. Pour continuer à utiliser son assistant, Google a reserré les boulons, demandant à connaitre le nom des futurs produits, le design et les dates de lancement six mois à l'avance, contre 45 jours en temps normal. Des pratiques de malandrins qui, au passage, pourraient alimenter les enquêtes des autorités de régulation de la concurrence aux États-Unis et en Europe.
S'il a fallu beaucoup de temps avant que Sonos ne se décide à prendre le chemin de la justice, c'est que Google a de grands pouvoirs : rien ne l'empêche d'enterrer les produits du fabricant tout en bas de ses résultats de recherche et/ou d'interdire l'intégration de son assistant. Et si Sonos ne s'est pas attaqué à Amazon, les reproches sont similaires : le mastodonte du commerce en ligne aurait copié les technologies Sonos pour ses enceintes Echo.
Du côté de Google comme d'Amazon, on assure de sa probité ; la justice va maintenant devoir démêler le vrai du faux. Avec, peut-être, de sérieuses conséquences pour la concurrence et les relations entre les grandes plateformes et les acteurs de plus petite taille. Au passage, le lancement récent de la One SL, sans micro — et donc sans assistant, ni de Google ni d'Amazon — s'éclaire d'une nouvelle lumière.