Netflix, Disney+ : gueule de bois après l'orgie de contenus

Mickaël Bazoge |

Après avoir investi des milles et des cents pour produire un maximum de contenus jusqu'à l'indigestion, les grandes plateformes de streaming sont en train de réduire la voilure. Le contexte économique actuel est moins porteur, même si ces services continuent d'attirer des abonnés. Il s'agit maintenant de faire des économies, chez Netflix pour commencer.

Crédit : Atul Vinayak, Unsplash

Netflix va fusionner l'unité chargée de produire des films à petit budget (30 millions de dollars et moins) avec celle qui s'occupe des budgets moyens (entre 30 et 80 millions). Ces deux entités avaient jusqu'à présent les coudées assez franches pour donner le feu vert à un projet, de manière relativement autonome vis à vis de la direction de la plateforme.

Désormais, les décisions sont centralisées par Scott Stuber, le « chief film » de la plateforme qui tente de réduire le nombre de productions pour privilégier les œuvres de qualité. Il faut dire aussi que bon nombre de ces films Netflix sortent sur le service en toute discrétion, ce qui les empêche d'atteindre une partie de leur public. Moins de quantité, plus de qualité en quelque sorte, c'est l'idée derrière cette restructuration selon Bloomberg. L'opération va aussi provoquer des réductions de personnel.

Netflix n'est pas seul à tailler dans les productions. « Nous devons mieux rationaliser nos coûts », a expliqué Bob Iger, l'ex-nouveau patron de Disney. Durant une conférence Morgan Stanley organisée début mars, il a également indiqué qu'il cherchait « évidemment » à recruter plus d'abonnés tout en créant une « stratégie tarifaire qui a du sens ». Les nouvelles sur ce front ne sont guère brillantes :

Disney+ perd des abonnés pour la première fois, Disney prévoit 7 000 licenciements

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Disney a constaté une « déconnexion » entre les dépenses pour acquérir du contenu et la manière de rentabiliser ce même contenu — ce d'autant que les coûts de production ont atteint des sommets. Le groupe s'est par exemple engagé dans une réévaluation de sa stratégie Marvel : faut-il réellement un troisième ou un quatrième film autour de tel super-héros, s'est interrogé Iger, « faut-il plutôt se tourner vers de nouveaux personnages ? ».

Histoire de partager les frais, Disney envisage aussi la possibilité de casser l'exclusivité donnée à son service de streaming et vendre des licences de contenus à d'autres diffuseurs.

Du côté d'Apple TV+, qui cherche toujours à se faire une place dans le marché encombré du streaming, on continue de sortir les billets verts. Le service va ainsi investir 1 milliard de dollars par an dans la production de films pour le cinéma (et pour muscler son catalogue, bien sûr).

Apple voudrait investir 1 milliard de dollars par an pour la production de films

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avatar cecile_aelita | 

@Absolut Piano

Merci pour cette analyse intéressante 🙂.

avatar hartgers | 

@AbsolutPiano :
Si cela ne vous convient pas, il y a des tonnes de contenus à regarder qui correspondent bien à ce que vous voulez voir. Au hasard, parmi toutes les séries et films tournés depuis la naissance du cinéma jusqu'aujourd'hui. Il y a de quoi remplir des milliers de vies entières rien qu'avec cela.
Netflix fait du marketing ciblé en cochant des cases, c'est un fait. Mais la représentation des minorités sexuelles ou raciales est un premier pas essentiel pour sortir le cinéma de son univers dominé sans partage par des hommes blancs. Que cela soit ressenti comme "forcé" peut être entendu, moins l'idée qu'il y en a "trop". Vous faites du "cherry picking" en sélectionnant quelques films et séries, sans nous donner la moindre statistique à manger. Avez-vous déjà entendu parler du test de Bechdel ? Pouvez-vous nommer au moins 10 cinéastes féminines ? Parmi vos réalisateurs et réalisatrices préférés, quelle est la proportion d'hommes cis blancs ?
Vous critiquez Sense8 alors que c'est justement l'une des rares productions de ce type qui a été faite par deux femmes trans, dans un océan d'hommes cis blancs.
Avez-vous peur de perdre quelque chose de votre identité lorsque vous vous offusquez contre davantage de diversité ?

avatar Eyquem | 

@hartgers

Le problème n’est pas que ça touche seulement quelques séries, c’est que -toutes- les séries récentes cochent ces cases. Ce n’est pas la diversité qui pose problème, mais ce passage en force et la pensée unique « correcte » qui en découle. Et il n’a pas juste choisi quelques séries, je suis aussi tombé sur une série de la mythologie grecque où Zeus et Achille étaient noirs (je n’ai pas continué pour voir s’ils étaient aussi lgbt pour bien cocher toutes les cases). Même les livres pour enfant n’ont plus que ça maintenant. Mais vu votre écriture, tout cela vous plaît et vous y adhérez.

avatar hartgers | 

Encore une fois, le système de Netflix et son marketing "cochage de case" n'est pas un mystère, et je l'ai précisé dans mon commentaire. Je viens juste relativiser le côté "pensée unique" puisqu'il y a un rattrapage nécessaire il me semble ?
Quant au fait que cela me plaise ou que j'y adhère, cela n'est pas le problème et à Netflix ou Disney non plus... étant donné que je ne suis abonné à aucune de ces plate-formes de streaming. J'ai à peine le temps de profiter de mon abonnement à MUBI, alors binger des séries... Je pense juste que dans la "panique morale" que certain•es vivent, un peu de nuance et de libre-arbitre permettrait à ces personnes de vivre les choses plus sereinement et d'aller vers les contenus qui les intéressent. Ils sont pléthoriques, et d'ailleurs je remarque que vous ne répondez pas à cette objection sur la quantité astronomique de contenus déjà disponibles. Je n'ai pas de temps pour regarder des séries Netflix produites à la chaine, non plus pour un énième film Marvel sans imagination. Vous non plus vous ne devriez pas avoir le temps pour ça.

avatar Absolut Piano | 

@hartgers

Je pense qu’au contraire, la pensée unique c’est la vôtre.

j’aime simplement regarder ce qui se fait, et plus précisément ce qui touche au fantastique, futuriste, etc…
Si je n’apprécie pas de voir dans toutes les séries ou films actuels, (et désolé, je n’ai pas le temps de faire une enquête globale sur le pourcentage, ni de bing watcher comme vous le dites,) une abondance surdimensionnée de ces thèmes, ça sous entend forcément chez moi un problème de refoulement de désir ?
Quelle réflection « orientée » ! :-)
On n’est pas forcément obliger de cadrer à toutes vos visions.
Les respecter, oui, mais en être abreuvé constamment, c’est autre chose.
Et quand au débat sur la parité homme femme, encore une réflection simpliste.
Vous ne faites que répéter aveuglement les soit disant « problèmes de la société » en vous masquant les yeux sur la réalité.
Il y a énormément de femmes réalisatrices toutes aussi respectées que les hommes.
Quoi que vous en pensiez il y a aujourd’hui dans beaucoup de métiers une tendance à choisir une femme sur un poste, quand bien même l’homme était plus compétent sur celui-ci, pareil pour les minorités.
Vouloir de la parité de partout n’a pas de sens.
Franchement, le plus urgent, ce ne serait pas de luter contre le comportement louche envers les femmes dans la rue et les transports ? Même sans jupette ?
Est-ce que c’est pas plus important de savoir qu’une femme peut se promener seule la nuit et ne pas être inquiète quand elle croise un homme, où plusieurs ?
Il faudrait arrêter de répéter sans réflection tous les lieux communs en croyant avoir une conscience.
Quand on n’a pas d’identité personnelle, on se rabat sur l’identité sexuelle pour se persuader d’avoir donné un sens à sa vie, et on rentre dans le moule des pseudo combats en faisant du copier coller.

avatar Eyquem | 

@Absolut Piano

Décidément, je ne peux être encore une fois que d’accord sur votre analyse ! 😅

avatar hartgers | 

Allez c'est cadeau, j'ai Googlé pour vous et moi :
https://www.bbc.com/news/newsbeat-60429942

avatar byte_order | 

@hartgers
> Encore une fois, le système de Netflix et son marketing "cochage de case"
> n'est pas un mystère,

Ce n'est pas parce que c'est assumé par Netflix que cette approche ne peut pas faire objet de débat.

> Je viens juste relativiser le côté "pensée unique" puisqu'il y a un rattrapage
> nécessaire il me semble ?

On ne rattrape rien en envoyant le balancier nettement plus loin que le point d'équilibre.
Un balancier envoyé trop loin va revenir en arrière plus fort.

> Je pense juste que dans la "panique morale" que certain•es vivent

Où voyez-vous de la panique.
Du désintérêt pour du contenu dont les motifs répétitifs de construction au point d'en devenir lassant, c'est pas paniquer, c'est se désintéresser.

Pour faire passer une idée simple, y'a pas besoin de la répéter encore et encore et encore.
Sinon, au bout d'un moment, on cesse de les écouter vu qu'on les a *déjà* entendu à l'identique, et si y'a plus rien d'autres à écouter, on cesse carrément d'écouter, faute d'intérêt à écouter.
Ce qui me semble, à terme, bien plus dangereux.

> je remarque que vous ne répondez pas à cette objection sur la quantité astronomique
> de contenus déjà disponibles

S'il est *déjà* disponible, c'est qu'il l'est depuis plus longtemps et donc, mathématiquement, ce contenu là a eu plus de chance d'être déjà vu que le nouveau contenu.

Votre argument c'est un peu comme si vous disiez à quelqu'un qui en a marre d'une dérive exagérée selon lui de basculer sur la dérive éxagée inverse, pour "compenser".
C'est pas ça l'équilibre. Ca c'est juste renvoyer le balancier de l'autre côté...

avatar hartgers | 

@byte-order : que cela fasse débat, soit. Personnellement je n'attends rien d'entreprises richissimes qui ont fait du divertissement leur fond de commerce. Demain si la roue tourne, ils changeront de stratégie marketing. Le seul point que j'essaie de faire passer n'est pas un agenda quelconque, puisque je ne produis pas ce contenu ni le consomme. Simplement, je pense qu'à notre époque de surabondance de contenu, il est facile d'éviter de consommer ce qui ne nous plait pas. On n'est plus à l'époque du cinéma de village itinérant qui passe tous les mois. Dans mon cas, le cinéma hollywoodien de superhéros ne m'intéresse pas, tant mieux si certaines personnes apprécient. J'ai un énorme choix de très bons contenus que je ne pourrais pas épuiser, même avec plusieurs vies devant moi. Au pire, regarder The Wire ou Freaks and Geeks une troisième fois ne me dérangerait pas. S'il y a une surreprésentation ressentie des minorités (ce qui reste à prouver, au delà des stratégies marketing "tout venant" de Netflix), alors il y a plein de moyens d'y échapper. Je ne dis pas plus que ça. Et si pour certaines personnes sous-représentées (ce qui est historiquement vrai, que ce soit pour les personnes LGBTQI+, les femmes et les personnes non blanches), cela permet de s'identifier plus facilement à des contenus, de trouver des exemples de personnages inspirants sur le chemin, hé bien tant mieux. Je doute très franchement de la sincérité des multinationales que sont Disney, Apple, Amazon, Netflix, mais je préfère cet angle que l'opposé où la diversité des êtres humains est invisibilisée.
De toutes façons, tant que les états-uniens n'auront pas reconnu le génocide, la déportation, la stérilisation et l'exploitation des populations natives, on sera très très loin de la reconnaissance humaniste qu'on est en droit d'attendre d'humains de bonne foi. Je dérive un peu mais en attendant ce moment, ce ne sera que de la soupe de bonnes intentions à visée marketing.

avatar cecile_aelita | 

@hartgers

« Dans mon cas, le cinéma hollywoodien de superhéros ne m'intéresse pas… »

Moi j’adore en tout cas 🤭!

« …tant mieux si certaines personnes apprécient. »

Ouf ! Je suis rassurée, j’ai cru que je n’allais plus avoir le droit de regarder mes films Marvel 🤭

avatar byte_order | 

@hartgers
> Simplement, je pense qu'à notre époque de surabondance de contenu,
> il est facile d'éviter de consommer ce qui ne nous plait pas.

Certes. Mais ce n'est pas binaire, on n'a pas *que* le choix de consommer ou ne pas consommer, on a *aussi* le choix de faire savoir pourquoi on le fait ou on ne le fait pas.

Je trouve souvent ici la même approche que vous face à des commentaires de gens qui expriment leur mécontentement : on leur oppose qu'ils ne sont pas obligés de consommer, et donc n'ont qu'à ne pas consommer si cela leur déplait.

Comme si le consommateur devait forcément choisir entre consommer et sa liberté d'exprimer son opinion. C'est soit on consomme en silence soit on ne consomme pas en silence désormais !?

Désolé, mais non.
Ce n'est pas parce qu'on n'est pas contraint de consommer quelque chose qu'on pert son droit à exprimer son opinion dessus.

Je n'ai pas besoin d'acheter du RoundUp pour avoir le droit d'exprimer mon avis dessus.
Et quand bien même j'en acheterai, j'ai toujours le droit d'exprimer mon avis dessus.

Notre société n'est pas une société *que* de consommation.
Que les entreprises ne soient, globalement, intéressées que par leurs recettes ok, mais le consommateur, lui, est *également* un citoyen, et à ce titre il dispose d'autres droits que cleui simplement de choisir de consommer ou pas.

> S'il y a une surreprésentation ressentie des minorités
> (ce qui reste à prouver, au delà des stratégies marketing "tout venant" de Netflix),
> alors il y a plein de moyens d'y échapper. Je ne dis pas plus que ça.

Pouvoir y échapper n'empêche nullement d'exprimer pourquoi on choisi de le faire.
L'argument "si cela vous plait pas ne consommez pas" est assez limité et ressemble souvent à "ne consommez pas et fermez là".
Y'a une sacré nuance.

Les gens ont le droit de dire pourquoi ils rejettent ce qu'on leur propose.
Cela aide souvent à modifier l'offre, d'ailleurs.

avatar hartgers | 

@byte-order : Je comprends cela dit votre point sur l'idée que le backlash peut arriver très fort. Il m'apparait cependant que si ces multinationales adoptent cette stratégie c'est également parce que c'est ce que leur clientèle réclame. Si je prends mon environnement social, la critique d'Absolut Piano n'apparait absolument jamais, même de la part des personnes les moins politisées. La société évolue également, et ces entreprises qui nous servent du contenu s'y adaptent en permanence.

avatar byte_order | 

@Absolut Piano
> L’affirmation extrême de plusieurs minorités pour essayer de les imposer en tant que majorité.

De la part des entreprises, non.
C'est juste un effet pervers de la surexposition des minorités car elles ont trop peur si elles ne le font pas de se prendre un badbuzz, synonyme de grosse perte de recettes.

D'ici quelques temps, face à des réactions de saturation de leurs clients, elles feront revenir le balancier à un meilleur équilibre.

Plus fondamentalement, c'est surtout le marketing de "nous voulons changer le monde" de la part d'entreprises multinationales qui sont très loin d'être des paragons de vertues pourtant qui est la preuve d'un déséquilibre plus profond. Quand des entreprises dont l'intérêt premier est la recherche perpétuelle de toujours plus de profit s'occupent de défendre des valeurs de société, c'est plutôt le signe que les institutions de nos sociétés dont c'est censé être le boulot ne le font plus, ou du moins plus assez bien...

avatar didloan92 | 

Les pigeons commencent à comprendre (enfin) qu’ils ne sont pas des vaches à lait 🙃

avatar noupot | 

AppleTV me sert de somnifère tant les séries sont ennuyantes, sans parler du wokisme omniprésent.

avatar sebnutt | 

L'avenir et la perennité d'Apple TV et TV+ passent par les droits sportifs. Pas par les films et séries.

avatar Dr. Kifelkloun | 

Je crois que le mot le plus important est "indigestion".
Je vais aux USA et maintenant l'offre de streaming est particulièrement indigeste. A moins de regarder des films, des shows et du sport 24-7 (*), il y a un moment où les dents du fond baignent... Il y a souvent un pb de qualité mais surtout de quantité à mon avis. Donc si ils réduisent la voilure et essayent de faire moins mais mieux, ça m'ira très bien. Aussi, la multiplication des "services" de streaming et l'augmentation des tarifs commence à avoir des conséquences. Beaucoup de gens ont utilisé le streaming pour "couper le câble" et arrêter la logique grossière des "packages" avec des centaines de chaines minables que personne ne regarde et des tarifs XXL. En multipliant les abonnements pour se partager le gâteau, les streamers montrent qu'ils sont aussi pourris et ça commence à se voir.

(*) certains en sont là

avatar Gerrer | 

Adn , secret d’histoire tv , Arte et ftv au top. 👌

avatar Archos | 

Je ne dis pas cela en tant que fanboy Apple, mais après plusieurs années avec des abonnements à Netflix, Amazon Prime, Disney, Apple+ (et Youtube Premium), si je devais ne garder qu'un seul, ce serait Apple.

Il y a certes moins de contenu, mais les productions sont tout simplement de meilleure qualité, plus originales, plus intéressantes. Et plus le temps passe, plus ce moment semble se rapprocher.

Le premier à dégager sera Disney. Quasiment inregardable avec sa nauséabonde "woke culture" à tous les étages, puis Netflix et Prime.

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