Dans quelques années, en plus d’un forfait Orange ou Free Mobile, vous aurez peut-être aussi un forfait Starlink pour votre iPhone. C’est en tout cas l’ambition d’Elon Musk. Invité il y a un mois au All-In Summit, le patron de SpaceX a esquissé un vaste plan pour sa filiale spécialisée dans les communications par satellite.

De la couverture des zones blanches à la connexion directe
Starlink rend déjà service à des abonnés américains ou japonais en comblant les zones blanches laissées par les opérateurs traditionnels. Ses satellites en orbite basse permettent non seulement d’envoyer des messages, mais aussi d’utiliser certaines applications — dont X, comme par hasard — là où le réseau terrestre est inexistant. Mais la technologie Direct to Cell utilisée jusqu’ici repose sur des partenariats avec les opérateurs locaux, qui doivent intégrer la solution à leurs réseaux.
Elon Musk veut désormais court-circuiter les opérateurs traditionnels et permettre aux smartphones de se connecter directement à ses satellites. C’est la raison pour laquelle Starlink a déboursé 17 milliards de dollars en septembre pour récupérer une partie des fréquences détenues par l’opérateur américain EchoStar (50 MHz de spectre dans les bandes AWS-4 et H-Block, situées autour des 2 GHz).
« C’est le genre de projet à long terme, a indiqué l’homme d’affaires. Cela permettra à SpaceX de fournir une connexion haut débit directement entre les satellites et les téléphones. » Mais contrairement au Direct to Cell actuel, compatible avec tous les iPhone depuis les iPhone 13, « des modifications matérielles seront nécessaires sur les téléphones », a-t-il averti. Et d’expliquer :
Puisque ces fréquences ne sont pas prises en charge par les téléphones actuels, le chipset devra être modifié pour les intégrer, ce qui prendra probablement deux ans. Les téléphones capables d'utiliser le spectre acquis commenceront donc probablement à être commercialisés dans environ deux ans.
Starlink va ainsi devoir convaincre les fabricants de modems d’ajouter la prise en charge de ses bandes de fréquences, parmi lesquels Qualcomm, MediaTek… et Apple, puisqu’elle fait maintenant partie de ces acteurs avec ses modems C1 et C1X. Les iPhone récents prennent bien en charge la bande AWS-4 dont Starlink a acquis une partie, mais, comme tous les autres smartphones, ils ne sont pas compatibles avec cette portion précise du spectre, EchoStar utilisant des appariements de fréquences différents.
Or, les relations entre Apple et Starlink sont pour le moins compliquées. Pour résumer, mécontent qu’Apple ait choisi de s’allier à Globalstar pour mettre au point son propre service de communication par satellite, Elon Musk cherche depuis à freiner les projets satellitaires de la Pomme. Le patron de SpaceX devra donc se montrer particulièrement habile pour convaincre Tim Cook d’intégrer ses fréquences spéciales dans de futurs iPhone. Selon The Information, les deux entreprises pourraient toutefois bientôt enterrer la hache de guerre.
Mais dans ce cas-là, pourquoi ne pas lancer un smartphone siglé Tesla ou Starlink, comme des fans en rêvent ? Elon Musk a déjà écarté l’idée par le passé et il n’a pas saisi la perche tendue par les participants de la conférence pour annoncer un projet en ce sens.
Un réseau mondial pour les smartphones
Le smartphone n’est d’ailleurs qu’un maillon du plan. « Nous devons également fabriquer les satellites qui vont communiquer sur ces fréquences, a ajouté Elon Musk. Donc, en parallèle, nous construisons les satellites et nous travaillons avec les fabricants de téléphones pour ajouter ces fréquences aux appareils. Les satellites et les téléphones pourront ainsi bien se synchroniser afin d’obtenir une connectivité à haut débit. » Si tout se passe comme prévu, « vous devriez pouvoir regarder des vidéos sur votre téléphone où que vous soyez dans le monde ».
Même si l’audience lui était acquise, une question épineuse a vite surgi : une telle connexion fonctionnerait-elle à l’intérieur d’un bâtiment ? Elon Musk s’est montré confiant, assurant que le signal passerait « dans une maison normale ».
L’autre question pressante concernait l’avenir des opérateurs traditionnels. Un participant a ainsi demandé si l’objectif était de faire de Starlink un opérateur mondial unique, capable d’assurer la connectivité partout sans besoin d’abonnement local ni d’itinérance. « Ce serait l’une des options », a répondu Elon Musk, en précisant immédiatement « pour être clair, nous n’allons pas mettre les autres opérateurs sur la touche. »
Pour une fois, le patron de SpaceX n’a pas promis de révolution immédiate. Les opérateurs terrestres continueront d’exister, « car ils possèdent beaucoup de spectre », a-t-il expliqué. Alors qu’Orange, SFR, Bouygues ou Free exploitent différentes bandes (700 MHz, 800 MHz, 2 100 MHz, etc.) selon leurs priorités de couverture ou de débit, Starlink ne disposera pas d’un éventail aussi large.
Il imagine plutôt un futur abonnement Starlink combinant forfait fixe — comme ceux proposés actuellement — et forfait mobile pour smartphone. On pourrait ainsi avoir un abonnement Orange pour la France, plus performant localement, et un forfait Starlink pour les voyages ou les zones sans réseau. À moins que Starlink ne se décide d’acheter des opérateurs pour s’emparer de leurs fréquences ? « Ce n'est pas exclu. Je suppose que cela pourrait arriver », a répondu Elon Musk avec un grand sourire.











