Les origines de Siri

Stéphane Moussie |

Du SRI International, un institut de recherche américain, à l'iPhone 4S, en passant presque par Android, Siri aura connu de multiples étapes avant d'être au cœur d'iOS. Le Huffington Post revient longuement sur la création de l'assistant vocal et son intégration aux terminaux d'Apple.

En 2003, la DARPA, l'agence du département de la Défense des États-Unis chargée de la R&D des nouvelles technologies destinées à un usage militaire, finance à hauteur de 150 millions de dollars un programme dont le but est de créer un assistant virtuel — à visée militaire donc. Le programme se déroule au sein du SRI International, un institut de recherche à but non lucratif situé à Menlo Park en Californie.

Adam Cheyer, ingénieur au SRI, a comme tâche d'assembler tous les composants de CALO — le nom de l'assistant pour Cognitive Assistant that Learns and Organizes (assistant cognitif qui apprend et organise) — provenant des 27 équipes qui travaillent sur le projet. Cheyer partage son temps entre CALO et Vanguard, un second programme mené par le SRI destiné notamment à Deustche Telekom et Motorola. Il est aussi question de bâtir un assistant avec Vanguard, mais son objectif est plus grand public et est lié à l'émergence des smartphones. Un prototype de Vanguard, plus limité que CALO qui est très impressionnant mais qui a l'avantage d'être plus facile à intégrer à des produits de masse, est présenté à Dag Kittlaus, directeur général de Motorola.

N'ayant pas réussi à convaincre Motorola d'adopter la technologie du programme Vanguard, Kittlaus quitte l'entreprise en 2007 pour devenir entrepreneur au sein du SRI. Peu de temps après, Cheyer le rejoint avec d'autres ingénieurs de l'institut dans le but de créer un assistant mobile. Le nom de code du produit est alors HAL, en référence au film 2001, l'Odyssée de l'espace. Le slogan qui accompagne HAL est alors : « HAL est de retour — mais cette fois il est bon ».

2007 est également l'année du lancement de l'iPhone, terminal qui se prête parfaitement à HAL. Cheyer et Kittlaus fondent alors Siri et s'adjoignent les services de Tom Gruber comme directeur de la technologie. La jeune pousse, forte de l'expérience acquise auparavant avec CALO et Vanguard, ne cherche pas à construire un meilleur moteur de recherche. L'équipe veut créer un paradigme nouveau pour accéder à l'Internet : un moteur qui permet à une intelligence artificielle de donner les réponses que les gens attendent, plutôt que d'afficher des ressources pertinentes à consulter soi-même. Un do engine (moteur d'action) plutôt qu'un search engine (moteur de recherche).


De gauche à droite : Cheyer, Kittlaus et Gruber

Cheyer, Kittlaus et leurs collègues s'emploient même à faire de Siri un assistant qui pourrait anticiper les besoins de l'utilisateur, et répondre à ces besoins. Ainsi Siri est capable de proposer par lui-même des solutions à certains problèmes. Un vol est annulé ? L'assistant peut afficher une liste de trains prêts à partir ou des services de locations de voiture.

Rétrospectivement, cela fait indéniablement penser à Google Now, l'assistant de Google qui centralise toutes les données personnelles de l'utilisateur. Google Now est ainsi capable d'alerter l'utilisateur qu'il sera en retard à un rendez-vous (plus d'informations dans le test de la Nexus 7 et d'Android 4.1 Jelly Bean). En 2008, Siri est à des années-lumière de la concurrence et la start-up lève 8,5 millions de dollars.

Les développeurs envisagent une architecture qui permettrait d'utiliser Siri n'importe où sur le web via une API. Adjoindre différentes personnalités à l'assistant, comme on le fait en achetant des accessoires pour un personnage de jeux vidéo via des achats in-app, fait aussi partie des plans de la start-up. Et à cette époque, le mot fuck est toujours dans le dictionnaire de Siri.

En 2010, trois semaines après le lancement de l'application sur iPhone, Kittlaus reçoit un coup de téléphone de Steve Jobs qui veut le rencontrer le lendemain. La rencontre a lieu chez Jobs à Palo Alto et dure trois heures. Le patron d'Apple explique alors que Scott Forstall et lui-même sont intéressés par la reconnaissance vocale depuis déjà un moment et que Siri marque un changement de paradigme.

Mais Apple n'est pas la seule à être intéressée. Verizon, un des plus importants opérateurs américains, a signé quelques mois plus tôt un contrat avec la start-up pour installer par défaut Siri sur tous les smartphones Android. Un contrat qui ne sera jamais mis à exécution, Apple achète la start-up en avril 200 millions de dollars et fait de Siri une exclusivité iPhone.

L'application et son équipe de 24 personnes rejoignent alors Cupertino. Et l'assistant perd de nombreuses fonctionnalités liées à des services externes au passage. Alors que l'application originale permettait de réserver une table dans un restaurant, il faudra attendre un an pour qu'Apple réintègre cette fonction. Les négociations entre les anciens partenaires de Siri et Apple sont assurément d'une autre ampleur que les discussions qui avaient eu lieu par le passé entre eux et la petite entreprise qui comptait une vingtaine de personnes. De plus, Apple concentre ses efforts pour localiser Siri dans différentes langues, ralentissant les progrès dans les autres domaines.

Pour Gary Morgenthaler, un investisseur qui s'était engagé dans Siri et qui a pu l'essayer avant son acquisition, son évolution est « décevante ». Certains s'interrogent maintenant sur la place de Siri, toujours en bêta, chez Apple. Pratiquement tous ses soutiens les plus importants sont partis : Steve Jobs est décédé le 5 octobre 2011, le lendemain de la présentation de l'iPhone 4S qui inaugura le Siri made in Apple ; Dag Kittlaus a quitté l'entreprise trois semaines plus tard ; Luc Julia qui prit sa place comme responsable de Siri n'est resté que 10 mois ; Adam Cheyer est parti en septembre 2012 ; et Scott Forstall a été remercié un mois plus tard. Ne reste donc que Tom Gruber comme personnage historique.

Apple ne semble tout de même pas rester les bras croisés : elle a débauché en octobre dernier William Stasior, l'homme qui est en charge du moteur de recherche d'Amazon depuis 2003. Et il se murmure que Siri pourrait rejoindre OS X...

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#Siri
avatar eipem | 
J'aime bien Siri. Il est super efficace pour certaines tâches comme la création de rappels, d'événements iCal, de réveils ou de Timer, et même pour lancer de la musique alors que le titre est en Anglais. Mais il est aussi très souvent frustrant quand il ne comprend pas ce qu'on lui demande. Et c'est agaçant de le voir bloquer comme un con quand il répond à côté de la plaque. T'as envie de lui dire "ta gueule et recommence". De même, la base de données de Rotten Tomatoes est un non sens complet quand on voit Allociné... Et Wolfram Alpha est toujours absent en Français. Bref, Siri est en Bêta, Siri est un bêta, Et Siri n'est pas assez bon pour un produit Apple. C'est dommage parce que l'idée est intéressante. Mieux vaut se limiter à ce qu'il sait faire correctement pour éviter les frustrations.
avatar Human-Fly | 
Avec moi Siri est complètement con, sur iPad. Sa réponse la plus fréquente est : "Je ne m'y attendais pas à celle-là. Et si nous recherchions sur internet bla bla..." Après quand je lui demande de lancer une recherche quelconque sur Internet, il veut souvent me diriger vers "le merveilleux site d'Apple". Il est quand même très limité.
avatar Fumomono | 
Moi sur mon iPhone 5 je me sers assez souvent de SIRI pour envoyer des messages par le biais des oreillettes et même dans des espaces assez (voir très) bruyants Siri comprend très bien ce que je lui demande et fait rarement des fautes.
avatar Guillaumeg33 | 
C'est en effet très frustrant de voir à quel point la compréhension des diverses langues par la machine ne fasse pas l'objet d'un programme inter-disciplinaire à l'échelle du globe.
avatar Dewy | 
Franchement, si Apple laissait un peu + de liberté aux developpeurs pour utiliser Siri je suis sur qu'on aurait un assistant deja beaucoup + effiface.. Mais bon c'est Apple
avatar Cratès | 
On va pas se plaindre qu'Apple ait favorisé l'internationalisation de Siri quand on voit que Google Now n'est pas utilisable chez nous ... De mon côté, je m'en sers pour le réveil, les rendez vous, les rappels.
avatar napuconcture | 
Google Now fonctionne très bien en france, il y a juste quelques cartes qui n'existent pas (style : sport, billet d'embarquement), pour le reste ça marche.
avatar Lou117 | 
A l'usage, Google Now est à des années lumières de Siri sur le côté pratique. Après la recherche cognitive est meilleure sur Siri à mon sens.
avatar titistardust | 
@Lemmings : 'A l'usage, Google Now est à des années lumières de Siri sur le côté pratique. ' Ben tient donc, rien que ça !
avatar Lou117 | 
Oui, clairement. A la différence de Siri qui ne se contente que de comprendre et interpréter tes demandes, Google Now devance tes besoins. Ainsi, si je cherche une adresse ou que j'ai un rdv avec une adresse, il m'envoi automatiquement l'itinéraire peu de temps avant le rdv ou juste après la recherche. De même, si une information importante arrive, il me prévient à l'avance. Enfin, si je cherche un resto ou autre, je n'ai pas besoin de saisir quoi que ce soit, les fiches sont affichées directement dans Now avec la géolocalisation. Bref, sur tout un tas de cas pratiques, Google Now va bien plus loin que Siri. Enfin autres atouts non négligeable, tu peux saisir tes recherches au clavier, et pas uniquement à la voix (ce qui est parfois plus précis), et la reco vocale fonctionne même sans connexion. A l'opposé, Siri est bien plus "malin" dans ses réponses et comprends 1000x mieux le français.
avatar Abudah237 | 
Ca commence à être fatiguant d'entendre des louanges de Google sur tout et n'importe quoi et du bash d'Apple ici y compris. Ce sur j'ai vu de Google Now est loin de l'avoir impressionné, et je me sert de Siri tous les jours.
avatar kingpuco | 
Je me sers de Siri tous les jours pour la météo, envoyer des messages quand il pleut (avec mon oreillette Bluetooth), pour mes réveils, mes événements du calendrier, passer des coups de fils, faire des rappels…
avatar titistardust | 
De mon côté j'aime bien aussi : très pratique et précis. Outre la qualité de l'interprétation, une amélioration énorme serait de déclencher Siri sans action mécanique sur l'appareil ! À la cuisine : «Siri, un minuteur de 12 minutes ! Et que ça saute ! »
avatar capvarou | 
Siri bien qu'il soit en bêta, fonctionne très bien et est assez efficace. L'humour ajouté à son efficacité lui confère une certaine personnalité. " d'accord je vous le rappellerais ... Si je n'oublie pas ! " S-Voice en comparaison n'est pas performant et n'a aucun humour. Très souvent il vous invite à faire une recherche sur Internet. La voix en elle même est assez énervante aussi. On peut reprocher ce qu'on veut à Siri mais aujourd'hui il n'y a rien de plus efficace ( ni plus sympa). Pour moi cet assistant est une réussite. J'ai bien plus souvent envie de demander un service à Siri qu'à S-Voice ( qui n'a pas fait de progrès notables depuis son apparition ).
avatar Lou117 | 
S Voice est merdique, point. :)
avatar guiz913 | 
Sur mon iphone je n'utilise jamais Siri mais sur mon nexus j'utilise souvent la recherche google en vocal...pas qu'il sot plus performant,mais parce que il ne me parle pas! Non parce que c'est drôle 2 sec l'humour de siri, moi je veux qu'il soit rapide et performant,et pas qu'il me réponde des inepties...idem pour l'écriture de sms ou whats app (la je parle de la reconnaissance vocale pas de siri) sur iphone faut validé ce que tu dis pour voir le message tandis que sur google il te l'écrit en temps réel... Mais enfin de compte les 2 sont gadgets, et si Siri pouvait ne rien dire, je l'utiliserais auant que mon google search (suis android en privé et ios en pro donc j'utilise les 2 à la même fréquence je dirais)
avatar Azety | 
Bon, vous êtes tous passé à côté de la news. On vous a annoncé que que Siri est une conception du DARPA, les mêmes qui sont derrière Facebook. Maintenant, je vous laisse faire les recherches sur le DARPA et trouver les ambitions cachées derrière ces technos "livrées" au public...

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