Après une envolée au plus fort de la pandémie, le secteur du jeu sur mobiles connaît une baisse pour la première fois de sa courte histoire. Certains acteurs restent optimistes, mais pour d'autres acteurs les perspectives sont plus floues.
L'année 2022 devrait afficher une baisse de 6,4 % du chiffre d'affaires du jeu sur mobile, d'après deux cabinets d'études, Newzoo et Ampere Analysis, repris par le Financial Times. Ce marché évalué à 100 milliards de dollars — qui pèse pour la moitié du CA de l'industrie du jeu vidéo — se dirigerait vers les 92 milliards.
Cela reste conséquent, mais c'est un reflux après deux années où la pandémie a joué un rôle moteur dans la progression des résultats. Le secteur du jeu sur mobiles n'en est pas au point de revenir aux résultats d'avant 2020, toutefois les projections pour 2022 tablent sur une baisse des revenus pour les deux boutiques d'Apple et de Google. La seconde reprendrait un peu du poil de la bête en 2023 tandis que l'App Store continuerait se stagner avant une possible reprise générale à compter de 2024 seulement.
Les achats In-Apps ont fondu de 15 à 20 % au sein de certains gros jeux, d'après les informations obtenues par le quotidien. La pandémie et les confinements avaient poussé les ventes puis la situation économique s'est dégradée.
Ce n'est pas la seule raison avancée. Chacun y va de son explication et de son coupable. Les uns, comme le studio Voodoo, éditeur de jeux vite développés et vite joués (comme Helix Jump, Paper.io 2, Hole.io), financés par de la publicité, citent la hausse des coûts de celle-ci. Il devient plus onéreux de fidéliser les joueurs avec ce genre de titres. Le studio doit vouloir aller vers des jeux plus classiques à même de retenir les joueurs sur la durée.
Un autre éditeur estime qu'il y a une forme de saturation, l'offre est trop abondante, l'innovation ralentit et les grands titres désormais bien installés sont difficiles à bousculer.
Les initiatives d'Apple pour limiter le suivi publicitaire sont également pointées du doigt, puisqu'il devient plus compliqué de connaître et exploiter le profil des joueurs à des fins marketing.
La décision d'Apple de multiplier les paliers de prix sur l'App Store, même si elle répond d'abord à une injonction judiciaire, pourrait être une réponse à ce marasme, en offrant aux éditeurs beaucoup plus de latitude dans leurs offres tarifaires.
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À rebours de ce pessimisme, l'éditeur de Candy Crush, Activision Blizzard, a vu ses résultats augmenter en fin d'année. L'explication ? Une marque forte, bien installée et un jeu qui continue d'évoluer pour retenir les plus accros des joueurs, explique au FT son responsable, Todd Green : « Lorsqu'il y a des milliers et des milliers de jeux qui sortent tous les jours, posséder une marque forte et reconnue a toujours été très précieux pour nous ». Il cite aussi le travail « méticuleux » effectué depuis des années par ses équipes pour améliorer le jeu.
À partir de quand les choses vont-elles s'améliorer ? La situation étant extrêmement volatile, il n'y a pas de réponse bien précise. Le responsable du studio israélien Playtika, qui vient de licencier 600 personnes sur un effectif de 4 100 dans le monde, voit la récession perdurer encore au moins 18 mois.
Un autre se garde de toute estimation, jugeant le marché trop imprévisible. Quand l'un de ses pairs chez Take-Two s'attend à 3 à 6 mois encore de fort tangage et une accalmie pour la fin 2023.