L’ascension fulgurante de Wiko, fondé en 2011 à Marseille et qui s’est hissé rapidement au deuxième rang des vendeurs de smartphones en France (hors marché des smartphones subventionnés par les opérateurs), éveille bien des soupçons. La campagne d’affichage « Cocowiko » qui prolifère sur les abribus des grandes villes met en avant le caractère hexagonal de l’entreprise : « la 2e marque de mobiles la plus vendue est française ».
Mais ce n’est un secret pour personne : derrière Wiko, se tient Tinno, un fabricant chinois de smartphones, qui est devenu l’actionnaire principal de la petite société française devenue un joueur important du secteur (lire : Wiko : une marque française made in China). Modèle économique, rapport qualité/prix, distribution, polémique sur la marque... Nous revenons sur tous ces sujets avec Hervé Vaillant, le porte-parole directeur des relations presse de Wiko.
Quels sont les effectifs de Wiko ?
Laurent Dahan (Président fondateur) et Michel Assadourian (Directeur Général) ont commencé l’aventure début 2011 avec une seule employée qui est toujours chez Wiko aujourd’hui, comme la quasi-totalité des collaborateurs recrutés depuis. A présent nous sommes 150 en France (au siège social situé à Marseille) et plus de 350 dans le monde.
Comment se répartissent les effectifs de l’entreprise ?
Pour le commerce et la vente, 30%. Le pourcentage est le même pour les services support (dont service administratif & financier, les ressources humaines, le SAV, le service clients, l’informatique et le juridique). Le marketing & communication compte pour 15%, idem pour la R&D et la conception des produits. Enfin, la logistique et la distribution représente 10%.
Pouvez-vous nous donner une idée des performances financières de Wiko ?
Le chiffre d’affaires n’est pas le seul indicateur de la réalité économique de Wiko, il ne reflète pas la dynamique concurrentielle. Ce sont les volumes qui disent la performance. Pour votre information, sur notre premier marché, la France, nous sommes numéro 2 des ventes de smartphones et mobiles traditionnels sur l’open-market (hors subventions opérateur, ndlr), ce qui représente 17,8 % de part de marché (selon l’institut GFK). En 2014, nous avons vendu plus de 5 millions de terminaux. En ce qui concerne notre chiffre d’affaires, il s’élève à 350 millions d'euros pour 2014, dont 45% sur la France. Nous projetons pour 2015 un CA à 650 millions dont 30 à 35% pour la France.
Quelle est la marge de manœuvre opérationnelle de Wiko par rapport à Tinno ? Est-ce que, par exemple, Wiko pourrait s’adresser à un autre fournisseur de smartphones ?
De par la spécialisation de l’économie globale, chaque pays a son avantage concurrentiel et ce, dans différents domaines. La Chine possède un avantage indéniable dans la production de téléphones portables. Afin de garantir le meilleur équilibre entre qualité et coût pour nous consommateurs, nous avons développé un partenariat fort avec Tinno. Ce dernier est notre partenaire industriel et l’actionnaire majoritaire de notre société. Nous avons convenu ensemble que Tinno serait notre partenaire industriel exclusif et que nous ne serions pas présents dans les mêmes pays. Cela serait préjudiciable pour Wiko, comme pour Tinno.
Comment se déroule en pratique le fonctionnement de Wiko avec Tinno ? Est-ce que Wiko se contente de choisir sur catalogue, ou est-ce que Wiko peut demander des modifications ?
Tinno n’est pas qu’un simple fournisseur de téléphones portables pour Wiko. C’est véritablement notre partenaire industriel. En revanche, c’est Wiko qui définit les produits à partir d’un cahier des charges extrêmement détaillé qui comprend le design, l’ergonomie et les 250 composants du téléphone. Ce partenariat fort avec le groupe Tinno nous permet une ultra-flexibilité, une évolution permanente dans l’innovation, ainsi qu’un contrôle de la qualité sur toute la chaîne de production et les composants.
Quelle est la plus-value des smartphones Wiko sur le plan matériel et logiciel ?
L’un de nos engagements fondamentaux est de travailler le juste équilibre entre technologie, design, qualité et prix. Quand nous avons lancé notre marque en 2011, le marché était dominé à 95% par les opérateurs qui vendaient les téléphones mobiles exclusivement avec des packs subventionnés. Le consommateur n’avait absolument aucune idée de la valeur réelle de son mobile. Il y avait une véritable déconnexion entre la réalité du prix des produits et la perception du consommateur. Camouflé dans les packs opérateurs, ils achetaient des produits très souvent démesurés pour l’usage qu’ils en faisaient. Proposer une technologie accessible, au bon moment, est notre principal objectif. Nous proposons à nos clients la juste technologie (celle dont ils ont réellement besoin) au bon moment. Nous proposons à nos clients le meilleur de la technologie, avec la meilleure qualité possible, au meilleur prix.
Une fois le cahier des charges défini, en combien de temps va-t-on retrouver le smartphone dans le réseau de distribution ?
Cela dépend de la complexité du produit. En général il faut compter environ six mois (et c’est là une des grandes forces de Wiko). Maintenant pour certains téléphones très complexes (comme le Highway Pure : le smartphone le plus fin du monde), on peut avoir jusqu’à un an de développement.
Peut-on comparer Wiko aux autres constructeurs de smartphones comme Apple, Samsung, etc. ? Wiko n’est-il pas qu’un distributeur de smartphones chinois ?
Vous pouvez parfaitement comparer Wiko à Apple et Samsung dans la mesure où comme eux, nous définissons le design et les composants de nos téléphones et que nous les faisons fabriquer dans un site de production situé à Shenzhen en Chine. Tous les smartphones Apple et les smartphones haut de gamme de Samsung sont fabriqués à Shenzen. On ne dit pas pour autant qu’Apple et Samsung ne sont qu’un distributeur de smartphones chinois (NDLR : dans les faits, c’est beaucoup plus compliqué : Apple et Samsung développent les technologies et les composants de leurs smartphones en interne. La chaîne de production chinoise des deux constructeurs se contente d’assembler les composants). Nous avons la chance d’avoir un partenaire industriel qui est devenu en quelques années l’un des plus gros fabricants de téléphones mobiles dans le monde. Grâce à lui nous bénéficions d’économies d’échelle incroyables tout en maitrisant totalement toute la chaine de conception et de fabrication de nos produits.
Le modèle économique de Wiko est basé sur la vente de smartphones chez des revendeurs autre que les opérateurs, sans subvention. Cela va-t-il changer ?
Absolument. Nous étions à nos débuts présents uniquement sur les segments « entrée de gamme » et « moyen de gamme ». De ce fait nous n’étions présents que dans la grande distribution alimentaire et sur internet. À présent nous proposons une large gamme de produits qui couvre tous les usages, du plus simple au plus technophile. Nous sommes actuellement en négociation avec les opérateurs pour rentrer très prochainement dans leurs boutiques.
La campagne d’affichage actuelle selon laquelle Wiko, marque française, est la 2e marque de mobiles la plus vendue ne joue-t-elle pas un peu sur les mots ? Au fond, c’est un peu cela qu’on reproche à cette entreprise dont les capitaux sont à très grande majorité étrangers.
Wiko est une marque française. Comme la majorité des marques françaises internationales, nous avons un partenaire industriel international, en l’occurrence le groupe chinois Tinno, qui se trouve être également l’actionnaire majoritaire de notre entreprise. Ceci dit, cela ne change en rien l’identité française de notre marque. Wiko définit le produit, décide des éléments qui le composent et prend toutes les décisions sur la façon de le commercialiser. Son développement à l’international est décidé et orchestré depuis la France. Wiko est né en France. Son premier et plus fort développement est en France. Wiko est une marque française basée à Marseille.