Tony Fadell se souvient de l'iPhone il y a 10 ans

Florian Innocente |

Tony Fadell a partagé avec la BBC quelques anecdotes sur la création de l’iPhone. Lui qui fut l’un des artisans de l’iPod a dirigé l’une des deux équipes qui cogitaient sur le futur téléphone d’Apple. Ce n’est pas la sienne qui a eu gain de cause (il était parti d’une base d’iPod, sans utiliser OS X) mais il a suivi ce chantier de près.

Tony Fadell, Jonathan Ive et Steve Jobs

Le prototype égaré

Il raconte par exemple qu’Apple a bien failli perdre un prototype du premier iPhone. Pas après avoir été oublié dans un bar comme ce fut le cas de l’iPhone 4, mais lors d’un voyage. En sortant de l’avion, Fadell s’est rendu compte que son iPhone avait disparu de sa poche.

« Je transpirais à grosses gouttes », raconte-t-il, car il allait devoir expliquer cela à Steve Jobs. Finalement, au bout de deux heures d’une recherche dont certains des participants avaient été maintenus dans l’ignorance de ce qu’ils devaient retrouver, le prototype fut localisé entre deux fauteuils. Il avait simplement glissé de sa poche.

La voiture dévalisée

Autre frayeur, un jour à Malmö en Suède. Fadell et d’autres employés d’Apple se promenaient un peu partout dans le monde pour rencontrer des spécialistes en télécom et téléphones. Un soir, alors qu’ils s’étaient arrêtés moins d’une demi-heure pour se restaurer, le contenu de leurs véhicules fut dérobé. Tout avait été emporté, pas un seul bagage ou sacoche n’avait été laissé. « On pouvait jurer qu’il s’agissait d’espionnage industriel [car] ils savaient que l’on préparait un téléphone », se remémore-t-il. Par chance, il n’y a avait pas beaucoup de secrets d’enfermés dans ces bagages.

Un clavier physique banni par Jobs

L’iPhone devait-il ou non avoir un clavier ? On se souvient que durant la présentation de l’iPhone, son absence était présentée comme une évidence par Steve Jobs. « La bagarre autour de cette question a duré environ quatre mois, se souvient Fadell. Cette situation était devenue très moche. »

Jobs était absolument pour la suppression du clavier et il avait décidé d’une règle à l’encontre de ceux qui ne partageaient pas son point de vue : « Tant que vous ne serez pas d’accord avec nous, vous ne reviendrez pas dans cette pièce. Si vous ne voulez pas être dans l’équipe, eh bien ne restez pas là ». Cela a eu pour effet de stopper net toutes les contestations sur cette question. « Une personne quitta la pièce et toutes les autres se mirent au garde-à-vous. »

Ce qui ne veut pas dire que tout le monde était convaincu. Certains restaient persuadés que c’était une erreur de ne pas faire comme BlackBerry, qui restait le modèle à battre : « Il fallait évaluer tous les risques qu’il y avait à n’utiliser qu’un écran tactile, et trouver une solution à tous les cas de figure ».

L’un des actes de désobéissance discrète à Steve Jobs fut de s’assurer, sans le lui dire, que l’iPhone marcherait quand même avec un stylet. Au cas où.


Nous savions que c’était la bonne chose à faire, même si la philosophie du produit telle que décidée par Steve était qu’il pouvait être utilisé uniquement avec les doigts. Nous savions qu’arriverait un jour où l’on aurait besoin d’un stylet. Nous l’avons fait en coulisses, sans qu’il le sache, sinon il m’aurait arraché la tête.


Le rire de Ballmer

Enfin, il y a eu ce rire de Steve Ballmer à l’annonce de l’iPhone et de son prix : « Il nous a bien fait rire. On a bien ri aussi de BlackBerry. Chaque fois que je conçois un nouveau produit — et j’ai appris ça de Steve Jobs — si les gens en place se marrent, si la presse se moque de vous, vous pouvez vous dire : "j’ai touché un point sensible" ».

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avatar Macuserman | 

J'adore !! Super interview !

avatar flo3183 | 

À Malmö aussi... quelle idée... les ricains n'étaient pas au courant que l'Europe n'en avait rien à faire de l'intégration des immigrés?!...

avatar louisb | 

Génial le Ballmer, un génie !

avatar iVador | 

Ballmer ... qui a encore eu tout faux .... une fois de plus !

avatar deltiox | 

@iVador

C'est pour moi une preuve que ces PDG de tres grandes compagnies ne méritent pas leurs salaires.

Ils ne savent pas produire ni vendre
Et sont capables de rire et balayer d'un revers de main un nouveau produit qui sera leur future perte (Zune et les téléphones sous Windows mobile en savent qqchose) le tout en parlant de vision et de stratégie...

Ils sont trop payés, sans aucun contradicteur en interne et finissent par être totalement déconnectés des réalités

avatar Cybounet | 

@deltiox

Entièrement d'accord! Et Tim Cook en est la preuve

avatar youpla77 | 

"sans aucun contradicteur en interne"
C'est pas justement ce que dit Fadell sur Jobs : "Tant que vous ne serez pas d’accord avec nous, vous ne reviendrez pas dans cette pièce." puis « Une personne quitta la pièce et toutes les autres se mirent au garde-à-vous. »

Heureusement que certains ont réussi à convaincre Jobs que les apps tierces de l'iPhone étaient nécessaires et pas seulement de se contenter de web apps...

avatar béber1 | 

youpla77
"Heureusement que certains ont réussi à convaincre Jobs que les apps tierces de l'iPhone étaient nécessaires et pas seulement de se contenter de web apps…"

Le point essentiel est sans doute le portage réussi d'OS X mobile, qui a conditionné tout le reste, comme le SDK.

Sinon, il ne faut pas tomber dans la caricature à propos de Jobs.
Comme tout boss soucieux de la réussite commerciale de ses produits et de sa boite, il n'était pas fermé aux bonnes idées, à condition qu'elles soient meilleures ou plus pertinentes que les siennes, avec une exigence qui était surtout d'ordre pratique : aller à l'essentiel et éviter de se perdre dans une profusion de propositions qui pollue et qui complique.

Par contre, en ce qui concerne le tout-écran, là c'était de l'ordre de la conviction :
Eviter autant que possible tout ce qui est de l'ordre de la complication

avatar PiRMeZuR | 

@deltiox

C'est marrant parce qu'on peut appliquer les mêmes commentaires à l'attitude de Jobs présentée dans l'article.

Mais je suppose que ces reproches ne s'appliquent que de manière sélective.

avatar adixya | 

C'est pas ça, c'est que Jobs compensait son autoritarisme par son talent ce qui n'était pas le cas de ballmer, qui n'a pas fait d'étincelle non plus.

avatar Trillot | 

Il y en a qui ont raison (même si ce n'est pas tout le temps), c'est toute la différence.

avatar deltiox | 

@PiRMeZuR

Jobs a cofonde/créé son entreprise
Ballmer et bien d'autres PDG sont des employés de luxe, mais après un certain temps (aussi bons soient ils à un moment) ils se paient des sommes stratosphériques et n'ont plus la moindre vision stratégique utile
Ballmer sur la fin fut une catastrophe pour MS et meme si l'entreprise a beaucoup gagné de cash, il a complètement manqué le marché du mobile et sans jamais se remettre en cause et a fini par se faire virer

avatar stemou75 | 

@deltiox
Steve Ballmer est exécrable et je ne l'aime pas du tout mais il faut arrêter de dire des sottises. Ballmer a cofondé Microsoft avec Bill Gates et il était le deuxième plus gros actionnaire personnel après Gates.
Son talent était commercial, c'était un vendeur et un très bon négociateur. Alors que Gates et Jobs sont intéressés par les logiciels et les produits. Mais les bons vendeurs ne font pas forcément de bons PDG et même si le CA de Microsoft a explosé parce que le secteur a explosé, Microsoft est quand même aujourd'hui dans une situation bien inférieure qu'en 2000 quand il dominait le secteur dans tous les domaines.

avatar cnour | 

Un homme très intelligent et professionnel. Je l'ai rencontré depuis quelques semaines au Liban où il donnait une conférence à Lebanese American University.

avatar daxr1der | 

C'est un boys band sur la photo ?

avatar Katsini | 

@Hertzfield

Très bon !????

avatar daxr1der | 

@Hertzfield

lol parce que sur la photo il fait imbu de sa personne

avatar NAVY7GAS | 

Ballmer à la peine - Ca doit être dur tous les jours de ne pas arriver à décoller cette étiquette de "u loose looser"

"..Il m'aurait arraché la tête!" - Steve Jobs fatality
Steve Jobs brutality
Finish him! !

avatar Trillot | 

Ballmer ne s'est pas retiré de lui-même, on l'a vidé.

Il était exécrable, prétentieux, arrogant et a fait perdre beaucoup à Microsoft en laissant s'échapper le marché du téléphone, c'est à dire le marché le plus explosif depuis 15 ans.

avatar r e m y | 

@Trillot

"....le marché le plus explosif depuis 15 ans."
C'est exactement le constat du patron de Samsung en fin d'année dernière.

avatar béber1 | 

interview parcellaire et incomplète.
J'aurais bien aimer savoir comment les débats ont pu se dérouler par la suite pour en arriver au prototype du terminal-ecran tactile (sans stylet) qui sera présenté à la keynote.

Faddell dit que le clavier ne faisait plus discussion, mais j'aurais bien aimé savoir ce qu'il en était des autres possibilités d'utilisations qui ont dû être évoquées.

Quoiqu'il en soit, on voit l'intransigeance de Jobs qui a balayé au final la possibilité d'un clavier physique et celle d'un stylet d'appoint.
Ce qui était de loin le meilleur choix pour un iPhone avec un écran 3,5", et pour une utilisation claire et rapide dans la mobilité.

Rien de mieux que le doigt sur des interface claires et simplifiées avec de gros boutons sur des options réduites. Et rien de mieux que le plus grand écran possible pour un mini-terminal de consultation internet et multi-média. (ce qui conduisait mécaniquement à l'agrandissement des iPhones ultérieurs)
Donc exit clavier, qui de plus n'est utilisable qu'en appoint.

J'aurais bien aimé avoir des infos sur le développement d'OS X "Phone".
Car c'est la pierre angulaire qui a fait basculer l'iPhone vers le mini-terminal de poche multi-applicatif, et de ce fait, vers le marché/dev des apps, relayé par la suite par l'iPad

avatar adixya | 

Et moi je veux 100 milliards d'euros sur mon compte en banque. Mais ça n'arrive pas. Life is a bitch.

avatar malcolmZ07 | 

@rolmeyer

Ils ont remboursé de 200$ pour contrer Palm dans mes souvenir

sinon pour ceux que ça intéresse: http://classic.marshall.usc.edu/assets/025/7543.pdf
un article écrit en 2007

avatar marenostrum | 

c'était Steve le seul clairvoyant. sans lui seront dans la ...

avatar armandgz123 | 

Moi je me souviendrais du prix de l'iPhone dans 30 ans.

avatar marenostrum | 

c'est pas cher pour ce que c'est. heureusement ils le produisent par millions, pour en pouvoir acheter. ils exploitent toute la planète pour le fabriquer, commençant par les meilleurs cerveaux jusqu'à la main d'oeuvre la moins chère.

avatar Bovmuche | 

C'est vrai que, parmi tous ses échecs, il a aussi eu quelques succès mais durant toute sa carrière il a été pris par les c.... par Jobs. Il a du en faire des spasmes chaque fois qu'il entendait le mot Apple. Et il a du en avaler des couleuvres. Malheureusement pour lui il était en poste lors des golden years d'Apple.

avatar Eurylaime | 

C'est toujours facile de crier au coup de génie rétrospectivement, l'iPhone aurait pu être un bide monumental pour Apple.

avatar béber1 | 

Eurylaime
"C'est toujours facile de crier au coup de génie rétrospectivement, l'iPhone aurait pu être un bide monumental pour Apple."

aurait pu, comme le David de Michel-Ange à l'époque romane où il aurait été sans doute détruit pour cause de provocation.
Il y a une adéquation entre un produit-œuvre et une époque.

L'iPhone, qui se proposait comme un mini-terminal avec un navigateur internet (donc plein-écran pour visualisation et interaction tactile un minimum confortable. Exit le clavier: y'a des logiques design de form-factor), donc un internet "mobile" disponible dans la main, cet iPhone avait besoin de réseaux évolués (3G), assurant des débits suffisants, et d'une couverture géographique suffisante pour une expérience "mobile" un minimum optimale.

En 2000, cela n'aurait pas été suffisant, et il aurait végété.
Mais outre l'adéquation technologico-temporelle (je m'excuse de la formulation, j'ai pas mieux) le concept en lui-même était fort, car il ne sagissait plus de téléphone mais de mini-terminal OS X (Apple faisait-elle autre chose ?) mobile multi-fonctionnel (d'où la logique des apps qui a prévalu sur les web-apps) qui utilisaient les réseaux comme de simples tuyaux pour ses services connectés et ses applications numériques.
Encore fallait-il que ceux-ci soient un minimum à maturité.

Le génie de la synthèse de Jobs, c'est d'avoir été un "metteur en scène" de produit, sachant combiner des composants existants dans une réalisation originale et pertinente, c'est d'avoir flairé l'opportunité que lui offrait l'iPod comme tremplin à ses futurs mobiles, d'avoir "épuré" le concept de "mobile" en un mini-terminal qui soit une extension de la micro-informatique, et attendu le juste moment pour lancer quand les conditions le permettaient.

Le clou ça a été le portage (rapide) de Google Maps -voulu par Jobs- pour montrer les applications pratiques, comme la commande des 3000 cafés au Starbuck du coin.
Là, une nouvelle ère d'interactions s'ouvrait.

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