Yvonne Gonzalez Rogers, la juge qui préside aux débats entre Apple et Epic Games pendant le procès opposant les deux entreprises, est un peu comme nous tous : elle ne comprend pas les règles édictées par la Pomme pour les apps de jeux en streaming. Après avoir freiné des quatre fers sur la question, Apple a fini par autoriser ces services mais au prix de conditions si drastiques que Microsoft, Google, Nvidia et les autres ont préféré passer par Safari et une web app (lire à ce propos notre aperçu du Xbox Game Cloud).
Une de ces règles est qu'Apple doit examiner chacun des jeux proposés dans les catalogues de ces services, des jeux qui doivent donc être soumis sous la forme d'une app autonome. Quitte à ce qu'elle ne soit qu'une coquille vide permettant de lancer le titre depuis le nuage (lire : Apple autorise les services de jeux vidéo en streaming, à ses conditions).
Durant l'audition de Lori Wright, vice-présidente de Microsoft en charge du développement de l'activité Xbox, la juge a exprimé une certaine confusion. Pourquoi Apple requiert-elle que chaque jeu soit proposé sous la forme d'une app, alors que « je peux utiliser Netflix dans une app native et je peux y voir beaucoup de films et de séries TV différentes [dans la même app, NDR] » ? La représentante de Microsoft a confirmé vouloir utiliser le « modèle Netflix » pour son service de jeux en streaming.
Pourtant, tout au long du développement de l'app iOS pour xCloud (l'ancien nom du Xbox Cloud Gaming), qui n'est finalement jamais sortie, Apple avait indiqué que le modèle à suivre était celui de Netflix ou d'Audible. « Ce qui aurait été très bien pour nous, mais nous avons finalement appris que ce n'était pas le bon modèle pour nous ».
Spotify propose un large catalogue de chansons, Netflix des films. « Pourquoi n'avions nous plus droit de faire une app unique avec beaucoup de jeux ? ». L'éditeur a passé trois à quatre mois à tenter de démêler le problème.
Ce qui était maintenant demandé par Apple, c'est à dire que chaque jeu soit une app, était impensable. La logistique était trop lourde : pour une mise à jour d'un jeu, tous les jeux au catalogue devaient la recevoir. Et si Microsoft retirait un jeu de son offre, il y aurait eu une « app morte » sur l'iPhone. « Nous pensions que c'était une mauvaise expérience pour les joueurs ». Quant à la version TestFlight de xCloud, idem, il fallait la dégager car Apple estimait qu'elle ne respectait pas les règles.
« Apple autorise Netflix à faire ce que Netflix fait, mais Apple ne nous permet pas de faire ce que Netflix fait », a déploré Wright. Visiblement, seule Apple est capable de faire le distinguo entre le flux vidéo d'un épisode de série télé et le flux vidéo d'un jeu. Quant à la solution alternative des web apps, elle se révèle plutôt solide, mais une web app n'est pas tout à fait une application native. Elle n'a pas accès aux notifications, par exemple. Cet échange aura au moins eu le mérite de pointer du doigt une des bizarreries de l'App Store.