Lors d’une conférence Vanity Fair à laquelle il a été invité en compagnie de Jony Ive (nous y reviendrons bien évidemment), Jimmy Iovine n’a pas manqué de faire la promotion d’Apple Music. Surtout, il a brodé autour de l’industrie de la musique, un milieu qu’il connait très bien, en s’interrogeant sur la culture du tout gratuit.
« La gratuité est un vrai problème. Tout ce qui tourne autour du freemium, on en a peut-être eu besoin à un moment. Mais maintenant, c’est une escroquerie », a-t-il déclaré avec son franc-parler habituel. Spotify, avec son modèle économique qui mixe abonnements payants et écoute gratuite financée par la publicité, peut se sentir visé même si Iovine n’a pas cité le nom de son principal concurrent.
« Ces entreprises se construisent un fichier clients sur le dos des artistes », estime le dirigeant, et ce n’est pas le chemin suivi par Apple, alors que le constructeur aurait pu recruter des millions d’utilisateurs en leur proposant une offre gratuite ; Apple Music comprend toutefois trois mois d’écoute gratuite. Lors de la discussion, un des modérateurs n’a d’ailleurs pas manqué de rappeler à Jimmy Iovine l’« affaire » Taylor Swift : l’artiste avait rué dans les brancards contre cette formule dans laquelle les chanteurs et compositeurs ne gagnaient rien (lire : Le juste combat de Taylor Swift contre le dragon Apple Music).
Comment se fait-il qu’un spécialiste du milieu de la musique n’ait pas senti la fronde qui grondait du côté des artistes et des labels sur cette épineuse question ? Qui voudrait travailler gratuitement trois mois ? Iovine n’a pas répondu directement à ces questions, mais il a déclaré qu’Eddy Cue et Tim Cook avaient « géré cette affaire très rapidement un dimanche matin » et qu’ils avaient pris la bonne décision : rémunérer tous les partenaires d’Apple Music durant ces trois mois.
La Pomme a été singulièrement muette concernant le nombre d’abonnés à son service de streaming musical, y compris (et surtout ?) depuis la fin de la période d’essai pour les premiers inscrits. « Je ne serais pas là si ça n’allait pas », a rétorqué Iovine, sans donner de chiffres. Dans son esprit, Apple Music est un tuyau idéal pour les maisons de disques, comprend-t-on en substance. L’industrie de la musique « a toujours attendu que quelqu’un sorte du bois et s’occupe de la distribution. Mais ça ne fonctionne pas parce que les entreprises technologiques vous demandent de le faire gratuitement ».
Il ne veut pas que le paysage de la musique et plus généralement, le domaine artistique ressemble « au bar de Star Wars sur Tatooine ». « Le business des médias a besoin des gens des entreprises technologiques pour leur donner des ficelles, et le business des technologies a besoin des gens des médias pour leur donner les ficelles ».