Apple a un Plans pour rattraper Google Maps

Nicolas Furno |

Apple est bien consciente que la qualité des cartes proposées avec Plans, son service concurrent de Google Maps, n’est pas à la hauteur. L’entreprise a un plan pour enrichir ses cartes et améliorer la précision des données et il va entrer en action dès la semaine prochaine, avec la troisième bêta d’iOS 12. Au départ, la zone concernée sera limitée à la Silicon Valley, mais à terme, ce sont les cartes du monde entier qui seront remises à jour.

Avant / après sur une région californienne. La différence promet d’être immédiatement visible.

Ce n’est pas une rumeur, c’est une information officielle, mais au lieu d’annoncer le changement à la WWDC (par exemple…), Apple a choisi de la livrer en exclusivité à TechCrunch. Matthew Panzarino a régulièrement des informations sorties directement de Cupertino, la dernière fois c’était pour les créatifs qui participent au développement du Mac Pro. Pour Apple Plans, le journaliste a encore une fois énormément d’informations à apporter. On essaie de faire le point.

Sommaire

Objectif : supprimer les intermédiaires

Apple est bien au courant des limites de ses cartes, c’est un problème connu, qui fait beaucoup jaser et on imagine que les oreilles de l’entreprise sifflent souvent. L’idée de repartir de zéro n’est pas nouvelle d’ailleurs, cela fait quatre ans que le constructeur travaille sur cette toute nouvelle version, comme l’a indiqué Eddy Cue au journaliste.

L’objectif à terme est très clair : Apple ne veut plus dépendre de fournisseurs tiers pour les données, tout doit être créé en interne. Pour rappel, les fonds de carte sont essentiellement fournies par TomTom aujourd'hui et les données sont compilées depuis une multitude de sources qui varient d’un pays à l’autre.

Apple voulait en fait utiliser ses propres données dès le départ, mais c’était une tâche trop énorme pour le lancement et l’entreprise a ainsi choisi de rassembler des données fournies par des tiers. Cette approche a permis à Plans d’exister depuis 2012, mais la qualité n’était pas à la hauteur et surtout, Apple voulait contrôler totalement les données pour la confidentialité des informations personnelles. L’entreprise voulait aussi changer plus souvent ses cartes, sans avoir à remonter l’information à une multitude de partenaires, et sans avoir souvent à patienter pour que le changement soit appliqué.

Et puis, la qualité des données est le plus gros point fort de Google, qui gère ses propres informations depuis des années. Améliorer ce point était vital pour qu’Apple Plans ait un avenir face à Google Maps. À ce sujet toujours, Apple a aussi prévu d’améliorer la recherche, pour afficher des résultats plus pertinents. A priori, Plans devrait (enfin !) tenir compte de votre position pour afficher des résultats proches de vous et ne plus vous envoyer à l’autre bout de la planète.

Des voitures et les iPhone pour collecter les données…

Pour créer ses propres cartes, il faut des données géographiques extrêmement précises. C’est pour cette raison que des véhicules de collecte Apple ont commencé à circuler dès 2015. Ces camionnettes blanches bardées de capteurs et de caméras ont déjà roulé surtout aux États-Unis et dans quelques pays, y compris la France. Mais jusque-là, il s’agissait davantage d’expérimentations ; elles seront désormais centrales dans la stratégie d’Apple pour collecter des données plus précises et plus riches.

L’un des véhicules équipés par Apple pour collecter les données. Sur le toit, on distingue les caméras au milieu, et les LIDAR sur chaque coin.

Outre une antenne GPS très précise, ces véhicules intègrent quatre LIDAR (des lasers chargés de détecter les objets en trois dimensions) et huit caméras haute définition. À l’avant, un outil mesure très précisément les distances et toutes ces données sont collectées… par un Mac Pro, le cylindre de 2013. Quelques SSD pour le stockage et un câble USB qui arrive dans l’habitacle, où un iPad est placé.

À bord, il y a deux personnes : un conducteur et un opérateur qui surveille que les données sont bien enregistrées et que tout se déroule correctement. Les voitures Apple enregistrent plusieurs informations, mais notamment un nuage de points en 3D grâce aux LIDAR, et des photos des environs grâce aux caméras. C’est en grande partie la même chose que ce que fait Google avec ses voitures, mais même si Plans pourrait intégrer une fonction Street View, l’objectif ici est vraiment de collecter de meilleures données pour améliorer les cartes.

Dans chaque camionnette Apple, un iPad permet de surveiller que les opérations se déroulent correctement et que l’itinéraire est bien suivi.

Ces voitures seront indispensables pour enregistrer précisément les données, mais elles ne suffiront pas. Fort heureusement, Apple peut aussi compter sur une autre source d’information, nettement plus présente dans le monde : les iPhone.

Désormais, Apple collectera des informations dès qu’un iPhone est détecté dans un véhicule, ou si son utilisateur marche ou fait du vélo. Si vous suivez un itinéraire et que vous empruntez une route qui n’existe pas sur les cartes, le segment pourra être ajouté beaucoup plus rapidement qu’aujourd'hui. Cela servira évidemment à détecter plus précisément les problèmes de trafic routier, même si ce n’est pas nouveau et Apple le fait déjà aujourd'hui.

Le constructeur en profite pour rappeler longuement que toutes ces opérations sont faites dans le plus grand respect de votre vie privée. Mais ce n’est pas tout de le promettre, il faut aussi le prouver et c’est pourquoi TechCrunch a obtenu une explication plus précise, au moins sur un point.

Quand vous utilisez votre iPhone pour suivre un itinéraire, ce n’est pas la totalité qui est envoyée sur les serveurs d’Apple. En particulier, ni votre point de départ, ni votre arrivée ne sont communiqués à Apple. La seule chose que récupère Plans, ce sont des segments d’itinéraire entre les deux, si bien que l’on ne peut même pas reconstituer la route suivie par un utilisateur individuel. Le constructeur précise aussi que cela n’aura pratiquement aucun effet sur la batterie ou la data à l’usage.

… et des humains pour les corriger

Apple a créé un système très complexe pour traiter toutes les données collectées automatiquement. Il faut réunir les informations envoyées par tous les iPhone du monde entier, les données récupérées par les voitures, mais aussi d’autres sources, comme des photos satellites. Le tout doit former une carte cohérente et des processus d’automatisation complexes, à base d’intelligence artificielle et d’apprentissage automatique, ont été mis en place.

Mais le constructeur ne veut pas faire aveuglément confiance à ces processus automatiques. Plutôt que de reposer uniquement sur des robots, le nouveau Plans va aussi être amélioré par des humains qui vont inspecter et valider des données ou des changements suggérés par les algorithmes. Ce n’est pas nouveau, nous avions évoqué l’an dernier le processus de vérification qui existait déjà en France et dans d’autres pays. Mais à l’image des voitures, c’était une expérimentation avant un lancement à grande échelle.

Des centaines et des centaines d’employés vont inspecter les données, pour les valider ou les corriger à la main. Il s’agira aussi d’améliorer les données en trois dimensions, notamment de créer des formes spécifiques pour les bâtiments les plus connus d’une ville (la tour Salesforce de San Francisco, par exemple). Et ils pourront accéder aux photos collectées par les voitures pour vérifier une information, corriger le nom d’un commerce ou bien encore déplacer le point d’intérêt associé à un lieu. Ce dernier détail est essentiel quand on veut un itinéraire à pied : est-ce que l’entrée est de ce côté de la rue, ou sur le coin après ? Ce sont ces opérateurs humains qui se chargeront de ce niveau de précision.

Apple a créé un outil pour ces contrôles et corrections manuels : voici à quoi il ressemblait l’an dernier, le journaliste n’a pas eu de capture d’écran plus récente.

Au passage, cette approche mixte est l’un des points qui distinguent le plus Apple de Google. Ce dernier repose majoritairement sur des processus automatisés pour générer des données utiles, comme nous vous l’expliquions dans un précédent article.

Bien plus que des cartes en deux dimensions

Même si la finalité première de cette nouvelle initiative est de créer de meilleures cartes et de meilleurs itinéraires, Apple va constituer une base nettement plus ambitieuse, sur trois dimensions. On le disait plus tôt, les voitures que fait tourner le constructeur sont équipées de LIDAR capables de générer un nuage de points en 3D. Le constructeur va aussi utiliser des photos satellites en haute définition et les photos prises par ses voitures pour obtenir une représentation du monde beaucoup plus précise et en trois dimensions.

Cela ressemble fort à un FlyOver, mais qui aurait été créé à partir de points captés à la surface plutôt qu’en hauteur. Ce sera donc nettement plus précis et proche de la réalité que l’espèce de bouillie que l’on a souvent aujourd'hui. Et puis Apple pourra enrichir ses cartes d’informations supplémentaires, par exemple repérer tous les panneaux et enregistrer la vitesse sur les segments routiers.

Naturellement cette vision en 3D du monde fait inévitablement penser à la réalité augmentée ou virtuelle. Apple n’a pas répondu aux questions de Matthew Panzarino sur ces points, mais il est évident que ces données pourraient permettre de placer des objets dans l’espace. Par exemple, les directions pourraient être placées directement sur la route et autour des immeubles, une idée qui n’est pas nouvelle et qui revient en force à l’heure d’ARKit. Ou alors on pourrait voir derrière une maison ou un arbre.

Plus près de nous, les cartes d’Apple Plans ne devraient pas changer de manière fondamentale. Les données seront plus riches et plus précises, mais la forme ne va pas évoluer de manière significative d’après TechCrunch. Eddy Cue explique qu’ils n’ont pas voulu tout changer en même temps et qu’il était important d’afficher des cartes toujours familières. Il y a quelques évolutions à noter toutefois, en particulier la végétation et l’eau qui seront mieux mises en avant. On pourra même voir les piscines sur les cartes, ce qui sera parfait pendant les grandes chaleurs !

Néanmoins, ne vous attendez pas à bénéficier de ces nouveautés de sitôt, du moins si vous n’êtes pas californien. Le lancement va être assez lent manifestement : la Silicon Valley dès la semaine prochaine, le nord de la Californie à l’automne. Le reste des États-Unis sera déployé tout au long de l’année à venir, mais pas un mot à ce stade pour le reste du monde.

C’est d’ailleurs là où le bât blesse. Apple Plans a pris énormément de retard sur Google Maps et c’est très bien que son concepteur s’occupe enfin du problème de manière frontale. Mais est-ce que l’entreprise pourra vraiment avancer suffisamment vite pour rattraper son retard ? Sachant que son concurrent continue d’évoluer continuellement et que le choix de faire intervenir des opérateurs humains va nécessairement ralentir les processus ?

Jusque-là, Apple a toujours avancé très lentement dans le domaine, mais on peut espérer qu’elle a pris conscience du problème et qu’elle va mettre les moyens. Il va falloir beaucoup, beaucoup, plus de voitures que le rythme actuel pour couvrir le globe terrestre en quelques années, par exemple.

avatar Mike Mac | 

Apple a un Rantanplan pour rattraper Google Maps....

La même idée avec un peu d'humour inside.

avatar debione | 

Vu l'avance phénoménale de Maps ( allez un peu tester Plan autre part que dans les grandes villes, genre en Birmanie ou au Cambodge, ou même sur les chemins forestiers de mon Jura natal) il faudrait que Google arrête d'approvisionner Maps pendant quelques annees pour espérer voir Apple rattraper un peu de son retard. Mais comme Maps avance à minima aussi vite que Plan, ils garderont ad vitam eternam leurs avances.

La plus grosse baffe que j'ai reçu concernant la qualité de Plan, c'est dans la bagnole de mon père qui a un Garmin ( vendu avec le vehicule). On a fait l'essai entre le Garmin et son iphone, bordel, il n'est même pas capable de savoir où sont les écoles ( avertissement à chaque fois qu'on s'approche d'une école sur le Garmin, même dans dès bled paumé de 400 habitants...) te propose des sens de circulation qui on changé depuis plus de 5 ans ( c'est une spécialité de ma ville, les sens uniques qui changent tous les ans)... bref, ils partent de vachement loin, et ils faudrait qu'ils investissent énormément plus que ce que font les autres pour rattraper un peu de leurs retards...

avatar AppleDomoAdepte | 

Toutes les initiatives pour contrer Google Maps sont bonnes à prendre.

Quand on voit le flicage de Google, ça fait froid dans le dos.
Pour les parcours habituels, savoir les conditions de circulation, Plan me suffit largement (pour mon usage)

J’utilise parfois Google quand je doute de Plan mais ça devient de plus en plus rare.

avatar en ballade | 

Comparer maps à plans, c’est comme comparer un éditeur de texte avec word. L’un est juste utilisable et encore, et l’autre complet. Appl€ et plans c’est juste faire des effets d’annonce et convaincre les fans de la méthode Coué

avatar AppleDomoAdepte | 

@en ballade

Un word-like avec des mouchards alors

avatar sachouba | 

"Au passage, cette approche mixte est l’un des points qui distinguent le plus Apple de Google. Ce dernier repose majoritairement sur des processus automatisés pour générer des données utiles"
Visiblement, le traitement automatique des données et la vérification communautaire des informations ("Local guides"), semblent plutôt bien fonctionner. Il faudra voir ce que ça donne chez Apple, mais je ne pense pas que confier la cartographie à des opérateurs situés à des milliers de kilomètres soit plus efficace que demander des informations aux locaux.

avatar webHAL1 | 

@sachouba
« Visiblement, le traitement automatique des données et la vérification communautaire des informations ("Local guides"), semblent plutôt bien fonctionner. »

Tout à fait. L'article semble omettre ce point, mais les "guides locaux" de Google Maps font un sacré travail de nettoyage et de mises à jour des données.

avatar pagaupa | 

Oui on avait remarqué que nos itinéraires interessent Apple...
Bref! Apple ne fait que faire ce qu’a fait Google, avec dix ans de retard.
Bonne raison pour éteindre un iphone en voiture.

avatar huexley | 

Un des autres avantages de Google c'est de marcher partout et sur n'importe quel support, PC Mac, Android etc... Je peux prendre n'importe quel appareil et retrouver mon environnement fonctionnel, mes adresses, itinéraires (et en Islande ça m'a beaucoup servi). Bon courage avec Plan

avatar p@t72 | 

"plans" foireux...comme d'hab !

avatar p@t72 | 

là franchement je m'inquiète.
plus d'intervention de John...euh lydia zut... poil de yacc...?
A t'il été encore banni ?
....ouf !

avatar Domsware | 

Ce n’est pas seulement une question de moyen mais de temps (et de volonté). Très courant dans les projets informatiques de limiter cela à l’aspect financier : on met 2 fois plus d’argent et ça ira 2 fois plus vite. Ce qui bien sûr est faux.

avatar bibi81 | 

Bof. Combien d'Apple Cars en circulation ?

Ma rue a été refaite ces derniers mois et Google Street View est déjà à jour !!

avatar webHAL1 | 

@Domsware
« Très courant dans les projets informatiques de limiter cela à l’aspect financier : on met 2 fois plus d’argent et ça ira 2 fois plus vite. Ce qui bien sûr est faux. »

Je suis d'accord avec ce constat, mais je pense qu'ici la situation est un peu différente. Il s'agit avant tout de collecte de données, et pour ça il me semble qu'il est possible de "paralléliser" le travail, et donc d'investir plus de ressources pour accélérer les choses. On ne parle pas de programmation, où en effet il est illusoire de penser que doubler le nombre de développeurs permettra de réduire de moitié le temps nécessaire à la finalisation du produit. On parle de données qui doivent être mises à jour. Ce n'est pas une tâche complexe en soi, mais elle requiert des ressources. Ou du temps. Apple a vraisemblablement choisi de prendre son temps.

avatar xtyou | 

Personnellement, j’utilise Plans pour des problématiques de vie privée, même si parfois j’utilise Gmaps (principalement pour Street View).
Par contre je ne comprends pas ceux qui reprochent encore à Plans le fait qu’il ne trouve pas les rues à proximité lors de recherches, cette époque est révolue depuis longtemps même si au début c’était vrai et très chiant.

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