Le streaming sauve l’industrie de la musique

Mickaël Bazoge |

Un pas dans « la bonne direction » : c’est ainsi qu’un responsable de la maison de disques BMG qualifie le renouveau de l’industrie de la musique depuis deux ans. Les trois majors ont annoncé des profits cette année, même si on est loin des niveaux de 1999 durant laquelle les revenus avaient atteint un sommet ; depuis, les ventes annuelles ont fondu de moitié, tournant en moyenne autour des 7 milliards de dollars.

Cliquer pour agrandir

Mais la période des vaches maigres est peut-être derrière cette industrie, grâce aux services de streaming. Les dépenses des consommateurs progressent en effet depuis l’an dernier : aux États-Unis, durant les six premiers mois, les revenus de la musique enregistrée ont augmenté de 8,1%, ils atteignent les 3,4 milliards de dollars d’après des chiffres de la RIAA consultés par Bloomberg.

Ce ne sont pas les ventes de CD qui ont soutenu l’activité : elles sont en baisse de 14% au premier semestre. Non, c’est bien le streaming qui permet au secteur de relever la tête avec une croissance à deux chiffres. Il se trouve que les 120 $ annuels des abonnements premium de Spotify ou d’Apple Music sont supérieurs au budget CD moyen, y compris pendant l’âge d’or de la galette.

Les revenus issus du streaming ont, aux États-Unis, augmenté de 57% sur les six premiers mois de l’année, soit 1,6 milliard de dollars. C’est pratiquement la moitié du chiffre d’affaires de l’industrie. L’écoute gratuite financée par la publicité a elle progressé de 24% à 195 millions. Malgré tout, certains comme Cary Sherman de la RIAA estiment que ces services se paient sur la bête.

Cliquer pour agrandir

Dans un billet publié sur le blog de l’association de l’industrie musicale américaine, il écrit : « Beaucoup de ces services génèrent des milliards de dollars pour eux mêmes sur le dos de la musique et de sa popularité, mais ils ne paient que des centimes aux artistes et aux maisons de disques ». Et le problème du piratage n’a pas été réglé pour autant : « Les sites pirates opèrent en toute impunité ».

Enfin, d’après des responsables de l’industrie, Apple Music — qui compte 17 millions d’abonnés payants — recrute surtout des utilisateurs qui n’avaient jamais payé de forfait pour de la musique. Ce ne sont pas les mêmes abonnés que chez Spotify (40 millions de clients), ce qui est intéressant pour l’industrie : en s’adressant à des publics différents, les services ne se vampirisent pas… pour le moment. Signe que le marché continue de croître.

avatar misterbrown | 

"Sauve" rien du tout.
Le garde à flot.

avatar Jack | 

@ misterbrown

C'est exactement ça.

Et d'ailleurs, par "industrie de la musique", on parle des majors spécifiquement. La véritable industrie de la musique, ceux qui la créent (les artistes, les paroliers, les compositeurs, etc." survivront très bien à la mort des majors, qui finira par intervenir un jour ou l'autre.

avatar Abd Salam | 

@blackops :
Il n'est pas dit que les artistes survivront au nouveau partage des profits... avec les intermédiaires qui remplacent les "majors".

Je pense que les artistes vont amèrement regretter le bon vieux temps des "majors".

avatar harisson | 

"Je pense que les artistes vont amèrement regretter le bon vieux temps des "majors"."

...ou pas ^_^ (en tout cas, perso, je ne le regretterai pas même si je ne suis pas "artiste")

avatar Hideyasu | 

@blackops :
Sachant qu'en plus les artistes indépendants qui commencent à être connu ont beaucoup moins de contraintes, et gagne plus facilement de l'argent, plutôt que les petits artistes non indépendants (je ne parle pas des mecs qu'on écoute tout les jours à la radio)

avatar Abd Salam | 

Si seulement ça garder l'industrie à flot...

Les "majors" et les artistes sont ceux qui gagnent le moins dans le "streaming"...

En fait, le "streaming" devient profitable pour de nouveaux intermédiaires entre les consommateurs et les musiciens/chanteurs (maison de disques comprises).

avatar Hideyasu | 

@Abd Salam :
Pourtant Spotify est difficilement rentable.

avatar Domsware | 

« Beaucoup de ces services génèrent des milliards de dollars pour eux mêmes sur le dos de la musique et de sa popularité, mais ils ne paient que des centimes aux artistes et aux maisons de disques »

Je ne comprends pas cette partie puisque, de mémoire, la répartition est grosso modo de 30% de l'abonnement pour le service, hors taxes bien sûr. Le reste allant à "la musique et sa popularité".

avatar Hideyasu | 

@Domsware :
Il me semble que ça tourne plus vers les 50%

avatar Mickaël Bazoge | 
Si tu comptes les éditeurs, c'est plus proche des 70%. Mais ce ne sera jamais suffisant.
avatar Abd Salam | 

@MickaëlBazoge :
Il doit y avoir beaucoup d'intermédiaires alors... parce que les artistes sont pas les grands gagnants...

avatar Abd Salam | 

@Domsware :
Pas tout à fait...

Par ex, James Blunt déclarait lors d'un interview à Oxford, qu'il percevait 0,00004 £ par écoute...

avatar Domsware | 

@Abd Salam :

Oui, en effet. Après les 70% vont à une chaîne d'entités, l'artiste n'étant que l'une d'entre elle.

avatar D.I.M | 

Bonjour,

Alors si je comprends bien, à l'age du CD, on dépensait 100€ (120$) par an, pour une utilisation à vie, sur tous les lecteurs CD...

Aujourd'hui on paie plus que les 100€ (120$) pour simplement écouter pendant un an avec la restriction qu'est la dématérialisation, obligeant à avoir le même logiciel sur tous les appareils, d'être forcément connecté pour écouter, et de ne pas pouvoir lire dans un appareil type iPod (sans connexion) ou sa voiture?...

C'est moi où on se fait bien n**** la face avec cette histoire de musique dans le nuage?... après je dis ça je dis rien...

Cdt.

avatar DouceProp | 

Exactement.

Allons donc voir les artistes en concert, c'est apparemment là qu'ils récupèrent plus d'argent, c'est également là que l'on peut juger de leur talent. Achetons encore des disques, vinyles ou cd. Achetons sur Bandcamp ou ailleurs, en flac, alac...

avatar Domsware | 

@D.I.M

100 € par an pour une utilisation à vie — la vie du support — pour combien de morceaux/albums ?

Le streaming a des avantages aussi : par exemple d'écouter plus de musique dans le sens plus grand nombre d'albums et morceaux. Faire cela avec des supports physiques est beaucoup plus onéreux.

De plus l'on n'est pas obligé d'être tout le temps connecté pour écouter puisque l'on peut enregistrer de la musique téléchargée qui restera disponible le temps de l'abonnement — pour Apple Music en tout cas.

avatar LoossSS | 

Exact. Je ne le vois pas du tout comme @D.I.M mais plutôt comme :
Avant : 100/120€ => une dizaine d'album
Aujourd'hui : 100/120€ => tu as 40 millions de titres

Alors oui, c'est une "location". Si tu arrêtes l'abonnement tu n'as plus rien. Mais si on part du principe que l'on va dépenser 100€/an toute sa vie pour la musique, autant prendre en streaming qu'en CD...

Enfin, en effet, rien n'oblige à être constamment connecté. Toutes mes playlists spotify sont en offline sur mon iPad. Je n'ai pas besoin d'internet pour écouter ma musique.

avatar awk | 

Reste a prouver que le modèle est viable pour ceux qui le porte et n'espèrent ne vivre que de ça.

Pour l'instant ce n'est pas gagné, Spotify est une licorne aux pattes d'argile.

avatar Kenny31i | 

@DIM : +1

avatar ckermo80Dqy | 

Eh oui, on l'a dit et répété, le streaming c'est l'arnaque du siècle pour les artistes. Il suffit de jeter un coup d'œil à ses relevés de royalties ou de droits d'auteur pour éclater de rire... ou se mettre à pleurer, au choix.

avatar melaure | 

Perso je reste au CD. Au moins il ne sont pas lié a un store ou une connection au net ... Et he n'ai pas l'impression d'acheter du vide ;)

avatar alan1bangkok | 

Ce que touche l'artiste le major et autres intervenants n'est pas vraiment mon problème .
Je paie légalement ma musique
Vinyl Cd et maintenant Spotify sans états d'âmes

avatar headoverheel | 

Dire que l'on est obligé d'avoir une connexion pour écouter de la musique sur Apple Music, Spotify ou Deezer est faux. On peut rendre disponible hors ligne n'importe quel morceau sur son smartphone, ordinateur et même iPod touch.
Aucun service de streaming ne gagne d'argent. Il y a toujours eu plusieurs intermédiaires entre l'artiste et le client. Au 20eme siècle, celui qui vendait et conseillait, s'appelait le disquaire.
YouTube n'est t'il pas plus néfaste au monde de la musique que ces entreprises qui font payer les clients 120 euros/an ?

avatar Applesoft | 

Le streaming possède tellement d'avantages que je vois pas comment il pourrait mourir ... surtout que le secteur est en forte croissance. On ne reviendra jamais en arrière. Nos usages finissent toujours par s'imposer et les majors n'ont aucun pouvoir pour imposer un retour en arrière. Le business model du streaming finira bien dans les 5-10 ans par être trouvé.

Ce qui change avec le streaming, c'est la court-circuitage des majors qui continueront pendant longtemps à nous expliquer que c'était mieux avant pour les artistes. Mais la réalité, c'est que les artistes doivent maintenant négocier directement avec Spotify ou Apple Music. Et rassurez-vous, ils gagnent beaucoup d'argent (cf dernièrement album Frank Ocean).

avatar awk | 

@Applesoft

"Le streaming possède tellement d'avantages que je vois pas comment il pourrait mourir ... surtout que le secteur est en forte croissance"

Croissance n'est nullement synonyme de rentabilité.

Nombreux sont ceux s'interrogent sur le potentiel de rentabilité de Spotify qui pour l'instant est avant tout une gigantesque machine à cramer du cash.

Beaucoup considèrent que la seule porte de sortie sera une renégociation drastique des accords avec les ayant droits une fois une position dominante acquise et les acteurs du marché consolidés, sans quoi l'équation de la rentabilité reste difficile.

avatar Applesoft | 

@awk :

Ton dernier paragraphe se produira ! On est donc d'accord :) Juste une question de temps. Il n'existe pas beaucoup de secteurs en forte croissance, de secteurs où les usages s'imposent qui ne finissent par trouver un modèle économique. Ou bien merci de m'en trouver un ? Pour que cela se produise, il faudrait que les majors ou les artistes, ou autres, trouvent un moyen de stopper le processus. Ils n'en ont ni les moyens juridiques, ni les moyens financiers.
C'est juste que les acteurs de ce secteur doivent aussi trouver le temps de s'adapter. Mais on y est déjà.

Prenons Spotify par ex. Actuellement, la rentabilité n'est pas au RV. Mais qui pense que l'abonnement va rester éternellement à 10 euros ? Alors certains vont dire qu'augmenter les tarifs serait du suicide... les mêmes qui estimaient qu'il était fou de faire payer pour du streaming... Juste une question de temps :)

avatar LeSuisse | 

Le gratuit est toujours trop cher... on le voit avec la presse gratuite qui a nivelé l'information vers le bas ou tué un bonne partie de la presse payante.

Pour la musique c'est plus difficile - tant mieux -. On le voit avec Spotify qui ne gagne toujours pas d'argent, malgré une (belle) offre payante. Il est plus difficile de mandater des sous-musiciens pour créer des titres qui plaisent que d'engager des pseudo-journalistes pour pondre des infos sans aucune recherche de fond.

avatar awk | 

@Applesoft

Je n'aurai pas la prétention de trancher un débat assez complexe sur le devenir économique de ce type d'approche qui agite le microcosme.

Tout ce que je peux affirmer c'est que ce n'est pas gagné :-)

avatar Applesoft | 

@awk :

Ben je mouille ma chemise :) Mais je peux me tromper.

Je vois un Spotify qui grossit sa base Premium et Free à la vitesse de l'Apple Store. Spotify représente aujourd'hui 10% des revenus pour les labels. Vu le rythme actuel, on va vite sur les 20%. Le rapport de force va tourner en faveur des plate-formes de streaming. Dans un avenir assez proche, elles représenteront un tiers des revenus pour les labels et seront la croissance de ces labels. A partir de là, l'intérêt des labels ne sera certainement pas de les "plomber". Il y aura des négociations.

Mon pari. RV dans 5 ans, voire avant.

avatar awk | 

@Applesoft

C'est incontestablement une des issues posible

Consolidation du marché avec deux acteurs restant : Spotify et Apple.

Croissance de l'importance de l'activité streaming dans le bilan des majors

Renégociation sévère des accords avec un rapport de force différent.

avatar koko256 | 

J'aimerai bien le modèle suivant :
- le fournisseur du service prend 1€ (ou 5... à négocier) sur les 10€ du service
- les 9€ qui restent sont répartis entre les artistes et majors que j'ai écouté au prorata du nombre d'écoutes, en enlevant celles qui sont du domaine de l'extrait (30s)
Cela me paraît honnête. Avec le modèle actuel, si je n'écoute pas grand chose un mois, tout va chez l'hébergeur...

avatar Domsware | 

@koko256:

Tu oublies la part de la TVA ! Dans le calcul !

avatar Applesoft | 

On a déjà un "précédent" avec la négociation Apple ITunes / majors où Jobs a obtenu des conditions préférables ... mais les labels ne pensaient pas qu'Itunes cartonnerait. Et ils ont toujours regretté de s'être fait "berner" à l'origine du deal.

Donc maintenant, ils vont y regarder à 2 fois si négociation il doit y avoir.

Si maintenant pour pas mal de raisons, les majors n'acceptent pas de négocier, je pense qu'il reste de la place pour un business model streaming sur une base abonnement plus cher. Difficile de se prononcer sur l'élasticité prix dans le secteur du streaming, mais plus le temps avance, plus elle va diminuer à mon sens.

Bref, je vois mal comment le streaming qui apporte beaucoup de bonnes choses pourrait ne pas trouver son modèle. Ça me paraît hautement improbable.

avatar awk | 

@Applesoft

Il y a une autre issue possible l'adossement à un industriel ayant d'autre source de profit et utilisant l'offre comme levier pour ces sources de profit.

Cela ramène plus ou moins les choses dans le contexte d'Apple Music

Une des porte de sortie envisagée par les investisseurs de Spotify est un exit par un rachat.

avatar Applesoft | 

@awk :

Ah oui on peut imaginer plusieurs scénarios. Un Samsung ou un Google pourrait racheter un Spotify par ex. Mais il semble que ce soit plutôt l'IPO qui soit envisagé d'ici 3 ans. Dès que Spotify aura des comptes positifs, et je mise sur 2017, voire 2016, ils auront démontré aux marchés financiers une certaine validité de leur modèle.

Pour l'intérêt du streaming et son avenir, je ne souhaiterais pas que ce soit un rachat pour Spotify mais plutôt un IPO.

avatar Applesoft | 

@awk :

Et surtout ne pas oublier une chose à mettre dans l'équation : les labels ont tous aussi des parts dans Spotify ... :)

avatar awk | 

@Applesoft

Si Spotify continue à se financer sans difficulté tant les liquidités sont abondante la question de la pertinence d'un IPO a moyen terme reste il me semble très discutée ;-)

Après à un horizon de 3 ans les choses peuvent changer.

avatar Applesoft | 

@awk :

On va pas rentrer dans les détails chiffrés, mais les conditions du prêt 1 milliard contracté "forcent" Spotify à faire un IPO assez vite. Sinon, les actionnaires prendront la douche.

C'est pas un hasard s'ils viennent de virer le numéro 2. Ils veulent continuer à accélérer leur développement en boostant le chiffre d'affaires et notamment le revenu pub : faire la mariée aussi belle que possible pour l'IPO.

avatar awk | 

@Applesoft

Il faut que je vérifie mais il me semble que les majors ont quand même été fortement diluées suite à l'accumulation de levées de fonds ;-)

avatar Applesoft | 

@awk :

Ben elles ont toujours été minoritaires, depuis le départ. Probablement diluées avec des levées de fonds, mais dernièrement ce n'était plus des levées de fonds "équity" mais dette avec grosse sanction si Spotify ne fait pas d'IPO d'ici fin 2017. Quant à leur droit de vote, on sait pas puisque c'est une société privée mais je pense qu'elles ont un traitement particulier.

Et puis faut aussi savoir que Google siège maintenant au Board de Spotify. Autre élément important.

Beaucoup de tenants et aboutissants pour Spotify. La seule chose à peu près certaine, c'est que Spotify fait tout en ce moment pour préparer un IPO d'ici fin 2017 et qu'une des conditions de son succès est la renégociation à long terme des droits avec les labels (récemment arrivés à terme) car les marchés financiers détestent l'incertitude.

avatar awk | 

@Applesoft

Merci pour ces intéressante précisions ;-)

avatar kafy28 | 

Les majors voient leurs revenus remonter mais c'est pas grace à leur travail.
Aucune offre de streaming en provenance d'une major ! Pathétique.

CONNEXION UTILISATEUR