Taxe ou contribution, peu importe le mot, mais l'idée de puiser un petit quelque chose sur les abonnements au streaming musical fait son chemin. Le rapport sur le financement de la filière musicale en France, réalisé par le sénateur Julien Bargeton, a été remis fin avril à Rima Abdul Malak, la ministre de la Culture. Une des recommandations du rapport est la création d'une contribution de 1,75 % sur les revenus du streaming (payant et gratuit financé par la publicité).
L'argent généré par cette manne, environ 20 millions d'euros par an, abonderait les caisses du Centre national de la musique (CNM), une structure créée en janvier 2020 pour rassembler et organiser l'ensemble de la filière. Son aide a d'ailleurs été très importante au plus fort de la crise sanitaire pour soutenir les artistes. Dans l'idée, le CNM est pour la musique l'équivalent du Centre national de la cinématographie et de l’image animée (CNC) pour le cinéma.
Actuellement, les financements du CNM — dont le budget annuel est court de 30 à 40 millions — proviennent des caisses de l'État ainsi que par une taxe sur la billetterie, autrement dit sur le spectacle vivant. L'idée d'une contribution du streaming a du sens, selon le rapport : c'est le segment dominant (il représentait 61 % des revenus de la musique enregistrée l'an dernier) et le plus porteur (+13 % entre 2021 et 2022).
Pour l'abonné, cette contribution serait indolore, estime Julien Bargeton : les 15 centimes que représentent la taxe ne seront pas « nécessairement répercutés » sur le montant des abonnements, explique-t-il aux Échos. Il prend l'exemple de Netflix, dont le prix des abonnements n'a pas augmenté en France malgré la contribution versée par la plateforme au CNC.
L'abonné passera-t-il à la caisse ?
Encore faut-il mettre tout le monde d'accord. La filière est en effet partagée sur cette proposition. Le secteur du spectacle vivant applaudit l'idée, les revenus provenant du streaming pourraient ainsi garantir une égalité de traitement alors que les billetteries sont déjà soumises à une taxe équivalente.
Ça coince en revanche davantage avec les majors du disque et une partie des indépendants regroupés au sein du Snep (Syndicat national de l'édition phonographique) qui voient d'un mauvais œil un coup porté aux « champions nationaux et européens au moment où ils font face à la concurrence de nouveaux entrants comme TikTok, qui gardent leurs audiences captives sans rémunérer les créateurs ».
Le Syndicat des éditeurs de service de musique en ligne (ESML), qui représente les plateformes de streaming, rappelle que ces dernières ne sont pas rentables et que le contexte économique est difficile : « il va être très compliqué d'être assujetti à une taxe sans la répercuter sur le consommateur », menace Ludovic Pouilly, le président de l'organisation.