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Aux bons services d’Apple

Mickaël Bazoge

dimanche 03 mars 2019 à 10:00 • 141

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Services, services, services. Tim Cook n’a plus que ce mot à la bouche depuis des mois. Avec raison : alors que les ventes d’iPhone ont pris un coup sur la tête au dernier trimestre, l’activité des services à base d’abonnements se porte à merveille. Apple veut maintenant accélérer le rythme avec plusieurs nouveautés.

L’année 2019 sera indéniablement marquée par le lancement de plusieurs services sur abonnement. Le constructeur a fait ses armes sur le stockage iCloud, Apple Music (et iTunes Match avant) et les abonnements de l’App Store. La mise en place a parfois été laborieuse — on songe au service de streaming de musique —, mais à force de volonté (et de beaucoup d’investissements), Apple est arrivée à ses fins.

Musique, vidéo, santé, presse… L’avenir des services Apple.

Au dernier trimestre 2018, les services (qui comprennent aussi les commissions Apple Pay) représentaient 10,9 milliards de dollars, soit 19 % de plus que durant la même période de l’année précédente.

  • Apple Music comptait plus de 50 millions d’abonnés payants (contre 96 millions pour Spotify) ;
  • Apple News affiche 85 millions de lecteurs actifs malgré une présence limitée à trois pays ;
  • Apple Pay a atteint 1,8 milliard de transactions sur le seul trimestre.

Apple dénombre un total de 360 millions d’abonnés payants à tous ses services (dont le stockage iCloud), avec l’objectif relativement réaliste d’atteindre les 500 millions d’ici 2020. Apple peut s’appuyer sur une base installée d’appareils actifs qui ne cesse de croître et qui s'établit à 1,4 milliard d'unités. Il est temps de faire les poches proposer à tous ces utilisateurs de nouveaux services.

Voici un petit florilège de ce qu’Apple pourrait dévoiler cette année, avec une première étape le 25 mars, date supposée d’un special event.

Apple Video

Quand ? D’ici cet automne.

Quoi ? Un service de streaming vidéo, proposant des films, séries TV et documentaires. Après un galop d’essai avec Carpool Karaoke, Planet of the Apps et des docs pour Apple Music, Apple a mis les bouchées doubles : embauches de pointures d’Hollywood et gros budget pour empocher du contenu original. On a évoqué un milliard de dollars, mais au vu des nombreux projets engagés, il est probable que la note a doublé depuis, voire plus.

Le fruit de ces investissements devrait être dévoilé durant l’événement du 25 mars (toujours pas confirmé), en présence de plusieurs vedettes. La rumeur a évoqué les actrices et productrices Jennifer Aniston et Reese Whitherspoon, ainsi que le réalisateur J.J. Abrams.

Comment ? C’est la grande question. De quelle manière Apple compte-t-elle s’y prendre pour distribuer ce contenu ? Plusieurs hypothèses sont sur la table : un abonnement mensuel « à la Netflix », une diffusion gratuite pour les propriétaires d’appareils de la Pomme… ou un mix des deux peut-être.

Malgré la quantité de projets en cours de production, ce service de streaming risque d’être un peu chiche si Apple devait se contenter de son contenu exclusif. Le constructeur a pourtant voulu se constituer un fond de catalogue, notamment en tentant (en vain) d’acquérir les droits de diffusion de la série Friends.

On peut imaginer un prix moins élevé que les 10 $ mensuels de Netflix, ou une stratégie à la Amazon Prime où les vidéos font partie d’un bouquet de services plus large, par exemple 15 $ avec Apple Music et du stockage iCloud.

Pour ce qui concerne la distribution à proprement parler, Apple semble avoir pris les devants. Bien sûr, il y aura les canaux habituels, l’Apple TV et l’application TV sur iOS (quid de macOS ?). La Pomme pourra aussi compter sur les téléviseurs AirPlay 2 des constructeurs partenaires sur lesquels il sera aisé de regarder ce contenu depuis un appareil iOS. On verra si Apple a aussi négocié l’arrivée d’une app TV sur ces smart TV.

Pourquoi ? Comme pour le streaming de musique, Apple a laissé passer le train du streaming vidéo malgré une position enviable sur le marché de la VOD. L’iTunes Store continue d’être une place forte du secteur de la vidéo, avec notamment une offre solide de contenus en 4K à louer ou acheter.

Mais l’avenir est incontestablement à la vidéo à la demande sur abonnement (SVOD) et Apple n’a rien à proposer dans ce domaine, se contentant de distribuer des applications tierces. D'ailleurs, la Pomme s’est peut-être fait prendre à son propre jeu : la toute-puissance de Netflix lui permet de s’affranchir du système d’abonnement d’iTunes et donc de la commission d’Apple.

Apple a depuis longtemps la volonté de s’imposer sur ce marché. En 2015, des bruits de couloir insistants faisaient mention de discussions entre Apple et les réseaux télé américains pour un bouquet de chaînes distribuées via l’Apple TV. L’affaire n’a abouti sur rien, en raison peut-être des talents relatifs de négociateur d’Eddy Cue… Beaucoup de temps perdu qu’il va falloir rattraper désormais.

Apple News Magazines

Quand ? Sans doute au printemps.

Quoi ? Apple devrait proposer un abonnement mensuel pour accéder à des articles de la presse quotidienne et magazine, en plus de la lecture gratuite dans Apple News. Ce service, basé sur celui mis en place par Texture — acheté par Apple en mars dernier —, ressemblerait pas mal à ce qu’on peut trouver en France avec LeKiosk, SFR Presse, ePresse

Apple News propose déjà de connecter les abonnements souscrits auprès des publications (le Wall Street Journal, par exemple), mais il s’agit ici de commercialiser un accès le plus large possible aux contenus des grands magazines et quotidiens américains. Tout dépend bien sûr des négociations avec les maisons d’édition : Apple exigerait d’empocher la moitié de chaque abonnement, ce qui en ferait tousser quelques-uns.

Comment ? Dans un premier temps, le « Netflix de la presse » à la sauce Apple pourrait se limiter aux seuls États-Unis au vu du contenu négocié pour ce nouveau service. À notre connaissance, seules des publications américaines auraient négocié avec la Pomme.

Apple News est un excellent service, peut-être un des meilleurs du constructeur actuellement, que ce soit dans sa conception ou sa pertinence. Mais il est encore trop limité : trois pays seulement y ont accès (États-Unis, Royaume-Uni et Australie), et le déploiement est extrêmement lent. Le Canada sera de la fête avec iOS 12.2.

Pourquoi ? Si on peut interroger la légitimité d’Apple dans le secteur de la production de contenus vidéo (Planet of the Apps est loin du chef d’œuvre), en revanche pour la presse, le constructeur a une certaine expérience. Tout n’a pas été couronné de succès, comme le quotidien The Daily sur iPad ou encore l’ancienne app Kiosque.

Apple News, dont l’architecture a été développée par la start-up Prss, s’appuie sur des rédactions de journalistes pour alimenter l’app en contenus fiables, en complément d’algorithmes. Cette touche humaine contraste avec le flot de désinformation et de fake news qui circule en continu sur les réseaux sociaux, Facebook en tête.

Un abonnement à des sources aussi sérieuses que le Wall Street Journal, le New York Times et d’autres grands noms de la presse US ne pourra que renforcer la crédibilité et la pertinence d’Apple News. De quoi aussi affirmer la position d’Apple qui se présente comme un robinet à contenus vertueux.

Apple Santé

Quand ? Cette année, selon Tim Cook.

Quoi ? Juste après l’avertissement sur résultats du début d’année, Tim Cook a annoncé qu’Apple planchait sur un service de santé. Une manière de noyer le poisson alors que l’action d’Apple buvait la tasse ? Sans doute, mais c’était aussi une façon de préparer le terrain : le constructeur prépare du lourd. Mais quoi au juste ?

Le dossier médical de l’app Santé.

Bien malin celui qui saura deviner ce qu’Apple a derrière la tête en matière de service santé. Mais on peut avancer l’idée d’un « iCloud de la santé », un abonnement regroupant non seulement toutes les données recueillies ici et là (par l’Apple Watch, les actes médicaux, la balance connectée…) mais aussi le matériel.

10 $ par mois pour une Apple Watch, une garantie Apple Care+, une plateforme de récolte et de traitement des données, voire du conseil rendu possible grâce à l’intelligence artificielle ? Après tout, plusieurs assureurs américains offrent déjà l’Apple Watch aux clients qui s’engagent à se maintenir en forme.

Comment ? « Je crois que dans le futur, quand vous vous poserez la question “quelle a été la plus grande contribution d’Apple à l’humanité ?”, ce sera la santé », a expliqué le patron d’Apple. Depuis plusieurs années, la Pomme tisse consciencieusement sa toile dans le secteur sanitaire.

Apple a lancé les frameworks open-source ResearchKit et CareKit pour les professionnels de la santé et les développeurs d’apps à visée clinique ; la base de données HealthKit qui stocke les données de suivi physique et de santé ; l’application Santé et son dossier de suivi des actes médicaux. Le constructeur a également noué des partenariats de premier plan avec de prestigieuses cliniques aux États-Unis.

Un ECG réalisé avec l’Apple Watch Series 4.

Si on ajoute à cette toile de fond logicielle le cardiofréquencemètre et l’électrocardiogramme de l’Apple Watch, la boîte à outils de la Pomme commence à être bien pleine. Sans oublier les différentes études cliniques et de recherche, sur le diabète, les maladies cardiovasculaires, Parkinson, etc. De quoi alimenter la réflexion des médecins embauchés par Apple et orienter le développement de ce service santé.

En plus de tout le reste, le constructeur bénéficie également de son image en matière de confidentialité. L’idée de fournir des données liées à la santé à des acteurs qui ne sont pas forcément des champions dans ce domaine peut mettre mal à l’aise.

A contrario, Apple a pris des mesures tout aussi fortes que ses positions pour respecter la vie privée des utilisateurs. Voilà qui pourrait constituer un avantage commercial au moment de lancer ce service santé. Le constructeur s’en est d’ailleurs déjà servi pour faire valoir sa différence durant le dernier CES.

Tim Cook indiquait récemment à NPR que les gens regardaient toutes ces histoires de fuite de données et sentaient qu’ils pouvaient faire confiance à Apple. Cette confiance est un élément clé, tout particulièrement dans le contexte d’un service connecté d’une manière ou d’une autre à la santé.

Pourquoi ? Si l’on met de côté les bons sentiments de Tim Cook, la raison pour laquelle Apple veut se lancer dans un service de santé est simple : ce marché est absolument énorme. Les dépenses de santé progressent de 5% par an ; à l’horizon 2022, le secteur franchira le seuil des 10 000 milliards de dollars dans le monde, selon Deloitte. Apple entend bien manger un petit (ou un gros) bout de ce succulent gâteau.

Apple Jeux

Quand ? Qui sait ?

Quoi ? La rumeur, apparue fin janvier, évoque le lancement d’un service d’abonnement à un bouquet de jeux vidéo. Contre une certaine somme, le joueur invétéré pourrait étancher sa soif de jeux vidéo en accédant en illimité à plusieurs titres.

Depuis le second semestre 2018, Apple discuterait avec des éditeurs pour constituer un catalogue de jeux, avec pourquoi pas des exclusivités. Le constructeur pourrait même mettre la roue à l’épaule en produisant ses propres jeux, comme il le fait pour le contenu vidéo.

Comment ? Si d’aventure Apple voulait se lancer sur ce créneau, il lui serait relativement simple de mettre en place une telle offre. L’infrastructure des abonnements est une machine bien huilée, les capacités de distribution également, sans oublier l’aspect « multiplateformes » — certes, on resterait entre soi, c’est-à-dire sur iOS, ce qui représente tout de même des centaines de millions d’iPhone, d’iPad et d’iPod touch. Mais ce forfait gaming aurait encore plus de sens encore si l’Apple TV était de la fête.

Malheureusement, le constructeur a démontré son manque d’intérêt pour le jeu tvOS (lire : L'Apple TV ne joue toujours pas). Il suffirait pourtant de pas grand-chose : en fournissant une manette en standard avec le boîtier, un grand pas serait déjà franchi.

Pourquoi ? Si les jeux vidéo ont connu un âge d’or avec l’Apple II, depuis l’avènement du Mac le constructeur a méthodiquement pratiqué la politique de la terre brûlée en la matière. Cartes graphiques anémiques, composants logiciels mal adaptés ou à rebours du marché… L’espoir de voir un jour la plateforme macOS devenir une place forte en matière de plaisirs vidéo-ludiques a disparu.

Si la perception a changé, c’est par le biais d’iOS. Dès 2008 et l’ouverture de l’App Store, l’iPhone a très rapidement confirmé son potentiel de machine à jouer. Les jeux ont même gagné leur propre onglet au sein de la boutique d’applications, tandis que les achats intégrés font la fortune des éditeurs (et le malheur des joueurs). Le marché du jeu vidéo mobile pourrait peser 100 milliards de dollars d’ici 2021, selon le cabinet Newzoo.

L’application Shadow sur tvOS.

Les plaques tectoniques à l’œuvre dans le marché du jeu vidéo sont en train de bouger. Le streaming commence à démontrer toute sa pertinence : la technologie permet désormais de jouer à des jeux AAA sur des machines qui ne sont normalement pas calibrées pour cet usage. Le service Shadow redonne ses lettres de noblesse au jeu sur Mac, tandis que les versions iOS et tvOS sont prometteuses.

Google, qui devrait dévoiler sa propre console de streaming de jeux en mars, et Microsoft avec xCloud sont également sur les rangs, sans oublier le service GeForce Now de Nvidia. Si le service que développerait Apple ne repose pas nécessairement sur le streaming à proprement parler, le constructeur pourrait ne pas voir d’un très bon œil le développement de ces solutions qui contournent l’App Store.

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